Question de : M. Laurent Furst
Bas-Rhin (6e circonscription) - Les Républicains

M. Laurent Furst attire l'attention de Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme sur l'impact de la décision du Conseil constitutionnel du 30 novembre 2012 sur l'artisanat en Alsace-Moselle. En effet, cette décision marque la volonté de rayer du droit français les dispositions de droit local de la loi de 1924 qui avaient maintenu les corporations obligatoires pour les artisans. Les corporations jouent un rôle essentiel dans la dynamique et la prospérité régionale ainsi que dans la structuration nécessaire de l'artisanat. Elles contribuent au professionnalisme et au dynamisme des PME en Alsace-Moselle. Elles concourent depuis toujours à la formation professionnelle et à une meilleure qualification des artisans. Elles jouent un rôle d'interface entre la chambre des métiers et les artisans. Suite à la décision du Conseil constitutionnel, elles devraient disparaître. Ce serait une mesure de plus contre une spécificité économique régionale qui a fait ses preuves. Aussi, il insiste pour qu'elle prenne à bras-le-corps ce dossier afin d'éviter la disparition de cette composante du droit local.

Réponse publiée le 9 avril 2013

Le Conseil constitutionnel s'est récemment prononcé sur la valeur constitutionnelle du principe de l'existence du droit local alsacien-mosellan. Son maintien a été promu au rang de principe fondamental reconnu par les lois de la République (décision n° 2011-157 question prioritaire de constitutionnalité du 5 août 2011, Société SOMODIA). Cependant cette valeur constitutionnelle ne s'appliquant pas à chaque disposition particulière du droit local, celles-ci peuvent faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité. Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 19 septembre 2012, par le Conseil d'État, d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit, de l'article 100 f et du troisième alinéa de l'article 100 s du code local des professions applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en vertu desquels sont affiliées d'office à une corporation obligatoire et soumises à une « cotisation corporative » les personnes qui exploitent l'une des activités pour lesquelles cette corporation a été créée. Dans sa décision n° 2012-285 QPC du 30 novembre 2012 qui a pris effet à compter de sa publication au Journal officiel du 1er décembre 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions contraires à la Constitution en considérant qu'elles portaient atteinte à la liberté d'entreprendre. Cette déclaration d'inconstitutionnalité a été rendue applicable immédiatement et à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de la décision. La liberté d'entreprendre, fondée sur l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, comprend non seulement la liberté d'accéder à une profession ou une activité économique, mais également la liberté dans l'exercice de cette profession ou de cette activité. Dans le commentaire de sa décision du 30 novembre 2012, le Conseil constitutionnel indique que « l'existence d'un régime de corporations obligatoires constitue une atteinte injustifiée à la liberté d'entreprendre » et que l'adhésion d'office à une corporation entraîne nécessairement une restriction des modalités d'exercice de la profession, laquelle consiste, outre l'obligation de s'acquitter de cotisations, dans l'obligation d'adhérer à un cadre corporatiste et dans le droit de regard que la corporation peut exercer sur la pratique professionnelle. Au surplus, le Conseil constitutionnel a considéré que l'absence de version officielle en langue française d'une disposition législative porte atteinte à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité de la loi. Cette décision ne remet pas en cause l'existence même des corporations mais uniquement leur caractère obligatoire. Le Gouvernement n'a pas l'intention de supprimer les corporations d'Alsace-Moselle ni de mettre fin à un outil qui a fait ses preuves en matière d'accompagnement des entreprises. Il résulte désormais de la décision du Conseil constitutionnel que chaque artisan d'Alsace-Moselle pourra bénéficier de cet accompagnement sur une base volontariste, en maintenant son adhésion à sa corporation de rattachement de son propre gré. Il appartiendra aux corporations de maintenir la qualité de leurs services pour justifier le maintien des adhésions volontaires. A la lumière de la décision du Conseil constitutionnel et de son commentaire, le Gouvernement va procéder à la traduction officielle des dispositions du code professionnel local en vigueur en Alsace-Moselle et aux ajustements juridiques éventuellement nécessaires au maintien du droit local.

Données clés

Auteur : M. Laurent Furst

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : Artisanat, commerce et tourisme

Ministère répondant : Artisanat, commerce et tourisme

Dates :
Question publiée le 11 décembre 2012
Réponse publiée le 9 avril 2013

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