14ème législature

Question N° 1456
de M. Jean-Pierre Barbier (Les Républicains - Isère )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Aménagement du territoire, ruralité et collectivités territoriales
Ministère attributaire > Aménagement du territoire, ruralité et collectivités territoriales

Rubrique > départements

Tête d'analyse > ressources

Analyse > transfert de compétences. dotations.

Question publiée au JO le : 17/05/2016
Réponse publiée au JO le : 25/05/2016 page : 3567

Texte de la question

M. Jean-Pierre Barbier appelle l'attention de M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales sur les enjeux des transferts de compétences et des ressources entre les départements et les métropoles. Si la compensation présente le caractère d'une dépense obligatoire selon l'article L. 5217-16 du CGCT, l'imputation comptable de celle-ci n'est pas précisée par la loi et est source d'incertitude pour les départements. En effet, a priori, par analogie avec les transferts opérés par le bloc communal, la dotation de compensation que devraient recevoir les métropoles dans le cadre du processus de métropolisation à la suite du transfert des compétences et des ressources serait inscrite en fonctionnement dans les budgets des départements, alors même qu'une partie des dépenses transférées par les départements concernera des dépenses d'investissement. Cette incohérence aura un impact réel et fort sur la situation financière des départements qui vont voir leurs épargnes brutes se dégrader substantiellement, ce qui entraînera automatiquement un autofinancement plus faible. Il lui demande si le Gouvernement va autoriser les départements, il serait souhaitable que cela puisse être le cas, à ce que les transferts des dépenses d'investissement puissent être inscrites en dépenses d'investissement dans le budget des départements et non en fonctionnement.

Texte de la réponse

ENJEUX FINANCIERS DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES ENTRE COLLECTIVITÉS TERRITORIALES


Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour exposer sa question, n°  1456, relative aux enjeux financiers des transferts de compétences entre collectivités territoriales.

M. Jean-Pierre Barbier. Monsieur le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, j'appelle votre attention sur les enjeux des transferts de compétences et de ressources entre les départements et les métropoles.

L'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales tel que modifié par l'article 90 de la loi NOTRe du 7 août 2015, et relatif aux modalités de transfert ou de délégation de compétences à conclure entre les départements et les métropoles, introduit la nécessité pour les départements de transférer ou déléguer aux métropoles certaines compétences.

Parallèlement, l'article L. 5217-13 du code général des collectivités territoriales dispose que tout accroissement net de charges résultant des transferts de compétences effectués entre la région ou le département et la métropole est accompagné du transfert concomitant à la métropole des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences. Ces ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par la région ou le département au titre des compétences transférées.

Si cette compensation présente le caractère d'une dépense obligatoire, ce que je ne conteste pas, l'imputation comptable de celle-ci n'est pas précisée par la loi. Cette situation est source d'incertitude pour les départements.

En effet, a priori, par analogie avec les transferts opérés par le bloc communal, la dotation de compensation que devraient recevoir les métropoles dans le cadre du processus de métropolisation à la suite du transfert des compétences et des ressources serait inscrite en fonctionnement dans les budgets des départements, alors même qu'une partie des dépenses transférées par les départements concernera des dépenses d'investissement.

Cette incohérence aura des conséquences réelles et sérieuses sur la situation financière des départements, lesquels sont d'ores et déjà confrontés à des difficultés et subiraient ainsi une dégradation importante de leur épargne brute, ce qui porterait préjudice à leur capacité à s'autofinancer.

Le Gouvernement autorisera-t-il les départements à réaliser des prélèvements sur leurs budgets d'investissement pour compenser les transferts réalisés dans le cadre des investissements et non pas en fonctionnement ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le député, la métropole exerce à l'intérieur de son périmètre, par transfert, en lieu et place du département, certaines compétences. Les charges correspondant à l'exercice des compétences transférées font l'objet d'une évaluation préalable au transfert desdites compétences. Cette évaluation revêt un caractère contradictoire. Les charges transférées doivent être équivalentes aux dépenses consacrées préalablement à la création de la métropole par le département à l'exercice des compétences transférées.

Le législateur a laissé le soin aux collectivités locales de trouver un accord sur les modalités financières des transferts de compétences. C'est donc la convention signée après consultation de la commission locale chargée de l'évaluation des charges et des ressources transférées qui précise les montants de la dotation de compensation des charges transférées. Comme vous le relevez, la loi ne précise pas l'affectation de cette dotation de compensation.

Toutefois, il faut prendre en compte l'objet de cette dépense obligatoire des départements qui consiste à allouer des ressources à des métropoles pour l'exercice des compétences transférées. Les dépenses d'investissement qui sont prises en compte dans le calcul du montant de la dotation de compensation perdent à cette occasion leur objet initial.

En effet, les transferts de compétences sont définitifs et irréversibles, à moins d'une nouvelle intervention du législateur. À compter de la date des transferts, les départements n'ont plus aucun droit de regard sur les modalités d'exercice de la compétence, et ne peuvent pas contraindre – y compris financièrement – les métropoles, lesquelles sont libres de définir les modalités d'exercice, quitte à remettre en cause les choix opérés par les départements.

C'est pour ce motif que la dotation de compensation revêt dans sa totalité le caractère d'une dépense de fonctionnement des départements, donc d'une ressource de fonctionnement des métropoles pour permettre à ces dernières d'affecter les ressources en fonction de leurs choix de gestion.

Il paraît à cet égard utile de préciser qu'il ne faut pas confondre la continuité des contrats en cours en matière d'investissement – qui lient les métropoles après transfert des compétences jusqu'à leur achèvement, et les contraignent à prévoir leur financement dans son budget – avec le transfert de crédits d'investissement départementaux qui lieraient définitivement les métropoles, en contradiction avec le régime légal des transferts de compétences.

Ainsi, même si je suis sensible aux arguments que vous développez, je ne peux que vous confirmer que la dotation de compensation ne peut pas être inscrite, même pour partie, en dépenses d'investissement dans les budgets départementaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier.

M. Jean-Pierre Barbier. Votre réponse affectera tous les présidents de département car la situation financière des départements sera de plus en plus difficile à supporter. Vous savez dans quel état ils se trouvent : si rien n'est fait demain, nous courons droit à la catastrophe. Peut-être, après tout, est-ce là la manifestation d'une volonté politique que le Premier ministre avait affichée en 2014.

M. Jean-Michel Baylet, ministre. Vous ne pouvez pas me dire cela !