réglementation
Question de :
Mme Chantal Guittet
Finistère (5e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 27 juin 2013
MOBILITÉ DES TRAVAILLEURS
M. le président. La parole est à Mme Chantal Guittet, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.Mme Chantal Guittet. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes. J'y associe mon collègue Gilles Savary, avec qui j'ai beaucoup travaillé sur le sujet.
Monsieur le ministre, la commission des affaires européennes a adopté un rapport d'information et une résolution européenne sur la proposition de directive d'application relative au détachement des travailleurs au sein de l'Union européenne.
Au gré des auditions, nous avons constaté qu'un véritable négoce de travailleurs low cost se développait en Europe, grâce à des réseaux très organisés et difficilement contrôlables. Les failles de la directive ont permis de multiples abus dans le domaine du détachement des travailleurs. Celui-ci est devenu l'outil central de stratégies d'optimisation sociale à l'échelle européenne, dans lesquelles sont embarqués des ouvriers sous-payés, véritables esclaves des temps modernes. Ces pratiques de dumping social menacent des pans entiers de notre économie. Elles menacent nos emplois et le financement de nos comptes sociaux
Il y a urgence, monsieur le ministre. Les professionnels de l'agriculture, du bâtiment, du transport tirent la sonnette d'alarme.
Dernière victime en date, la filière porcine en Bretagne : 1 700 emplois sont en danger dans les abattoirs Gad, actuellement en redressement judiciaire. Il est aujourd'hui plus rentable de faire tuer les porcs dans les abattoirs allemands qui emploient des employés d'Europe de l'Est payés 30 % de moins que les ouvriers français.
Ce phénomène ne peut que nourrir le sentiment anti-européen chez nos compatriotes.
La résolution que nous avons présentée avec mes collègues Gilles Savary et Michel Piron préconise d'agir rapidement au niveau européen pour encadrer le détachement des travailleurs ou, à défaut, de prendre toutes les mesures nécessaires au niveau national.
Ce sujet divise, à Bruxelles, les tenants d'un marché du travail dérégulé, et ceux qui proposent qu'il soit encadré.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, où en sont les négociations et quelle est la position de la France ? Envisagez-vous de prendre des mesures au niveau national pour combattre ces abus ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste et sur quelques bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
M. Thierry Repentin, ministre délégué chargé des affaires européennes. Madame la députée, c'est une belle question que vous avez posée. (Sourires sur les bancs du groupe UMP.) Et je salue aussi la qualité du rapport que vous avez rendu avec M. Savary sur cette question,...
M. Philippe Vigier. Et Piron, alors ?
M. Thierry Repentin, ministre délégué. ...comme le soutien apporté il y a deux jours par le Parlement européen, qui va aider la France à porter les propositions que vous faites dans votre rapport. Cette question a d'ailleurs été la principale question portée par les partenaires sociaux, tant les représentants des salariés que ceux des employeurs, à l'occasion de la table ronde de la grande conférence sociale de la semaine dernière. Oui, il faut lutter contre le dumping social, et la France est sur votre analyse. Elle soutiendra, effectivement, vos propositions.
D'ailleurs, le Président de la République lui-même, à l'ouverture de la grande conférence sociale, a abordé cette question et il portera ce sujet demain 27 juin et vendredi 28 juin au sein du Conseil Européen car, hélas, tout le monde ne partage pas notre enthousiasme dans tous les pays européens. Certains pays souhaitent moins de contrôles que nous n'en souhaitons nous-mêmes pour l'avenir. Sans attendre, nous avons demandé à chacun des préfets de département de mettre en place un plan d'action visant des opérations complexes sur le terrain dans lequel, en quelque sorte, le dumping social s'infiltre. Nous avons aussi demandé à la future présidence lituanienne, qui sera à la tête de l'Europe pendant six mois, de faire de cette question la priorité.
Parallèlement à la directive que vous visez, nous souhaitons aussi poser la question du salaire minimum en Europe, dans tous les pays de l'Union européenne (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), parce que la lutte contre dumping social passe aussi par le fait de tirer vers le haut les normes sociales et les salaires dans l'Union européenne.
Sachant que le sujet vous intéresse, je souhaite vous dire que nous avons aussi beaucoup avancé sur une autre directive, sur les marchés publics. La France a fait adopter des dispositions qui permettront à toutes les collectivités locales et à l'État d'éliminer, sur les marchés publics, des offres anormalement peu chères qui émanent d'entreprises ne respectant pas des normes sociales.
Voilà des réponses concrètes. Nous partageons vos préoccupations. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Auteur : Mme Chantal Guittet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 juin 2013