effectifs de personnel
Question de :
M. Alain Gest
Somme (4e circonscription) - Les Républicains
M. Alain Gest attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur au sujet des engagements pris par le Premier ministre lors de sa venue à Amiens en juillet 2015. Le Premier ministre avait par ailleurs, lors de sa visite, annoncé la création d'une plateforme nationale de validation des titres avec la création d'une centaine de postes de fonctionnaires d'État, afin de compenser la perte du statut de capitale régionale pour la ville d'Amiens. Cependant, la création de cette plateforme n'est plus d'actualité, elle serait remplacée par une plateforme d'instruction des certificats d'immatriculation, composée, non plus de 100 fonctionnaires d'État mais de 40 agents. Il souhaite donc l'alerter sur cette perte massive d'emplois et sur les conséquences que cela pourrait engendrer pour tout un territoire.
Réponse en séance, et publiée le 1er avril 2016
PLATE-FORME NATIONALE DE VALIDATION DES TITRES À AMIENS
M. le président. La parole est à M. Alain Gest, pour exposer sa question, n° 1370, relative à la plate-forme nationale de validation des titres à Amiens.
M. Alain Gest. Madame la secrétaire d'État, ma question s'adressait spécifiquement à M. Bernard Cazeneuve, dont je respecte l'action personnelle dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, mais dont je déplore les promesses non suivies d'effets concernant Amiens et le département de la Somme.
La création des nouvelles régions a conduit le Gouvernement à priver Amiens de son statut de capitale régionale. Mais il s'est engagé à ce que la capitale picarde ne soit pas privée d'effectifs de fonctionnaires. Ces promesses ont été officialisées par le Premier ministre en personne le 30 juillet dernier, à Amiens.
Que sont devenues ces promesses ? Les états-majors des nombreuses directions régionales affectées à Lille ont bien entendu quitté Amiens. Ceux des deux directions affectées à Amiens sont répartis entre Lille et Amiens. C'est le cas notamment de la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale. Le secrétariat général pour les affaires régionales – SGAR – a déjà été supprimé, tout comme un service de l'INSEE. À cela s'ajoutent la suppression des directions régionales à Amiens de la SNCF, ou encore de l'association pour la formation professionnelle des adultes – AFPA, le probable et imminent transfert du centre de déminage, ainsi que la disparition de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification des accidents du travail, prévue dans la loi sur la justice du XXIe siècle.
Et, comme si cela ne suffisait pas, la plate-forme dite « nationale » de validation des titres, dont la création a été annoncée par Bernard Cazeneuve dès le mois de juin, et confirmée par écrit par Manuel Valls, alors qu'elle devait créer cent emplois, en prévoit seulement quarante, pendant que l'on en installe quarante-neuf à Arras – qui n'a pas perdu son statut de capitale, que je sache ! – et quarante à Lille ! Comme on nous annonce par ailleurs la suppression de trente-six postes dans le cadre de la réforme « Préfectures Nouvelle génération », la création nette d'emplois sera donc limitée à quatre postes, madame la secrétaire d'État, alors même qu'une centaine de postes des directions régionales ont disparu.
Comment qualifier ces différentes décisions ? Faire annoncer au Premier ministre une décision qui se révèle fausse, c'est au mieux de l'incompétence, au pire un mensonge. Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement a-t-il décidé d'affecter d'autres services à Amiens – par exemple l'un des huit pôles juridiques renforcés pour épauler les préfectures ? Peut-on au moins espérer une autre réponse que celle, alambiquée mais négative, que nous a faite Manuel Valls au sujet de l'ouverture d'une école vétérinaire créatrice de centaines d'emplois, et sans incidence financière pour l'État ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville.
Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État chargée de la ville. Monsieur le député, même si votre question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur, permettez-moi de vous donner quelques éléments de réponse.
Votre question porte, d'une manière générale, sur la réforme des régions, et plus précisément sur la nature et le format de la plate-forme nationale de validation des titres, dont le Premier ministre avait annoncé le principe lors de son déplacement à Amiens en juillet 2015. J'espère que les éléments de réponse que je vais vous fournir contribueront à vous rassurer quant à la parole publique.
Initialement, les premières réflexions avaient conduit le ministre de l'intérieur à esquisser l'implantation de cinq plates-formes nationales spécialisées sur les quatre titres suivants : permis de conduire, certificat d'immatriculation, carte nationale d'identité et passeport. Il avait alors proposé au Premier ministre, dans le cadre de la réforme régionale, de pouvoir implanter l'une de ces plates-formes à Amiens.
Le Gouvernement a tenu cet engagement. Il a toutefois souhaité en tenir un autre, celui de l'absence de mobilité géographique forcée pour les agents – en tant qu'élu, je pense que c'est une considération à laquelle vous êtes également sensible. Or une plate-forme de titres de cent agents à Amiens aurait nécessité de nombreuses mobilités d'agents, alors même que la préfecture ne compte aujourd'hui que trente-deux agents en charge des titres.
Par ailleurs, d'après les études que nous avons produites, créer des structures dépassant cinquante agents aurait conduit à compromettre l'un des objectifs de la réforme, objectifs que vous partagez : dégager des économies pour financer les missions prioritaires que sont le contrôle de légalité, la lutte contre la fraude, la gestion des crises et l'ingénierie territoriale.
De surcroît, la réalité des disponibilités immobilières rendait très onéreuse la création de structures à même d'accueillir une centaine d'agents, dans des conditions d'ergonomie dignes de conditions de travail modernes pour nos fonctionnaires. Enfin, le Gouvernement a souhaité amplifier ses choix d'aménagement du territoire : en ce sens, implanter quarante-sept plateformes et non cinq a permis de davantage répartir les services publics sur le territoire national et de ne pas organiser de déménagement territorial.
Le tableau général ayant été brossé, je reviens à la situation d'Amiens. Je tiens à préciser qu'il s'agit bien de l'une des cinq plates-formes nationales dédiées aux certificats d'immatriculation. C'est donc un équilibre entre les principes de compensation de la perte de statut de capitale régionale, de prise en compte des souhaits des agents, d'efficacité de la dépense publique et d'aménagement du territoire qui a conduit à finaliser ces décisions, lesquelles visent à rompre avec la logique de la révision générale des politiques publiques.
Enfin, je veux rappeler que ce n'est pas uniquement avec ces plates-formes de titres, mais avec la réforme régionale elle-même, que le Gouvernement a apporté des réponses à vos légitimes préoccupations d'emploi public. Contrairement aux préconisations du rapport des inspections générales de regrouper l'ensemble des services de l'État dans les capitales régionales, le ministre de l'intérieur a proposé au Premier ministre d'organiser le maintien de services régionaux puissants dans les ex-capitales régionales, ce qui répond à l'une de vos questions. C'est ainsi que le Conseil des ministres du 31 juillet a décidé de l'implantation de la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt – DRAAF – à Amiens : 87 agents sont concernés. Et même dans les directions régionales dont le siège est implanté à Lille, l'emploi public est maintenu à horizon 2018, avec 191 emplois sur 210 pour la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement – DREAL –, 145 sur 157 pour la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi – DIRECCTE. Dans certaines directions, il augmente même : ainsi, la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale va passer de 57 à 65 emplois à Amiens.
Monsieur le député, c'est à l'aune de l'ensemble des décisions prises par le Gouvernement ces derniers mois qu'il convient d'envisager l'impact de la réforme régionale sur l'emploi public à Amiens. Je tiens à ajouter que l'État n'est d'ailleurs pas le seul à détenir les clés de cette question : le conseil régional, par les choix qu'il sera amené à effectuer dans les prochains mois, en localisant ses implantations immobilières et le lieu de ses commissions ou du Conseil économique, social et environnemental régional – CESER –, comme le prévoit la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, pourra contribuer à cet équilibre global.
M. le président. La parole est à M. Alain Gest.
M. Alain Gest. Madame la secrétaire d’État, j'ai bien entendu la réponse formelle qu'on vous a demandé de me donner. Néanmoins, force est de constater que le Premier ministre ne s'est pas contenté de donner une position de principe lorsqu'il est venu à Amiens : il a dit que 100 emplois allaient être créés. Le problème est donc bien qu'on lui a demandé d'annoncer une mauvaise décision ! Je m'interroge sur ce genre de pratique. En outre, je comprends bien le principe d'absence de mobilité géographique forcée du personnel, mais peut-être aurait-il fallu y penser avant l'annonce de la décision par le Premier ministre.
Enfin, nous comptons sur un changement de position du ministre de l'intérieur et sur des réponses aux courriers multiples envoyés par Mme le maire d'Amiens et moi-même. À défaut, il me restera à déplorer que plus les ministres originaires d'Amiens ou de Picardie – comme M. Cazeneuve – sont nombreux, moins on a de services publics dans notre département.
Auteur : M. Alain Gest
Type de question : Question orale
Rubrique : Fonctionnaires et agents publics
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 mars 2016