14ème législature

Question N° 1312
de Mme Martine Faure (Socialiste, républicain et citoyen - Gironde )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > élevage

Tête d'analyse > volailles

Analyse > grippe aviaire. conséquences économiques.

Question publiée au JO le : 09/02/2016
Réponse publiée au JO le : 19/02/2016 page : 1414

Texte de la question

Mme Martine Faure attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les conséquences et la gestion de la crise de la grippe aviaire. Elle souhaite que soient prises en compte les spécificités des petits producteurs qui ne disposent pas d'une trésorerie suffisante pour supporter financièrement un arrêt de 4 mois. Elle souhaite connaître les aides spécifiques et adaptées que le Gouvernement entend prendre pour ces derniers. De plus, elle insiste pour connaître précisément les nouvelles règles d'élevage afin de s'assurer que le modèle en multi-bandes ne soit proscrit car ce système de vide sanitaire systématique entraineraît la fragilisation voire la disparition des éleveurs.

Texte de la réponse

CONSÉQUENCES DE LA GRIPPE AVIAIRE SUR LES PETITS PRODUCTEURS


M. le président. La parole est à Mme Martine Faure, pour exposer sa question, n°  1312, relative aux conséquences de la grippe aviaire sur les petits producteurs.

Mme Martine Faure. Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, je souhaite revenir sur les conséquences et la gestion de la crise que provoque l'intervention contre l'influenza aviaire, et plus particulièrement sur le sort des petits producteurs de Gironde et du Lot-et-Garonne.

Toute la production de ces deux départements provient de petites exploitations qui, pour une grande partie, ne vivent que grâce à l'élevage des seuls canards. Ces petits éleveurs ne disposent d'aucune trésorerie pour supporter financièrement un arrêt d'activité de quatre mois. Pour passer le cap de cette crise et rebondir très vite, ils ont besoin d'aides spécifiques, adaptées à chaque exploitation.

Permettez-moi également de revenir sur l'arrêté du 8 février dernier rendant obligatoire la conduite en bande unique de toute unité de production. J'aimerais connaître précisément les nouvelles règles d'élevage et de biosécurité.

Pour la majorité des producteurs, c'est le modèle des multibandes qui est en vigueur aujourd'hui. Si le modèle des bandes uniques devenait la règle, sans possibilité de multiplier au sein d'une unité de production plusieurs bandes uniques, ceci entraînerait une grande fragilisation voire la disparition de nombreux aviculteurs.

En Gironde, un département qui compte trente-cinq producteurs, une coopérative, Palmagri, est alimentée par seize producteurs et emploie quatorze salariés. Cette coopérative ne pourra survivre sans ses producteurs. Aussi, face aux pertes à venir et aux investissements exigés pour répondre aux obligations sanitaires, quels sont les accompagnements et les aides financières dont pourront bénéficier les producteurs, les salariés et la coopérative ? Dans moins d'un mois, de nombreuses familles vont se retrouver sans ressource.

Les producteurs aimeraient également profiter du vide sanitaire pour réaliser des travaux et être opérationnels dès le 16 mai prochain.

Je terminerai ma question en évoquant des murmures qui se font entendre, à propos de la filière espagnole qui viendrait envahir le marché français avec des canards prêts à gaver dès la fin du vide sanitaire chez nous.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous rassurer sur tous ces points et confirmer que la qualité et le savoir-faire français seront toujours garantis et valorisés par nos décisions politiques ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la députée, vous êtes directement concernée par le sujet de l'influenza aviaire. J'ai déjà répondu à plusieurs questions qui relayaient des inquiétudes, s'agissant notamment des petites exploitations autarciques. Ce sujet a été abordé dans le cadre d'une discussion avec l'ensemble des représentants du secteur, à laquelle ont participé les coopératives les plus importantes, les coopératives de taille moyenne, les plus petites, ainsi que les petits producteurs. La Confédération paysanne, la Coordination rurale et le Mouvement de défense des exploitants familiaux – MODEF – étaient présents. Nous avons donc cherché à prendre en compte ces exploitations autarciques.

S'agissant du principe de la bande unique, il faut savoir que les vides sanitaires sont nécessaires pour éviter que, dans le cadre d'une exploitation continue, les animaux véhiculent un virus et finissent par le transmettre. C'est toujours la même question qui est posée : devons-nous mettre en œuvre des mesures permettant d'éradiquer le problème, c'est-à-dire l'influenza aviaire, ou prendre des risques pouvant avoir des conséquences économiques importantes ?

Il faut bien comprendre que le principe de la bande unique ne doit pas être appréhendé par exploitation, mais par unité de production ou par surface. Si l'on élève en continu des canards ou des palmipèdes d'âges différents – je parle bien d'une exploitation continue –, alors on prend un risque. Si l'on est capable de compartimenter, d'avoir des bandes différentes permettant une rotation, c'est-à-dire un élevage continu mais dans des endroits différents, alors on respecte les règles. Mais si les animaux se trouvent tout le temps au même endroit, alors nous prenons tous des risques.

Après avoir aidé les entreprises directement concernées, les accouveurs et les éleveurs, à hauteur de 130 millions d'euros, nous allons bien sûr venir en aide à l'ensemble des acteurs de la filière.

S'agissant des canards prêts à gaver, j'ai pris une décision lors de la réunion que nous avions organisée, tous ensemble, pour préparer la mise en œuvre de ce plan. On m'avait demandé le droit d'acheter des canards prêts à gaver provenant de zones indemnes : je l'ai refusé, et je me suis d'ailleurs assuré que tous ceux qui étaient autour de la table approuvaient ce refus. Nous risquions en effet de ne pas avoir de canards sains, d'étendre la contamination à des zones aujourd'hui indemnes mais qui ne le seront pas forcément demain, et de recourir à l'importation de canards en France. C'est pourquoi j'ai refusé la solution des canards prêts à gaver, préférant celle des canetons produits chez des accouveurs. Vous pourrez donc, madame la députée, réfuter de la manière la plus claire et la plus ferme qui soit la rumeur dont vous avez entendu parler, puisque c'est justement pour éviter le recours à des canards prêts à gaver que nous avons décidé que la remise en production se ferait avec des canetons.

M. le président. La parole est à Mme Martine Faure.

Mme Martine Faure. Merci, monsieur le ministre, pour cette réponse claire. Je veux tout de même insister sur la nécessité de prévoir un accompagnement personnel de chaque producteur. Je sais que les services de l'État sont vraiment à leurs côtés, mais il faut absolument qu'ils permettent à chacun d'entre eux, pendant ces quatre mois, de préparer son dossier, lequel doit être le moins complexe possible – vous savez que c'est souvent un vrai casse-tête pour les producteurs de remplir un dossier. Merci d'éviter ainsi tous les préjudices moraux, sociaux et économiques dont nos campagnes pourraient pâtir.