14ème législature

Question N° 1248
de M. Bruno Le Roux (Socialiste, républicain et citoyen - Seine-Saint-Denis )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > transports routiers

Tête d'analyse > transport de marchandises

Analyse > ecotaxe. mise en place. modalités.

Question publiée au JO le : 30/10/2013
Réponse publiée au JO le : 30/10/2013 page : 10701

Texte de la question

Texte de la réponse

ÉCOTAXE


M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Claude Goasguen. Voici l'ambulance !

M. Bruno Le Roux. Monsieur le Premier ministre, ce matin, vous avez pris la responsabilité de suspendre la taxe poids lourds créée par la droite en décembre 2008 pour poursuivre le dialogue de façon apaisée.

Plusieurs députés du groupe UMP . Allô ! Allô !

M. Bruno Le Roux. Arrêtez ça ! Il va y en avoir pour tout le monde, et surtout pour vous, qui avez pris la décision de créer cette taxe et de la concéder à des opérateurs privés de façon absolument scandaleuse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christian Jacob. C'est au Gouvernement que vous devez vous adresser !

M. Bruno Le Roux. Certains aujourd'hui, par commodité ou par cynisme, cherchent à faire oublier leurs responsabilités. (« Pin-pon ! » sur divers bancs du groupe UMP.)

M. le président. Chers collègues, allons !

M. Bruno Le Roux. Ce sont ceux qui, au mépris de nos traditions républicaines, refusent de s'associer à une réunion pour trouver des solutions, alors qu'ils ont eux-mêmes créé les problèmes. Ce sont ceux qui attisent les tensions de manière absolument irresponsable.

Pourtant, c'est la droite, monsieur le Premier ministre, qui a lancé ce désastreux appel d'offres de 2011 qui délègue la collecte de cette taxe poids lourds à des opérateurs privés pour un montant annuel de plus de 200 millions d'euros ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Cette scandaleuse délégation, signée par MM. Fillon et Baroin et Mmes Kosciusko-Morizet et Pécresse a un prix : 800 millions d'euros si nous devions demain revenir sur la taxe poids lourds ! C'est la conséquence de vos décisions, pourquoi oubliez-vous de le dire ?

La droite a dans le même temps adopté un décret, publié le 6 mai 2012 – le jour du second tour de l'élection présidentielle ! (Huées sur les bancs du groupe SRC) – instaurant un système inapplicable, qui a été condamné par tous les transporteurs et par tous les chargeurs le lendemain même de l'élection présidentielle.

Monsieur le Premier ministre, vous avez pris une décision qui est de nature à apaiser. Vous le faites en soulignant les responsabilités. Celles de l'ancienne majorité, celles de l'UMP sont énormes ! Pour faire un cadeau à un groupe, par le biais d'un partenariat public-privé absolument scandaleux, en procédant en dépit du bon sens, en ponctionnant l'impôt, ce qui ne s'est pas passé depuis la Révolution française à ce niveau-là, elle a rompu avec ce qui constitue la tradition de notre pays. Aussi, nous vous demandons, monsieur le Premier ministre, de rassurer les Français ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

M. Christian Jacob. Occupez-vous plutôt de votre groupe !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le député, vous avez raison : Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, M. François Baroin et Mme Valérie Pécresse ont signé un accord avec une société qui s'appelle Écomouv', société privée à laquelle a été confiée la gestion de l'écotaxe. Je rappelle que la durée du contrat est de treize ans et trois mois…

M. Philippe Cochet. Et alors ?

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre . …et qu'il prévoit une rémunération annuelle de 250 millions, pris sur les recettes de l'écotaxe, qui n'iront donc pas à l'Agence de financement des infrastructures de transports de France ni aux territoires. Oui, 250 millions par an pour cette société ! Cet accord a été signé le 6 mai 2012 par les responsables du précédent gouvernement : que chacun se rappelle ses responsabilités ! (Huées sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe UMP . Assumez vos décisions !

M. Claude Goasguen. Allez, partez ! Démission !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Mais je ne m'en tiens pas à cela. Je connais les difficultés de certaines régions, en particulier les plus éloignées, celles que l'on appelle les régions périphériques. Certaines sont en souffrance, je pense à la région Bretagne et notamment au Nord- Finistère.

La crise de l'agroalimentaire ne date pas d'aujourd'hui. Frappant notamment le groupe Doux, puis le groupe Gad, il s'agit de la crise profonde d'un modèle agroalimentaire qui n'a pas eu les moyens de se réorganiser suffisamment. Elle se traduit aujourd'hui par des fermetures d'abattoirs, avec des centaines de licenciements, des souffrances, des découragements et des colères que je comprends, parce que c'est le résultat d'une politique et d'un abandon !

Moi, je ne veux abandonner ni les salariés, ni les producteurs agricoles, ni ce fleuron de l'agriculture qu'est la Bretagne. C'est pourquoi j'ai annoncé le 12 septembre à Rennes, à l'occasion du Salon international de l'élevage, un plan d'urgence pour l'agriculture et l'agroalimentaire de la Bretagne, nécessitant la mobilisation de tous les acteurs. Les ministres Stéphane Le Foll et Guillaume Garot se sont rendus sur place pour mener le dialogue. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, cela ne sert à rien de crier comme cela !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Depuis le 16 octobre, avec tous les ministres concernés, j'ai annoncé un pacte pour l'avenir de la Bretagne. Mais force est de constater que le dialogue nécessaire est aujourd'hui au point mort, parce que demeure cet obstacle symbolique que constitue l'écotaxe. De ce fait, ceux qui devaient venir dialoguer, négocier, se mobiliser, ne sont plus au rendez-vous !

Ma responsabilité n'est pas de m'obstiner, ni de dire que nous allons passer en force. Le courage, ce n'est pas cela. Le courage, c'est écouter, dialoguer, recréer les conditions de la confiance. C'est ce que j'ai fait ce matin en prenant la décision de suspendre l'écotaxe, non pas pour l'abandonner, mais pour préparer à l'échelle nationale et mettre en œuvre à l'échelle régionale de la Bretagne le plan agroalimentaire, le pacte d'avenir pour la Bretagne. C'est cela, ma méthode !

J'appelle toutes les forces vives, toutes les bonnes volontés à se mobiliser, qu'elles soient de droite, de gauche ou du centre, qu'elles soient économiques, sociales ou territoriales : c'est cela, ma responsabilité, et je n'en changerai pas, parce que tel est mon devoir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)