CRISE DES DÉCHETS EN CORSE
M. le président. La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit, pour exposer sa question, n° 1296, relative à la crise des déchets en Corse.
M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Madame la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, depuis plusieurs mois, l'Île de beauté se transforme en une véritable poubelle. Les décharges sont saturées, les poubelles pleines à craquer, les détritus sur les plages, au bord des routes et en pleine nature ; la Corse croule sous les déchets qu'elle ne parvient plus à traiter. Le retard de la collecte et leur stockage provisoire créent un trouble à l'ordre public et un risque sanitaire majeur pour nos concitoyens. Madame la secrétaire d'État, il y a urgence : urgence pour l'environnement, vous devez y être particulièrement sensible, et avant tout urgence pour l'hygiène et la santé publique.
Cette crise majeure est loin d'être réglée, comme le montre le rapport de la mission du conseil général de l'environnement et du développement durable qui a été remis à votre ministère en octobre 2015. En effet, les capacités de traitement de la Corse sont inférieures à sa production de déchets : elle produit actuellement 235 000 tonnes de déchets ménagers et assimilés par an pour une population d'environ 392 000 personnes – 54 % de ces déchets sont produits dans les bassins d'Ajaccio et de Bastia –, alors que la capacité d'enfouissement actuelle sur les trois sites en exploitation, ceux de Vico, Viggianello et Prunelli-di-Fiumorbo, a un potentiel annuel autorisé de 118 000 tonnes. L'enfouissement n'est plus la solution adaptée depuis de nombreuses années.
Au-delà de la réelle volonté politique menée sur le tri sélectif et le traitement mécanique, la Corse a besoin, sans attendre, d'une solution impérative et durable. Des solutions existent comme le traitement thermique ou l'incinération. Elles ont fait leur preuve dans beaucoup de régions de France. Dès lors, pourquoi ne pas mettre en place en Corse une économie circulaire en valorisant la partie de ses mâchefers récupérée qui serviraient de tout-venant, évitant ainsi de créer des carrières à ciel ouvert ?
Madame la secrétaire d'État, la Corse voudrait connaître les solutions urgentes et durables que le ministère de l'environnement souhaite aider à mettre en place, et surtout, vu l'urgence sanitaire, environnemental et économique, dans quels délais ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité.
Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Monsieur le député, vous avez interrogé Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat et qui, pour la raison que j'ai déjà indiquée, m'a chargé de vous répondre.
Elle partage votre constat : la Corse rencontre actuellement des problèmes majeurs de gestion de ses déchets ménagers. La saturation des décharges de l'île risque ainsi d'aboutir, si des solutions courageuses ne sont pas prises dès maintenant, comme vous l'avez dit, à la prolifération de dépôts sauvages de déchets. Cette crise environnementale aurait par ailleurs des conséquences fortes d'un point de vue touristique et économique, et peut-être également pour la santé publique. Je rappelle que Mme Ségolène Royal a voulu que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte contienne un volet sur l'économie circulaire et a lancé différentes actions pour réduire la production de déchets et favoriser leur recyclage.
Quatre territoires en Corse sont engagés dans la démarche « zéro gaspillage zéro déchet », et la première réponse à la situation que vous avez décrite passe bien par le renforcement de telles actions. La ministre de l'environnement souhaite en particulier que les acteurs compétents proposent des actions concrètes et fortes à destination des particuliers, telles que la distribution de composteurs, pour avancer rapidement sur cette voie. Certaines collectivités en charge de la collecte et du tri ont déjà lancé des réformes importantes en vue de réduire de 50 % la quantité de déchets à stocker en décharge d'ici trois ans. Comme vous, elle pense qu'une solution est à trouver pour le traitement en Corse des déchets résiduels qui y sont produits. Ce sujet relève de la compétence des communes et de leurs groupements qui ont à choisir le mode de traitement le plus adapté au contexte territorial. Le rapport du CGEDD que vous mentionnez constitue une contribution utile. De plus, la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement a travaillé à proposer différents scénarios qui seront mis à disposition des élus des collectivités locales afin de gérer la période estivale qui s'annonce d'ores et déjà extrêmement tendue si rien n'est engagé dès maintenant. À cet effet, la ministre a demandé aux préfets de l'île de rendre publics ces scénarios afin de poursuivre le dialogue entamé avec l'ensemble des parties prenantes.
Soyez assuré de la mobilisation de Mme Ségolène Royal et de l'État. Elle vient d'ailleurs de rencontrer le préfet de Corse pour faire le point sur la situation afin de contribuer à faire émerger le plus rapidement possible une solution partagée.
M. le président. La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit.
M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Je vous remercie de cette réponse, madame la secrétaire d'État, mais vous savez que les problèmes d'enfouissement, que ce soit en aérobie ou en anaérobie, ne peuvent pas durer indéfiniment parce que les mercaptans se dégagent au bout de cinq ans et si on ne les récupère pas, cela aboutira à une pollution atmosphérique énorme. Il apparaît que cela ne relève pas de la compétence des communes ni même des intercommunalités. Il faut travailler, c'est vrai, sur le tri sélectif, pour arriver à un taux de 40 %. Pour le reste, il va falloir à mon avis débattre d'une solution de plus grande ampleur.