14ème législature

Question N° 1351
de Mme Pascale Crozon (Socialiste, républicain et citoyen - Rhône )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > étrangers

Tête d'analyse > demandeurs d'asile

Analyse > accueil. perspectives.

Question publiée au JO le : 22/03/2016
Réponse publiée au JO le : 30/03/2016 page : 2480

Texte de la question

Mme Pascale Crozon attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés de mise en œuvre de la réforme de l'asile par les acteurs participant au schéma national d'accueil, pouvant aboutir à déstabiliser des équipements performants alors même que le législateur a souhaité permettre une certaine souplesse par le biais de conventions. Ainsi, à Villeurbanne, l'association Forum réfugiés déplore une forte diminution du taux de rotation des places disponibles dans son centre de transit, du fait de la déconnexion entre celui-ci et la plate-forme départementale d'accueil (PADA), au profit d'une attribution des places par l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dans une agglomération en tension, ce sont aujourd'hui 50 demandeurs d'asile de moins à bénéficier chaque mois de cet accompagnement (soit 600 sur un an), le centre de traitement (CDT) étant détourné de sa vocation première et assurant aujourd'hui un hébergement durable de demandeurs dublinés. Elle constate par ailleurs que la PADA est aujourd'hui mobilisée au profit de « calaisiens » hébergés dans des centres d'accueil et d'orientation (CAO) n'assurant pas de missions d'accompagnement, loin des ambitions de la loi. Enfin, elle interroge le Gouvernement sur l'accompagnement social des réfugiés statutaires, dont certains se retrouvent sans solution du fait du délai pouvant atteindre 6 mois entre l'arrêt de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) et l'ouverture des droits communs.

Texte de la réponse

RÉFORME DE L'ASILE


Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Crozon, pour exposer sa question, n°  1351, relative à la réforme de l'asile.

Mme Pascale Crozon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et concerne la mise en œuvre de la réforme de l'asile, entrée en application le 1er novembre dernier.

Si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, a très largement anticipé le volet « procédures » de cette réforme, la mise en œuvre du schéma national d'accueil, dont la gestion est placée sous la responsabilité de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, l'OFII, semble à cette heure se heurter à un certain nombre de difficultés.

Les centres de transit ont démontré leur efficacité pour répondre aux sollicitations les plus urgentes et ouvrir la voie à une meilleure répartition sur le territoire, ce qui est bien notre objectif. Pourtant, dans ma circonscription, le centre de transit a vu son taux d'occupation baisser et son taux de rotation divisé par deux depuis que l'affectation des places n'est plus liée à la plateforme d'accueil des demandeurs d'asile, la PADA : environ 50 personnes par mois, soit 600 par an, n'ont plus accès à cette structure d'hébergement et d'accompagnement. C'est pourquoi je souhaite interroger le Gouvernement sur la spécificité des centres de transit et les solutions qu'il envisage pour la préserver.

La loi que nous avons votée n'interdit pas une certaine souplesse – qui me semble, sur ce sujet, nécessaire –, par le biais de conventions entre l'OFII et les associations gestionnaires de structures d'hébergement. Face aux nouveaux défis que représentent les demandeurs relocalisés depuis la Grèce et l'Italie, et les migrants du Calaisis à répartir, je souhaite également savoir si le Gouvernement envisage la création de nouveaux centres de transit. En effet, nous constatons que ces personnes sont parfois hébergées dans des structures qui n'assurent pas d'accompagnement, celui-ci étant alors assuré par les PADA, ce qui ne répond pas aux objectifs que nous nous étions fixés dans la loi.

Enfin, je souhaite vous faire part de mon inquiétude en matière d'accompagnement social des réfugiés statutaires, compte tenu du délai, pouvant atteindre plusieurs mois, entre l'arrêt du paiement de l'allocation pour demandeur d'asile, l'ADA, et l'ouverture des droits sociaux. Outre la fragilisation des ménages, qui se trouvent sans ressources, c'est la sortie des structures d'hébergement et l'accès au logement qui sont ainsi retardés. Comment le Gouvernement entend-il résoudre ces difficultés ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Madame la députée, je vous prie de bien vouloir également excuser l'absence du ministre de l'intérieur.

Vous évoquez les difficultés de la mise en œuvre de la réforme de l'asile, qui intervient dans un contexte migratoire exceptionnel, avec une pression très forte sur l'ensemble des dispositifs. Pour autant, le Gouvernement s'emploie à faire en sorte que les délais d'accès aux droits des demandeurs d'asile soient raccourcis.

La loi du 29 juillet 2015 a confié à l'OFII la gestion du dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile, et par conséquent leur orientation vers l'hébergement, sans que ce pilotage se soit traduit par une dégradation, contrairement à ce que vous laissiez entendre, si j'ai bien compris.

Les tensions tiennent avant tout à la saturation du parc de places d'hébergement, associée à la hausse des demandes d'asile constatée ces derniers mois, qui concerne notamment les demandeurs placés sous procédure Dublin. Pourtant, les capacités d'hébergement dédiées aux demandeurs d'asile ont augmenté : 5 000 places en CADA ont été créées en 2015 ; 8 630 le seront en 2016.

Une bonne coordination entre les différents acteurs est essentielle, vous l'avez rappelé, notamment pour éviter l'engorgement des structures d'accueil. C'est l'objet des schémas régionaux d'accueil des demandeurs d'asile, qui doivent être élaborés d'ici la fin du premier semestre 2016.

La stratégie d'orientation vers les centres d'accueil et d'orientation peut avoir des effets sur les dispositifs régionaux d'accueil. Il est vrai que la mise en œuvre d'une réponse nationale, rendue indispensable par la situation d'urgence constatée à Calais, vient parfois perturber les dispositifs locaux.

Quant à l'accompagnement social des réfugiés statutaires et au délai entre l'interruption de l'ADA et l'ouverture des droits sociaux, elle préoccupe également le Gouvernement. Un fonds de secours peut être mobilisé pour les personnes en difficulté financière. Le ministre partage votre souhait que les délais d'ouverture des droits sociaux après l'obtention d'un statut protecteur soient raccourcis. Un travail a été engagé en ce sens avec le ministère des affaires sociales et de la santé ; nous essaierons d'aboutir rapidement à une solution.

Tels sont, madame la députée, les réponses que le ministre de l'intérieur souhaitait vous apporter.

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Merci, madame la secrétaire d'État, pour cette réponse. Permettez-moi néanmoins de préciser un point : le centre de transit de ma circonscription a vu son taux d'occupation baisser et son taux de rotation réduire de moitié depuis que l'affectation des places n'est plus liée à la plateforme d'accueil. Le problème est là : 50 demandeurs d'asile par mois, soit 600 par an, n'ont plus accès à cette structure d'hébergement et d'accompagnement. Afin que ces places ne soient pas laissées vacantes, dans un contexte de forte pénurie, nous avons proposé qu'une solution, par le biais de conventions, soit trouvée très rapidement entre l'OFII et les associations gestionnaires.