14ème législature

Question N° 1326
de Mme Barbara Pompili (Écologiste - Somme )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Culture et communication
Ministère attributaire > Culture et communication

Rubrique > presse et livres

Tête d'analyse > auteurs

Analyse > incitation à la haine et à la discrimination raciale. poursuites judiciaires.

Question publiée au JO le : 14/11/2013
Réponse publiée au JO le : 14/11/2013 page : 11402

Texte de la question

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LE RACISME


M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour le groupe écologiste.

Mme Barbara Pompili. Monsieur le Premier ministre, il n'est pire atteinte à la République que ce racisme décomplexé qui s'étale aux unes nauséabondes de journaux sous couvert de refus du « politiquement correct ». (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes écologiste et SRC.) Cette expression détestable a été inventée par la droite américaine pour discréditer les acquis du mouvement des droits civiques et justifier le racisme.

Ce racisme n'épargne rien ni personne : il s'abat sur des populations démunies, boucs émissaires des maux de notre société.

Pervertissant le débat démocratique, il vous prend aujourd'hui pour cible, madame la garde des sceaux, de manière veule et dégradante.

Ce racisme a des racines. Il progresse par la perversion des mots et la confusion des idées.

Lorsqu'on laisse se propager l'idée qu'il faudrait, par principe, hiérarchiser l'attention portée aux autres : « je préfère ma fille à ma sœur, ma sœur à ma cousine, ma cousine à ma voisine, ma voisine à une étrangère », c'est le proche et le prochain que l'on confond, c'est la fraternité que l'on nie. Or, la République, c'est la fraternité.

Lorsqu'on accrédite l'idée que des citoyens étant différents les uns des autres ils ne peuvent bénéficier des mêmes droits – que l'on parle des noirs et des blancs, des hommes et des femmes, ou des homosexuels et des hétérosexuels –, on feint de confondre l'égal et l'identique. Or, la République, c'est l'égalité.

Vous avez annoncé des poursuites contre les officines qui véhiculent des propos et des images racistes, monsieur le Premier ministre. Cette décision, que les écologistes soutiennent pleinement, recueille l'assentiment de nombreux républicains, comme l'a rappelé votre prédécesseur Alain Juppé ce matin.

Et vous en avez appelé au sursaut. Ce sursaut indispensable s'exprime déjà dans l'esprit de beaucoup de nos concitoyens qui nous regardent ou s'expriment sur les réseaux sociaux. La voix de ces femmes et de ces hommes, faisons-la résonner ici, ensemble : c'est la voix de la République ! (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, SRC et RRDP, et sur plusieurs bancs du groupe UDI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Mesdames, messieurs les députés, le Premier ministre a pris une décision courageuse, celle d'appliquer l'article 40 du code de procédure pénale et de saisir le procureur de la République sur le fondement de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881.

C'est une grande et belle loi que cette loi de 1881 sur la liberté de la presse. D'ailleurs, avec Christiane Taubira, nous allons, au mois de janvier, défendre une loi sur la protection des sources des journalistes qui viendra renforcer ce socle qui a été donné, il y a maintenant plus de cent trente ans, à la liberté de la presse dans notre pays.

Mais la liberté de la presse, ce n'est pas l'injure. La liberté de la presse, ce n'est pas laisser dire n'importe quoi. Ce n'est pas sûrement pas laisser s'exprimer des propos racistes. L'incitation à la haine et à la discrimination raciales est inacceptable : ce n'est pas une opinion qui relève de la liberté d'expression, c'est tout simplement un délit. Et ce délit doit être condamné.

Nous continuerons à défendre ardemment la liberté de la presse. Des journalistes – encore tout récemment – sont tombés pour exercer cette belle et noble liberté, qui est indispensable au fonctionnement de toute société démocratique.

Mais nous ne confondons pas les journalistes avec ceux qui ne font que diffuser dans l'espace public, sur des papiers qui ressemblent à des torchons, des expressions qu'on aurait pensé de ne jamais pouvoir lire dans notre République, en 2013.

Le procureur de la République a ouvert une enquête, et cette enquête permettra de mettre fin à ce genre d'agissements. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)