14ème législature

Question N° 1325
de Mme Isabelle Attard (Écologiste - Calvados )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > santé

Tête d'analyse > établissements de santé

Analyse > hôpital de Bayeux. perspectives.

Question publiée au JO le : 22/03/2016
Réponse publiée au JO le : 30/03/2016 page : 2461

Texte de la question

Mme Isabelle Attard interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la grève du personnel de l'hôpital de Bayeux depuis le 22 février 2016. Cette grève est un épisode aigu : elle révèle une angoisse constante qui, comme une maladie chronique, altère le bon fonctionnement de l'organisme. À Bayeux, depuis 2010, les plans de retour à l'équilibre financier (PREF) se succèdent, avec réductions d'effectifs et efforts en tous genres. Les suppressions de lits puis de services se profilent dans toutes les têtes. Inquiétudes confortées par la suppression d'activités à Aunay-sur-Odon, l'hôpital partenaire. Naissent alors des rumeurs délétères. Or l'agence régionale de santé communique peu, jamais clairement. Elle n'annonce aucun plan à moyen ou long terme, elle élabore des schémas régionaux d'organisation sanitaire sans concertation. Et personne ne répond de l'avenir de l'hôpital. L'incertitude et l'absence de concertation sont les raisons de la colère. Alors, le silence de l'ARS est-il normal ou simplement maladroit ? Cette grève questionne le système de santé et l'avenir des services publics hospitaliers de proximité, surtout en milieu rural. Le droit à la santé, les chances de survie à un infarctus doivent être les mêmes, boulevard de Port-Royal à Paris ou rue du Fort-Samson à Grandcamp-Maisy. Les futurs groupements hospitaliers de territoires doivent être au service des populations les plus fragiles. Fermer des lits de médecine à la campagne, faire travailler les équipes au seuil de sécurité en permanence, ce n'est pas offrir un service public de qualité et ce n'est pas bien traiter les personnels. La santé ne doit pas être soumise à des calculs financiers abstraits. Les professionnels et les élus locaux sont prêts à travailler à un plan de soins efficient. Il est attendu donc de l'ARS et du ministère, de l'humanité et du dialogue. Tous, même les habitants loin d'un C.H.U., méritent une politique de soins efficace et bienveillante. Elle ne peut imaginer que le ministère laisse périr en silence la population du Bessin et du Pré-bocage. Il lui demande comment elle compte lever le sentiment d'abandon des populations rurales et ce qu'elle compte faire pour que ce sentiment ne devienne pas une réalité.

Texte de la réponse

SITUATION DE L'HÔPITAL DE BAYEUX


Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour exposer sa question, n°  1325, relative à la situation de l'hôpital de Bayeux.

Mme Isabelle Attard. Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et concerne le personnel de l'hôpital de Bayeux, en grève depuis le 22 février. Cette grève est un épisode aigu : elle révèle une angoisse constante qui, comme une maladie chronique, altère le bon fonctionnement de l'organisme. À Bayeux, depuis 2010, les plans de retour à l'équilibre financier – les PREF –, se succèdent, avec réductions d'effectifs et efforts en tous genres. La perspective de suppressions de lits – puis de services – est dans toutes les têtes. Les inquiétudes sont renforcées par la suppression d'activités à Aunay-sur-Odon, l'hôpital partenaire. Naissent alors des rumeurs délétères. Or l'agence régionale de santé communique peu et jamais clairement. Elle n'annonce aucun plan à moyen ou long terme et élabore des schémas régionaux d'organisation sanitaire sans concertation ; personne ne répond de l'avenir de l'hôpital. L'incertitude et l'absence de concertation expliquent la colère du personnel. Alors, le silence de l'ARS est-il normal ou simplement maladroit ?

Cette grève questionne le système de santé et l'avenir des services publics hospitaliers de proximité, surtout en milieu rural. Le droit à la santé, les chances de survie à un infarctus doivent être les mêmes boulevard de Port-Royal à Paris ou rue du Fort-Samson à Grandcamp-Maisy. Les futurs groupements hospitaliers de territoires – GHT – doivent être au service des populations les plus fragiles. Fermer des lits de médecine à la campagne, faire en permanence travailler les équipes au seuil de sécurité, ce n'est pas offrir un service public de qualité ni bien traiter le personnel. La santé ne doit pas être soumise à des calculs financiers abstraits.

Les professionnels et les élus locaux sont prêts à travailler à un plan de soins efficace. Nous attendons donc de l'ARS et de votre ministère de l'humanité et du dialogue. Tous, même ceux qui habitent loin d'un CHU, méritent une politique de soins efficace et bienveillante. Je ne peux imaginer que vous laissiez périr en silence la population du Bessin et du Pré-Bocage. Comment comptez-vous dissiper le sentiment d'abandon des populations rurales et que comptez-vous faire pour que ce sentiment ne devienne pas une réalité ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la députée, vous m'interpellez sur la situation des établissements de santé du Bessin : les centres hospitaliers de Bayeux et d'Aunay-sur-Odon, qui connaissent des évolutions importantes dans une région confrontée à de grandes difficultés en matière de démographie médicale et de déficits hospitaliers.

À Aunay-sur-Odon, un centre de soins non programmés ouvrira en avril en lieu et place du service des urgences. Ce centre – un projet expérimental dans lequel s'est engagé l'établissement – sera ouvert sept jours sur sept en journée. Cette perspective avait déjà été envisagée en 2012, à l'instigation des équipes médicales de l'époque. Le départ de deux praticiens urgentistes sur les trois que comprenait l'équipe médicale a réactualisé cette hypothèse qui doit permettre de maintenir un service de proximité et de qualité.

Parallèlement, l'établissement renforcera son rôle de référence en matière de soins de suite et de réadaptation spécialisés. En partenariat avec le CHU de Caen, après l'arrêt de son activité de médecine cet été, il verra sa capacité d'accueil augmenter de dix-sept lits. Il aura enfin la possibilité d'ouvrir un centre d'accueil et de prise en charge de patients en état végétatif persistant, là aussi en lien avec le CHU de Caen, pour répondre à des besoins identifiés depuis longtemps.

Si la démographie médicale constitue un enjeu fort pour les territoires à faible densité de population, il faut souligner que le centre hospitalier de Bayeux ne connaît aucun problème d'attractivité médicale. Son plateau technique a été modernisé grâce à des aides financières apportées par l'ARS, qui représentent plus de 60 % du coût de l'investissement. L'activité de cet établissement est également en forte progression, permettant une croissance continue de ses recettes. L'ARS a simplement demandé à l'établissement que ses charges soient maîtrisées à travers un plan raisonné d'économies, sans remise en cause de ses activités.

Madame la députée, pour faire face à ces défis et à des enjeux de recomposition importants, l'ARS travaille en concertation avec les élus, les parlementaires et les présidents de conseil de surveillance, dans l'objectif de garantir à la population une offre de qualité, sur l'ensemble du territoire et en toute sécurité.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Je vous remercie pour ces précisions sur les hôpitaux d'Aunay-sur-Odon et de Bayeux. Vous avez bien fait de souligner que ce dernier offrait une qualité de soins remarquable. Malgré les suppressions de postes qui se sont succédé depuis des années, cet hôpital a fait beaucoup efforts pour améliorer ses résultats. Mais je ne suis pas d'accord avec vous : il n'y a jamais eu de concertation avec les élus et les équipes sur place. La réunion a eu lieu à la demande des grévistes, et le maire de Bayeux s'est rendu à l'ARS il y a quelques jours ; rien de plus. En réalité, il n'y a donc pas de concertation – c'est bien là le problème.

Un personnel qui a peur, ne sachant pas à quelle sauce il sera mangé à court ou à moyen terme, ne peut que suspecter des baisses d'effectifs puisque celles-ci ont eu lieu de manière répétée depuis des années. Le personnel de cet établissement fait des efforts, attestés par les chiffres, dans un contexte de suppression de postes, de conditions de travail à la limite de la rupture – une personne en arrêt maladie fait coincer la machine – et de non-communication de la part de l'ARS. La situation est très délicate et risque d'exploser prochainement.