RSA
Question de :
M. Marc-Philippe Daubresse
Nord (4e circonscription) - Les Républicains
M. Marc-Philippe Daubresse attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé concernant la reprise en charge d'une partie du revenu de solidarité active par l'État. Le revenu de solidarité active est le fruit des travaux du grenelle de l'insertion entre l'ensemble des acteurs pour poursuivre plusieurs objectifs : simplifier l'enchevêtrement des aides, garantir que le retour au travail des allocataires de minima sociaux produise un supplément de revenu, mettre fin aux désincitations au travail et réduire les effets de seuil et réduire le nombre de travailleurs pauvres sans alourdir le coût du travail. Or le nombre d'allocataires de RSA sans activité est très élevé, ce qui plombe les finances des départements de France. Le revenu de solidarité active devrait avoir une « pente » plus forte, pour être davantage incitatif au travail, pour notamment, augmenter le nombre de personnes en activité percevant le RSA en complément de leur revenu. Parmi les différentes propositions, on peut citer : créer l'obligation pour les bénéficiaires du RSA d'effectuer une activité d'utilité sociale de cinq heures en cas de refus de deux offres valables d'emploi ; créer un guichet unique : CAF, Pôle emploi, conseil départemental où seraient reçus en une seule fois tous les allocataires potentiels pour instruction de leur dossier et orientation ; créer un « chèque RSA » pour donner plus de souplesse dans les modalités d'accompagnement vers le retour à l'emploi, au logement, transport, garde d'enfants, proposition déjà expérimentée avec succès dans le Gard. Il souhaiterait avoir sa position sur ces sujets.
Réponse en séance, et publiée le 30 mars 2016
RÉFORME DU REVENU DE SOLIDARITÉ ACTIVE
Mme la présidente. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour exposer sa question, n° 1340, relative à la réforme du revenu de solidarité active.
M. Marc-Philippe Daubresse. Ma question, qui s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, concerne la possibilité d'une prise en charge d'une partie du RSA par l'État.
Le revenu de solidarité active est le fruit des travaux du Grenelle de l'insertion. Ses objectifs, annoncés à l'époque par Martin Hirsch, étaient de simplifier l'enchevêtrement des aides ; garantir que le retour au travail des allocataires de minima sociaux produise un supplément de revenu, pour mettre fin aux « désincitations » au travail et réduire les effets de seuil ; enfin, réduire le nombre de travailleurs pauvres, sans alourdir le coût du travail.
Aujourd'hui, le nombre de foyers bénéficiant du RSA socle est anormalement élevé. Il plombe les finances des départements, faute de dispositifs incitatifs permettant aux allocataires de passer du RSA socle au RSA activité, grâce à un parcours d'insertion adapté qui leur donnerait de bonnes chances de s'inscrire dans le cycle vertueux du travail. Au moins un tiers des allocataires actuels pourraient en bénéficier.
Plusieurs études, dont un rapport que j'ai remis au Président de la République il y a cinq ans, démontrent que cela est possible, à condition de résoudre la question du financement que j'ai examinée dans le détail. J'avais ainsi proposé de créer l'obligation, pour les bénéficiaires du RSA, d'effectuer une activité d'utilité sociale de sept heures hebdomadaires en cas de refus de deux offres d'emploi ; créer un guichet unique ; créer un « chèque RSA », pour donner plus de souplesse dans les modalités d'accompagnement vers le retour à l'emploi. Ces propositions ont été soumises aux différents ministres qui se sont succédé, afin d'expérimenter de nouvelles voies.
Dans mon rapport – M. Sirugue en a d'ailleurs fait un autre, excellent, depuis –, je proposais de faire passer la part du financement du département de 88 % à 35 %. Il suffirait d'un décret simple pour fixer ce nouveau taux de contribution. Dans l’hypothèse d’un contrat unique d'insertion de sept heures par semaine, le coût salarial final pour l’employeur serait de 56 euros par mois, ce qui est une somme faible ; les revenus du bénéficiaire du RSA augmenteraient d'un tiers, ce qui est vertueux ; et le département verrait sa charge diminuer de 50 euros par mois.
Vous ne manquerez pas de me dire que le coût résiduel reviendrait à l'État. Selon mes calculs, pour 10 000 contrats, le coût pour l’État serait d’environ 33 millions d'euros. Mais le RSA n'est pas prélevé sur le budget de l'État. Il est financé, pour l'essentiel, par le Fonds national des solidarités actives, qui est lié à une taxe solidaire d'un peu plus de 1 % sur les produits du capital.
À la suite des mesures préconisées par les différents rapports, Mme la ministre serait-elle prête à faire l'essai de nouveaux dispositifs ? Dans le cadre des négociations actuelles entre le Premier ministre et les départements de France, la ministre serait-elle prête à expérimenter ce type de contrats pour faire passer beaucoup plus de personnes au RSA socle en RSA activité ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie.
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le député, je tiens à rappeler en préambule la proposition que le Premier ministre a faite à l'Assemblée des départements de France – l'ADF – d'une recentralisation des prestations dues au titre du revenu de solidarité active sur la base des dépenses de l'année 2016. C'est une solution responsable pour mettre fin aux difficultés des départements, qui coûterait 700 millions d'euros à l'État.
Le Premier ministre a conditionné cette prise en charge à un renforcement de l'accompagnement par les conseils départementaux des bénéficiaires du RSA vers l'insertion et l'emploi, conformément à la vocation essentielle des départements s'agissant de la mise en œuvre des politiques de solidarité. Le Gouvernement attend de connaître la position de l'ADF.
Différents leviers peuvent être mis en œuvre pour favoriser l'insertion des bénéficiaires, mais je veux rappeler ici que le Gouvernement s'oppose à ce que le RSA soit conditionné à une activité, car c'est contraire à la loi mais aussi à nos valeurs. Affirmer ou même insinuer que les bénéficiaires du RSA le sont par choix relève d'un non-sens. Nous veillerons à ce que les départements respectent le cadre législatif.
Le Gouvernement s'engage pour permettre le retour à l'emploi. C'est pourquoi nous avons créé 700 postes de conseillers Pôle emploi qui accompagnent les bénéficiaires de minima sociaux. C'est aussi l'objectif de la création des référents de parcours qui organisent la mobilisation de l'ensemble des dispositifs autour des personnes. C'est le sens de la prime d'activité et de la garantie jeunes que nous avons mises en place. La prime d'activité ayant remplacé le RSA activité, votre proposition sur la « pente » du RSA est d'ailleurs devenue sans objet. Le succès rencontré par la prime d'activité, attesté par un taux de recours croissant, montre que la dynamique de l'insertion impulsée par le Gouvernement est bien à l'œuvre.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse.
M. Marc-Philippe Daubresse. Madame la secrétaire d'État, il ne m'a pas échappé que le Premier ministre a proposé de nationaliser une partie du RSA, mais vu que la prise en charge se fera sur la base des dépenses de 2016, cette mesure ne résoudra pas les difficultés de plusieurs départements qui risquent la mise sous tutelle. C'est pourquoi le dialogue se poursuit entre l'ADF et le Gouvernement.
Il ne m'a pas non plus échappé qu'à la suite du rapport Sirugue, la prime d'activité a remplacé le RSA activité. Mais un système vertueux permettant de faire passer les bénéficiaires du RSA socle à la prime d'activité fait toujours défaut. Plusieurs solutions peuvent être envisagées. Contrairement à ce que vous suggériez, je ne souhaite pas forcément obliger toutes les personnes au RSA à effectuer un travail d'intérêt général ; il faut au contraire les mettre dans une dynamique d'insertion. On pourrait donner aux départements qui le souhaitent la faculté d'accompagner cette insertion grâce à un dispositif de financement qui leur permettrait de s'en sortir.
Auteur : M. Marc-Philippe Daubresse
Type de question : Question orale
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 mars 2016