14ème législature

Question N° 1309
de M. Jacques Krabal (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Aisne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie, industrie et numérique
Ministère attributaire > Environnement, énergie et mer

Rubrique > automobiles et cycles

Tête d'analyse > pièces et équipements

Analyse > vente. occasion. réglementation.

Question publiée au JO le : 09/02/2016
Réponse publiée au JO le : 19/02/2016 page : 1429
Date de changement d'attribution: 09/02/2016

Texte de la question

M. Jacques Krabal interroge M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur le marché de la pièce de réemploi, qui représente un chiffre d'affaires de 300 millions d'euros par an, soit 2 % du marché de la pièce de rechange. La pièce de réemploi trouve de plus en plus sa place dans la réparation et la maintenance automobile. C'est une alternative complémentaire à la pièce neuve, car elle permet de sauver un véhicule qui, sans elle, aurait été déclaré économiquement irréparable. Elle permet également de valoriser le savoir-faire des différents professionnels de l'automobile et inscrit les uns et les autres dans une dynamique d'économie circulaire. Pour des raisons évidentes, la pièce de réemploi peut avoir un fort impact sur le pouvoir d'achat des automobilistes, car elle permet de faire baisser la facture de réparation. Elle contribue à atteindre les taux de recyclage et de valorisation requis et se définit véritablement comme une pièce de l'économie circulaire. L'article 77 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, modifiant un article précédent du code de la consommation, dispose : « Tout professionnel qui commercialise des prestations d'entretien ou de réparation de véhicules automobiles permet aux consommateurs d'opter pour l'utilisation, pour certaines catégories de pièces de rechange, de pièces issues de l'économie circulaire à la place de pièces neuves ». Les professionnels s'interrogent donc sur le statut de déchet qu'aurait la pièce de réemploi. Ce statut est la cause de nombreux freins au développement de l'activité des centres agréés, notamment en matière d'exportation. Il souhaiterait donc savoir quelle est la position du ministère quant à la sortie des pièces de réemploi de ce statut de déchet puisque un avis publié au Journal officiel le 13 janvier 2016 confirme que tout déchet qui est traité dans une installation de traitement de déchets conserve un statut juridique de déchet après traitement. Le MEDDE prévoit, dans un arrêté destiné à retirer ce statut aux pièces détachées, qui fait actuellement l'objet de consultations, de rendre la démarche volontaire et de ce fait, optionnelle pour les centres VHU agréés. Or rendre cette démarche de sortie de statut de déchets optionnelle revient à distinguer 2 catégories de centres VHU agréés, seuls producteurs de la pièce de réemploi automobile : ceux qui auront le droit de vendre des pièces aux réparateurs ou consommateurs et ceux qui n'auront le droit de vendre leur stock de pièces qu'à des centres VHU agréés qui auront fait la démarche de sortie de statut de déchet explicite, car est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende le fait de remettre ou faire remettre des déchets à tout autre que l'exploitant d'une installation agréée(article L. 541-46 6° du code de l'environnement).

Texte de la réponse

STATUT DES PIÈCES DE RÉEMPLOI AUTOMOBILE


M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal, pour exposer sa question, n°  1309, relative au statut des pièces de réemploi automobile.

M. Jacques Krabal. Madame la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, ma question concerne le marché de la pièce de réemploi, qui représente un chiffre d'affaires de 300 millions d'euros par an, soit 2 % du marché de la pièce de rechange.

La pièce de réemploi trouve de plus en plus sa place dans la réparation et la maintenance automobile. C'est une alternative complémentaire à la pièce neuve. Elle permet de sauver un véhicule qui, sans elle, serait déclaré économiquement irréparable. Elle valorise également le savoir-faire des différents professionnels de l'automobile.

La pièce de réemploi peut avoir un fort impact sur le pouvoir d'achat des automobilistes, car elle permet de faire baisser la facture de réparation. Elle contribue à atteindre les taux de recyclage et de valorisation requis et se définit véritablement comme une pièce essentielle de l'économie circulaire, chère à François-Michel Lambert.

Vous connaissez l'article 77 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, modifiant un article précédent du code de la consommation. Les professionnels s'interrogent donc sur le statut de déchet qu'aurait la pièce de réemploi. Ce statut est la cause de nombreux freins au développement de l'activité des centres agréés, notamment en matière d'exportation. C'est ce que me disent un syndicat, le CNPA, et les entreprises du territoire comme Caréco ou Multirex, impactées de ce fait dans leur développement économique, ce qui pénalise la création d'emplois.

Un avis publié au Journal officiel le 13 janvier dernier confirme que tout déchet traité dans une installation de traitement de déchets conserve un statut juridique de déchet après traitement. Par ailleurs, le ministère de l'écologie prévoit, dans un arrêté destiné à retirer ce statut aux pièces détachées, qui fait actuellement l'objet de consultations, de rendre la démarche volontaire et, de ce fait, optionnelle pour les centres VHU agréés.

Pouvez-vous donc nous dire quelle est la position du ministère sur la perspective de sortie des pièces de réemploi de ce statut de déchet ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Monsieur le député, vous avez interrogé Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat. Réunissant actuellement la commission supérieure des sites, perspectives et paysages, elle m'a chargée de vous répondre.

Les véhicules hors d'usage sont des véhicules dont les propriétaires souhaitent se défaire. Ce sont donc des déchets au sens de l'article L. 541-1-1 du code de l'environnement, qui prévoit que le traitement de ce type de déchet ne peut être réalisé que dans une installation titulaire de l'agrément prévu à l'article R. 543-162.

Ces véhicules peuvent contenir des pièces en bon état, susceptibles d'être réutilisées comme pièces d'occasion, après avoir été démontées. Il s'agit d'une pratique ancienne, qui s'inscrit pleinement dans les objectifs de gestion des déchets fixés par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Cette pratique n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 541-22 du code de l'environnement auquel fait référence le 6° de l'article L. 541-46 que vous mentionnez, puisque ces deux articles concernent le traitement du véhicule hors d'usage dans son ensemble et la préparation en vue de la réutilisation des pièces qui en sont issues.

La vente de ces pièces de véhicules hors d'usage ne fait pas partie du traitement en lui-même. Des objectifs de taux de réutilisation sont d'ailleurs fixés dans les cahiers des charges des agréments de ces installations.

Afin de faciliter l'utilisation de ces pièces, le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, en liaison avec les différents professionnels concernés, élabore un arrêté ministériel fixant des critères permettant de les considérer comme des produits. La consultation par les services du ministère des organismes concernés est en cours. Elle s'appuie sur la démarche engagée par l'exploitant des centres de traitement de véhicules hors d'usage.

Enfin, la ministre de l'environnement soutient auprès de la Commission européenne, dans le cadre de la révision de la directive-cadre « Déchets », l'inscription de la reconnaissance du fait que les pièces de véhicules hors d'usage n'ont pas le statut de déchet dès lors qu'elles ont fait l'objet d'une préparation en vue d'une réutilisation.

M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour votre réponse. Rendre optionnelle la démarche de sortie du statut de déchet revient à distinguer deux catégories parmi les centres VHU agréés, seuls producteurs de la pièce de réemploi automobile : ceux qui auront le droit de vendre des pièces aux réparateurs ou aux consommateurs et ceux qui n'auront le droit de vendre leur stock de pièces qu'à des centres VHU agréés qui auront fait la démarche de sortie explicite du statut de déchet.

La France est le seul État membre à avoir fait le choix de la sortie explicite du statut de déchet pour les pièces d'automobiles issues des centres VHU agréés, ce que les entreprises du recyclage regrettent, puisque cela leur impose une démarche administrative supplémentaire qui impacte, de fait, leur compétitivité déjà fortement menacée par la chute des cours des métaux. Il est dommage que la France n'ait pas suivi les préconisations du comité d'adaptation technique dédié qui s'est déroulé le 30 novembre dernier à Bruxelles.

Au lendemain de la COP21, il devient plus que nécessaire de définir un véritable statut pour les pièces issues de l'économie circulaire, en leur apportant un cadre juridique clair et sécurisé, contrairement aux produits non contrôlés, vendus notamment par les particuliers sur internet. C'est l'engagement que vous venez de prendre. Jean de la Fontaine concluait sa fable « Le Renard et le Bouc » par ce vers : « En toute chose il faut considérer la fin. ». Cela est d'autant plus vrai quand il y va des 15 000 emplois répartis dans les 1 700 centres VHU qui sont actuellement pénalisés de fait.