14ème législature

Question N° 1290
de Mme Annie Le Houerou (Socialiste, républicain et citoyen - Côtes-d'Armor )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie, industrie et numérique
Ministère attributaire > Économie, industrie et numérique

Rubrique > mines et carrières

Tête d'analyse > prospection

Analyse > Bretagne. conséquences.

Question publiée au JO le : 09/02/2016
Réponse publiée au JO le : 17/02/2016 page : 1267

Texte de la question

Mme Annie Le Houerou interroge M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur les conséquences de l'arrêté d'exploration minière confiant à la société Variscan mines l'autorisation d'explorer plusieurs zones en Bretagne. L'arrêté confie l'exploration à la société Variscan qui, à ce jour, n'offre pas les garanties nécessaires pour envisager sereinement l'exploitation d'une mine du 21ème siècle. L'assurance avait été donnée que ce dossier serait abordé en toute concertation avec un nouveau cadre plus responsable, plus durable et plus conforme aux choix de développement des territoires. Or les procédures de mise en œuvre de cet arrêté ne garantissent ni les choix de développement faits par les élus locaux ni la protection du patrimoine naturel et des ressources en eau. Dans ce cadre, une étude d'impact portant précisément sur la gestion des ressources et la qualité des eaux serait souhaitable afin d'évaluer les effets potentiels du projet minier mais également pour rassurer une population inquiète. En effet, la confiance entre la société Variscan Mines, les pouvoirs publics, les élus, les représentants associatifs et les citoyens est à l'heure actuelle rompue. Elle souhaiterait donc connaître les outils qui seront mis en place pour s'assurer de l'acceptabilité du projet par les territoires concernés. Au regard du caractère obsolète du code minier, elle souhaiterait également savoir quel cadre plus adapté et plus sécurisant pourrait être appliqué.

Texte de la réponse

AUTORISATION D'EXPLORATION MINIÈRE ACCORDÉE À LA SOCIÉTÉ VARISCAN MINES


M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour exposer sa question, n°  1290, relative à l'autorisation d'exploration minière accordée à la société Variscan Mines.

Mme Annie Le Houerou. Ma question s'adresse à M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Le 14 septembre 2015, un arrêté d'exploration minière a été pris en faveur de la société Variscan Mines, concernant plusieurs zones en Bretagne dont 33 600 hectares sur vingt-cinq communes de la circonscription de Guingamp. Le 24 novembre 2015, avec plusieurs élus de ma circonscription, nous avons été reçus par votre cabinet au sujet du permis exclusif de recherche de mines – PERM – dit "de Loc-Envel".

L'exploration comme l'exploitation minière de ce site ne peuvent se faire sans tenir compte des exigences de qualification des espaces et des choix de développement faits par les élus, notamment dans le cadre des schémas de cohérence territoriale. Le développement économique de notre territoire repose sur un développement touristique et agricole, pour lequel nous espérons un nouveau souffle. Si d'autres choix de développement sont à faire, notamment industriels autour de l'exploitation du minerai, ils ne peuvent être imposés de Paris, sans concertation avec la population et ses représentants élus.

Or, votre arrêté a été pris contre les avis négatifs unanimes des élus, de la population, des associations et des organismes locaux impliqués dans la protection de notre patrimoine naturel et des ressources en eau. Depuis plusieurs mois, ils interrogent Variscan Mines qui reste très évasive dans ses réponses. Le périmètre concerne une zone classée Natura 2000 et des zones humides. Les exigences environnementales s'imposent aux acteurs économiques, particulièrement aux agriculteurs qui ont fait de gros efforts d'adaptation.

Lors des entretiens au ministère, votre cabinet nous a assuré qu'aucune autorisation de travaux ne serait prise avant que les élus et les représentants associatifs n'aient été suffisamment informés et consultés. Vous nous aviez dit que sans acceptation locale, il n'y aurait pas de travaux d'exploration. Le préfet des Côtes-d’Armor a mis en place une commission de suivi, lieu d'expression des réserves mais aussi de concertation. Je vous ai alerté sur l'insuffisance des études d'impact concernant les ressources en eau, alors que cette zone est le château d'eau du Centre Bretagne. Vous nous avez assurés que ce dossier serait abordé dans un nouveau cadre plus responsable, plus durable et plus conforme aux choix de développement des territoires.

Pourtant, lors du premier comité de suivi réuni le 26 janvier 2016, sous la présidence du sous-préfet de Guingamp, votre arrêté, délivré pour cinq ans et renouvelable deux fois, a été rappelé et il a été déclaré qu'il s'agissait de le faire respecter et de le mettre en œuvre. Le caractère consultatif du comité de suivi a également été rappelé, pour lequel une liste de participants a été arrêtée par le préfet qui ne souhaite pas son élargissement.

L'objectif est d'apporter un éclairage technique, juridique et environnemental sur le projet de Variscan Mines, dont la seule obligation est une information du calendrier des travaux engagés pour l'année à venir. Les procédures de mise en œuvre de l'arrêté d'exploration ne sont pas conformes aux exigences que vous vous êtes fixées d'une mine du XXIe siècle et elles ne rassurent pas plus les élus locaux.

Lors d'une réunion avec les élus, – la seule jusqu'à présent – il nous avait été indiqué que l'autorisation d'explorer ne valait pas autorisation de travaux et que chaque demande de travaux donnait lieu à une autorisation signée par le préfet et soumise préalablement à une étude d'impact. Or cela est faux, puisque la seule obligation de la société est une information et que de nombreux prélèvements et forages pourront être faits sans études préalables.

Alors que vous admettez que le code minier est obsolète, que l'utilité publique du projet n'est pas démontrée et que vous nous avez dit que, sans acceptation de la population, il n'y aurait pas d'exploration, quels cadres juridiques s'imposent à la société Variscan Mines et quels outils mettrez-vous en place pour vous assurer de l'acceptabilité du projet par les territoires concernés ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Madame Le Houerou, la société Variscan Mines a obtenu six permis exclusifs de recherche depuis 2013, dont trois en Bretagne. Le permis exclusif de recherche attribue à son détenteur un droit exclusif d'exploration à l'intérieur du périmètre de son permis. Un PER est attribué pour cinq ans au plus et peut être prolongé à deux reprises, sans dépasser cinq ans, à chaque fois. Son dossier de demande décrit les grandes lignes du programme d'exploration et son contexte environnemental.

Le détenteur d'un permis exclusif de recherche ne peut toutefois pas entreprendre directement les travaux, comme vous l'avez rappelé. La possibilité de procéder à la réalisation des travaux requiert soit le dépôt d'une déclaration d'ouverture des travaux miniers auprès du préfet, qu'il peut subordonner au respect de prescriptions techniques particulières, soit le bénéfice d'une autorisation d'ouverture des travaux miniers qui se matérialise par un arrêté préfectoral détaillant un ensemble de prescriptions techniques à respecter, suivant la gravité des dangers ou des inconvénients qu'ils peuvent présenter.

Les procédures relatives aux travaux miniers font l'objet d'informations et de consultations, adaptées en fonction du régime dont ils relèvent. La déclaration est adressée pour information aux maires des communes, qui en informent le public. La demande d'autorisation d'ouverture des travaux miniers est précédée d'une étude d'impact et soumise pour avis aux maires des communes et aux services administratifs. Elle requiert l'avis de l'autorité environnementale sur l'étude d'impact et est soumise à une enquête publique.

Ces procédures, qui relèvent du préfet, comportent toutes les étapes qui permettent de s'assurer de la protection de l'environnement et des autres activités économiques, de l'information des élus et de la population, selon des dispositions semblables à celles qui régissent les installations classées pour l'environnement. Les travaux peuvent donc être réglementés ; au besoin, ils seront interdits si l'opérateur ne fait pas la preuve qu'ils ne vont pas porter atteinte à l'environnement.

Considérant la sensibilité des territoires, le ministre chargé des mines, par anticipation de la réforme du code minier, a demandé aux préfets de créer des comités de suivi associant toutes les parties prenantes. Ceux-ci ont été effectivement mis en place et se sont réunis très récemment en Bretagne pour examiner les programmes de travaux de l'année à venir avant même que les dossiers de travaux ne soient déposés auprès de l'autorité préfectorale.

Le 1er avril 2015, Emmanuel Macron a déclaré que l'exploitation minière n'avait de sens que lorsqu'elle s'inscrit dans un projet de développement durable des territoires. Il a donc engagé une concertation afin de concrétiser le concept de « mine responsable ». Elle se conclura au printemps 2016 par la production d'un livre blanc, réalisé sous la conduite d'un comité de pilotage associant l'ensemble des parties. Il est destiné aux parties prenantes des projets et des exploitations minières.