politique économique
Question de :
M. Jean-Jacques Candelier
Nord (16e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Jean-Jacques Candelier interroge M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, sur la portée juridique et économique exacte du pacte de croissance issu du sommet européen du 29 juin 2012. Mis en avant pour justifier la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), il ne représenterait en fait, une fois ôtés les fonds européens réaffectés ou non-dépensés, que 10 milliards nouveaux sur les 120 milliards d'euros d'investissements et s'inscrit dans une conception européenne libérale qui impose des « réformes structurelles » (allongement de l'âge de départ à la retraite, privatisation des services publics, démantèlement du code du travail, poursuite de la libéralisation des secteurs économiques...). La France obtiendrait sur ce pacte 4 milliards ou 5 milliards, une somme très faible à comparer avec la coupe drastique et inédite dans les dépenses de l'État de 10 milliards pour 2013 imposée par la réduction européenne à marche forcée des déficits publics. En outre, le renforcement du capital de la Banque européenne d'investissement n'est pas une idée novatrice car, d'après son président, seule compte la rentabilité financière et économique des projets et que les partenariats public-privé sont privilégiés. Enfin, ce pacte est non contraignant car il fait l'objet d'une annexe aux conclusions du sommet du 29 juin 2012 et ne prendrait effet que si la Commission proposait effectivement une législation en vue de sa mise en œuvre. Il lui demande donc la portée exacte, pour la France, de ce pacte de « croissance ».
Réponse publiée le 5 mars 2013
Le Conseil européen des 28 juin dernier a permis d'engager la réorientation de la politique européenne en faveur de la croissance, la stabilité financière et l'intégration dans la solidarité. L'adoption du Pacte européen pour la croissance et l'emploi, mobilisant 120 milliards d'euros de financements européens, a été l'un des résultats les plus manifestes de cette réorientation. Ce pacte a fait l'objet d'une décision des chefs d'Etat et de gouvernement, ce qui souligne non seulement sa solennité mais aussi la portée des mesures qu'il comporte. De fait, ces mesures sont actuellement mises en oeuvre par les institutions européennes et les Etats membres. La reprogrammation des fonds structurels (55 milliards d'euros au niveau européen) permettra d'accroître les ressources mises effectivement au service des territoires. Elle favorisera en outre une utilisation plus ciblée de la dépense en faveur de la croissance et de l'emploi, rendant ainsi les fonds européens plus efficaces. En France, un travail d'identification a été mené, qui a associé étroitement la DATAR, le Commissariat général à l'investissement et les grandes collectivités territoriales, au premier rang desquelles figurent les Régions. Au terme des premières expertises, il semble qu'une enveloppe d'environ 2.5 milliards d'euros puisse être rapidement mobilisée. Cette enveloppe s'inscrit dans le contexte d'un bon taux de programmation des fonds en France, variant, au 1er octobre, de 72,2 % à plus de 100 %, selon les programmes. L'augmentation de capital de la BEI à hauteur de 10 milliards d'euros permettra de mobiliser 60 milliards d'euros de prêts supplémentaires. Elle sera formellement adoptée d'ici la fin de l'année, c'est-à-dire dans les délais. Les premiers prêts supplémentaires pourront être consentis dès le début de l'année 2013. Afin de hâter la mise en oeuvre de l'augmentation du capital, le principe d'un versement en une fois a été agréé. En outre, la BEI a commencé l'examen des projets éligibles. Le montant des prêts supplémentaires pour la France dépendra de la qualité et de la pertinence des projets déposés par les opérateurs français. Si l'on se base sur les taux de retour historiques, ils pourraient être de l'ordre de 5 milliards d'euros, en 2013 et 2014. Des contacts ont été établis avec la BEI afin d'examiner avec elle les projets français susceptibles de bénéficier de ces financements. La phase pilote des « project bonds », qui permettra de financer jusqu'à 4,6 milliards d'euros de projets, est, quant à elle, engagée, la législation nécessaire ayant été agréée par le Parlement européen et le Conseil en juillet, et le règlement publié le 31 juillet au Journal Officiel de l'Union Européenne. Ces obligations de projets permettront de financer le renforcement des infrastructures de réseaux, notamment dans le haut débit, le secteur de l'énergie et des transports. Des projets français ont d'ores et déjà été soumis à la BEI qui procède à leur instruction. Les « project bonds », dont l'effet de levier est intéressant pour les financements d'infrasctures, sont actuellement dans une phase pilote. Il est essentiel d'amorcer un dispositif qui sera conduit, dans les années qui viennent, à se développer. Les retombées du « pacte » seront d'autant plus importantes que les fonds mobilisés interviennent dans le cadre de cofinancements, s'ajoutant à des contributions des autorités publiques nationales et locales et d'opérateurs privés. Aussi le montant des investissements auxquels le pacte contribue est-il, par cet effet de levier, largement supérieur à celui des financements européens engagés. Ce pacte a ainsi permis d'engager une réorientation de la construction européenne qui vise à un rééquilibrage des politiques de celle-ci en faveur d'une action déterminée pour la croissance, notamment par le soutien aux investissements. Il ne constitue cependant qu'une première étape, et a vocation à être prolongé au cours des prochaines négociations européennes. En particulier, le prochain cadre financier pluriannuel, dont le montant global approchera 1000 milliards d'euros, devra en être l'une des traductions concrètes. La France y veillera, lors de la négociation qui doit se poursuivre au début de l'année prochaine.
Auteur : M. Jean-Jacques Candelier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politiques communautaires
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Dates :
Question publiée le 20 novembre 2012
Réponse publiée le 5 mars 2013