14ème législature

Question N° 1387
de M. Jean-Paul Tuaiva (Union des démocrates et indépendants - Polynésie Française )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Outre-mer
Ministère attributaire > Outre-mer

Rubrique > outre-mer

Tête d'analyse > ressources

Analyse > changement climatique. Fonds vert. bénéficiaires.

Question publiée au JO le : 22/03/2016
Réponse publiée au JO le : 01/04/2016 page : 2624

Texte de la question

M. Jean-Paul Tuaiva appelle l'attention de Mme la ministre des outre-mer sur l'annonce du Président de la République formulée en février 2016 quant à l'éligibilité de la Polynésie française au Fonds vert pour le Climat. Cette source d'espoir pour le développement de la Polynésie française est pour autant restreinte par un processus qui risque d'être très long. Alors même que les premières conséquences du changement climatique s'observent (blanchissement des coraux, salinisation des sols, érosion des plages), la Polynésie française traverse une crise économique sans précédent. C'est ainsi que le seuil de pauvreté y est fixé à 412 euros alors qu'il est de 980 euros en métropole. Le taux de chômage des jeunes de moins de 30 ans (ceux qui auront à subir les pires effets du changement climatique) est de 63 %. La Polynésie française fait donc évidemment partie des « territoires isolés » qui se caractérisent par « leur fragilité et leur forte dépendance énergétique, des coûts de production d'électricité plus élevés que dans le territoire métropolitain continental et une demande d'électricité qui augmente nettement plus vite du fait d'une croissance économique soutenue et d'un comblement progressif du retard en équipement des ménages et en matière d'infrastructures » (annexe de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique), et qui nécessitent donc la mise en place d'un acte législatif et réglementaire adapté, et a fortiori d'un dispositif de péréquation tarifaire. L'électricité vendue en Polynésie française est chère - l'une des plus chères au monde - et son prix est ainsi deux à trois fois plus élevé qu'en métropole. Lors de l'examen de la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte, il avait été souhaité que le bénéfice de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) soit étendu à la Polynésie française. Le motif de refus d'extension de la CSPE à la Polynésie française, tel qu'exposé par la ministre de l'écologie, et fondé sur la circonstance que l'État ne serait pas compétent en Polynésie française en matière d'énergie, est inopérant en raison des situations des autres collectivités d'outre-mer qui en bénéficient. Un rapport devait être rendu avant le 31 décembre 2015 sur les modalités selon lesquelles les deux seules collectivités d'outre-mer, que sont la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, pourraient bénéficier de la CSPE ; d'autre part, il devait indiquer quelles mesures spécifiques d'accompagnement le Gouvernement entend développer pour permettre l'application des principaux dispositifs prévus par cette loi. Il convient de rappeler en outre que l'article 72-2 (dernier alinéa) de la Constitution pose le principe que la « loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ». L'adaptation au changement climatique par une transition énergétique est la clef du développement durable de la Polynésie française. Celle-ci dispose des compétences statutaires et des moyens humains pour s'adapter à ces enjeux. Il convient maintenant de disposer des moyens financiers pour répondre aux impératifs écologiques. Aussi, dans l'attente du bénéfice du Fonds vert pour le climat, et face à l'urgence climatique, il lui demande quels moyens financiers peuvent être mobilisés par le Gouvernement pour favoriser l'impératif d'adaptation de la Polynésie aux changements climatiques, gage d'un développement soutenable et économique.

Texte de la réponse

ADAPTATION DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES


M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Tuaiva, pour exposer sa question, n°  1387, relative à l'adaptation de la Polynésie française aux changements climatiques.

M. Jean-Paul Tuaiva. Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l'annonce du Président de la République quant à l'éligibilité de la Polynésie française au Fonds vert pour le climat est source d'espoir pour le développement de notre pays. Néanmoins, le processus risque d'être long.

La Polynésie française traverse une crise économique sans précédent. C'est ainsi que le seuil de pauvreté y est fixé à 412 euros, alors qu'il est de 980 euros en métropole. Le taux de chômage des jeunes de moins de 30 ans – ceux qui devront subir les pires effets du changement climatique – s'élève quant à lui à 63 %.

Les premières conséquences du changement climatique s'observent déjà depuis un moment : blanchiment des coraux, salinisation des sols, érosion des plages. La Polynésie française fait donc évidemment partie des territoires vulnérables et isolés qui se caractérisent par leur fragilité et leur forte dépendance énergétique, avec des coûts de production d'électricité plus élevés que dans le territoire métropolitain continental et une demande d'électricité qui augmente nettement plus vite en raison d'une croissance démographique soutenue.

Ceci engendre un comblement progressif du retard en équipement des ménages, lequel nécessite la mise en place d'un acte législatif et réglementaire adapté et, a fortiori, un dispositif de péréquation tarifaire.

L'électricité vendue en Polynésie française est l'une des plus chères au monde, et son prix est deux à trois fois plus élevé qu'en métropole. Lors de l'examen de la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte, nous avions sollicité la ministre de l'écologie afin d'étendre à la Polynésie française le bénéfice de la contribution au service public de l'électricité – CSPE.

Le motif de refus d'extension tel qu'exposé par Mme Ségolène Royal est fondé sur le fait que l'État ne serait pas compétent en Polynésie française en matière d'énergie. Cependant, d'autres collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution bénéficiant de la CSPE, ce motif n'est pas justifié.

Par ailleurs, un rapport devait être rendu avant le 31 décembre 2015 sur les modalités selon lesquelles les deux seules collectivités d'outre-mer que sont la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie pourraient bénéficier de la CSPE. Il devait également indiquer quelles mesures spécifiques d'accompagnement le Gouvernement entend développer pour permettre l'application des principaux dispositifs prévus par cette loi.

Première question, madame la secrétaire d'État : quand aurons-nous ce rapport ?

Il convient de rappeler en outre que le dernier alinéa de l'article 72-2 de la Constitution pose le principe que la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité réelle entre les collectivités territoriales.

Nous, « Français du bout de la France », pour reprendre les propos du Président de la République, savons que notre adaptation au changement climatique grâce à la transition énergétique est la clef du développement durable de la Polynésie française. Nous disposons des compétences statutaires et des moyens humains pour nous adapter à ces enjeux. Nous devons maintenant disposer des moyens financiers afin de répondre aux impératifs écologiques.

Dans l'attente du bénéfice du Fonds vert pour le climat et face à l'urgence climatique, quels moyens financiers peuvent être mobilisés par le Gouvernement pour favoriser l'impératif d'adaptation de la Polynésie aux changements climatiques ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Tout d'abord, monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer, qui m'a chargée de vous répondre.

La loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française fixe la répartition des compétences entre la Polynésie et l'État. Ainsi, la Polynésie française dispose d'une compétence pleine et entière en matière d'énergie. Toute disposition visant à étendre par une loi simple certaines dispositions du code de l'énergie à la Polynésie française, prérequis à la mise en place de la péréquation tarifaire, serait donc inconstitutionnelle – elle impliquerait en effet une remise en cause des compétences qui constituent la base du statut de la Polynésie française.

Certaines collectivités aujourd'hui compétentes en matière d'énergie bénéficient, comme vous le soulignez, de la péréquation tarifaire. Il s'agit toutefois d'un élément issu de leur statut antérieur de département d'outre-mer, et cette situation ne concerne malheureusement pas la Polynésie française.

Ces éléments juridiques posés, je souhaite réaffirmer ici que le Gouvernement ne se désintéresse pas pour autant de la question énergétique en Polynésie française. Comme vous le soulignez, le Président de la République, lors de son récent déplacement dans votre territoire, a souhaité que la Polynésie puisse bénéficier d'un soutien en matière de lutte contre les effets du changement climatique.

Le Fonds vert est un mécanisme international destiné à aider les États les plus vulnérables de la planète. La Polynésie française peut en bénéficier via des actions de coopération régionale menées dans le cadre du Programme régional océanien de l'environnement, l'un des organismes accrédités auprès du Fonds vert.

Sans préjudice des démarches à venir qui pourront être engagées en faveur de la Polynésie, il importe désormais de trouver des solutions concrètes pour soutenir les initiatives de la collectivité, exprimées notamment dans son Plan Climat Énergie ou encore dans son Plan de transition énergétique.

D'autres instruments sont également mobilisables, comme le programme horizontal du Fonds européen de développement destiné aux pays et territoires d’outre-mer, dont la programmation actuelle se concentre d'ailleurs sur la protection de la biodiversité.

Par ailleurs, le contrat de projets État-Polynésie française prévoit une enveloppe de 21 millions d'euros pour le développement des énergies renouvelables sur la période 2015-2020.

Outre ces outils, la Polynésie française a également accès à l'Agence française de développement, l'AFD : le projet de climatisation par eau profonde du centre hospitalier de Taaone est ainsi financé par deux prêts à des taux bonifiés de l'AFD et de la Banque européenne d'investissement ainsi que par une subvention de l'ADEME.

Monsieur le député, comme vous pouvez le constater, le Gouvernement est parfaitement engagé aux côtés de votre territoire pour faire face aux défis qui sont les vôtres. Les efforts qui sont d'ores et déjà engagés seront poursuivis et développés.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Tuaiva.

M. Jean-Paul Tuaiva. Je vous remercie pour ces éléments de réponse, madame la secrétaire d'État, que j'ai d'ailleurs déjà entendus par le passé – mais ce n'est pas grave !

Quid du rapport qui devait être rendu au 31 décembre 2015 ? À ma connaissance, plusieurs projets de rapport ont été élaborés mais, à ce jour, nous n'avons toujours pas de réponse de la part du ministère.