14ème législature

Question N° 1467
de M. Jean-Frédéric Poisson (Les Républicains - Yvelines )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Logement et habitat durable
Ministère attributaire > Logement et habitat durable

Rubrique > environnement

Tête d'analyse > parcs régionaux

Analyse > logements. construction. réglementation.

Question publiée au JO le : 17/05/2016
Réponse publiée au JO le : 25/05/2016 page : 3551

Texte de la question

M. Jean-Frédéric Poisson interroge Mme la ministre du logement et de l'habitat durable sur la mise en œuvre de la loi SRU dans les territoires ruraux d'Ile de France. Alors que la population yvelinoise connaît une faible croissance démographique (croissance de 0,1 % par an entre 2007 et 2012, selon les chiffres de l'INSEE), l'application mécanique des obligations de la loi ALUR (SRU renforcée) est toujours en vigueur, y compris dans les zones protégées comme les parcs naturels régionaux. Malgré la contestation des élus locaux de toutes les communes situées dans des parcs naturels régionaux, le Gouvernement n'a pas mis fin à cette incohérence. Aussi il lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour que la construction de nouveaux logements prenne en compte la réalité des territoires. Dans le cas précis des communes situées dans un parc naturel régional, il lui paraît plus adapté de fixer une obligation en termes de flux (nouveaux logements construits) et non de stock.

Texte de la réponse

MISE EN ŒUVRE DE LA LOI SRU DANS LES PARCS NATURELS RÉGIONAUX


Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour exposer sa question, n°  1467, relative à la mise en œuvre de la loi SRU dans les parcs naturels régionaux.

M. Jean-Frédéric Poisson. Madame la secrétaire d'État, le parc naturel de la Haute Vallée de Chevreuse, situé au sud-ouest de l'Île-de-France, comprend cinq communes. Celles-ci, entrées dans une intercommunalité de plus de 50 000 habitants et hébergeant plus de 1 500 habitants, sont désormais soumises aux contraintes à l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « SRU », qui leur fait l'obligation de présenter, dans un délai bref, un taux de 25 % de logements sociaux sur l'ensemble de leur parc.

Or ces communes sont confrontées à un dilemme que personne, jusqu'à aujourd'hui, n'a résolu, entre l'application, d'une part, de la loi SRU et, d'autre part, de toutes les dispositions de la charte des parcs naturels régionaux et de celles relatives à la protection de l'environnement et de la nature comprises dans – je pense notamment à la réglementation Natura 2000 ou à celle concernant les lisières de forêts. Ces communes se trouvent par conséquent dans l'impossibilité matérielle de construire des logements sans contrevenir à au moins une loi en vigueur, que celle-ci porte sur l'environnement ou sur les quotas de logements sociaux.

J'ai saisi à plusieurs reprises le Gouvernement sur le sujet, notamment à l'occasion de l'examen de plusieurs projets de loi de finances ou du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », en vue, non pas de dispenser ces communes de leur effort de construction – elles sont prêtes à l'assumer –, mais d'engager une mécanique dérogatoire, la bonne foi des maires ne pouvant être mise en doute compte tenu de l'impossibilité matérielle de construire des logements, dans laquelle ils se trouvent. Cette dérogation, permise par les textes, autoriserait les communes concernées à définir, dans le cadre d'une contractualisation avec l'État, un seuil maximum de logements inférieur aux 25 % prévus par la loi SRU.

Nous n'avons jusqu'à présent reçu aucune réponse, madame la secrétaire d'État. Ces communes qui, je le répète, se trouvent face à une impossibilité matérielle, voient toutefois leurs budgets ponctionnés de sommes importantes, au titre d'amendes. Le Gouvernement accepterait-il de fixer, pour les programmes nouveaux, l'obligation d'atteindre le taux de 25 % en termes de flux et non de stock ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des collectivités territoriales.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État chargée des collectivités territoriales. Monsieur le député, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence d'Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable.

Vous interrogez le Gouvernement à propos de la mise en œuvre de la loi SRU sur les territoires ruraux d'Île-de-France, plus particulièrement dans les communes comprises dans des zones protégées comme les parcs naturels régionaux.

Je tiens tout d'abord à souligner que, si la population de ce département connaît une faible croissance démographique, les Yvelines – vous souscrirez à cette remarque – n'en sont pas moins un territoire attractif, aux portes de Paris et proche des bassins d'emplois. D'ailleurs, la demande soutenue de logements sociaux le confirme : en rythme annuel, près de cinq demandes sont déposées pour une attribution dans le parc social.

Ce haut niveau de demande s'exprime évidemment dans les territoires agglomérés du département, mais pas seulement : dans la Haute Vallée de Chevreuse, 250 demandes étaient actives au début de l'année 2015 comme au terme de celle-ci. On peut considérer que le déficit d'offre de logements abordables s'explique pour partie par la faible croissance de la population du département, les ménages à faibles revenus se retrouvant de fait exclus du marché du logement.

Or, au-delà du fait que ce manque de logements abordables est un frein au développement des entreprises, qui peinent à loger leurs salariés à proximité de leur lieu de travail, il est surtout inacceptable, à l'heure où sont mobilisés des outils et des moyens importants en faveur à la fois du rayonnement de la région capitale et de la mixité sociale, que des territoires se situant à proximité de la zone agglomérée francilienne cherchent à s'exonérer de l'effort de solidarité nationale.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement veille à l'application rigoureuse de l'article 55 de la loi SRU : toutes les communes concernées par le dispositif, à proximité et dans les bassins de vie, doivent impérativement participer à la politique de mixité sociale, afin de permettre à tous nos concitoyens de se loger dans la commune de leur choix et dans des conditions abordables.

Je vous rappelle à cet égard que, si les parcs naturels régionaux ont vocation à assurer un développement harmonieux et maîtrisé de l'urbanisation – vous l’avez rappelé – afin de protéger la qualité patrimoniale et paysagère de ces territoires remarquables, d'une part, nos concitoyens les plus modestes n'ont pas à en être exclus et, d'autre part, le développement de l'offre sociale n'y signifie pas forcément construction neuve, consommation d'espace et développement de l'espace urbanisé. Les objectifs de rattrapage peuvent aussi être satisfaits par l'acquisition-amélioration de logements existants ou par la mobilisation du parc privé conventionné avec l'ANAH – Agence nationale de l'habitat. Ces modes de production, économes en espaces naturels et agricoles, permettent aussi d'utiliser à des fins sociales un parc vacant et de revitaliser des centre-bourgs.

Monsieur le député, au regard de la crise du logement traversée par notre pays et des difficultés toujours plus importantes rencontrées par nos concitoyens les plus fragiles pour accéder à un logement adapté à leurs revenus et à leur composition familiale, les communes des Yvelines doivent absolument poursuivre leur engagement en faveur du développement d'une offre de logements abordables et lutter ainsi contre les phénomènes de ségrégation spatiale, qui nuisent au vivre-ensemble et à la cohésion nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie pour votre réponse, mais elle a manifestement été rédigée dans un bureau parisien et son auteur ne s'est certainement pas déplacé dans les communes dont il parle.

Vous avez raison de souligner que les communes yvelinoises, y compris rurales, entendent bien poursuivre l'effort de construction de logements sociaux qu'elles ont entamé. Je vous répète toutefois qu'elles ne voient pas comment elles peuvent appliquer les réglementations en vigueur sans désobéir à au moins une loi. C'est pourquoi l'État devra leur indiquer à laquelle elles doivent de préférence désobéir.

De plus, pardonnez-moi, mais s'agit-il aujourd'hui de recommencer dans les communes rurales ce qui a été fait dans certaines communes urbaines il y plusieurs décennies, en implantant des logements sans moyens de transport, sans emploi local et sans possibilité de se déplacer de son domicile à son travail ? Si tel était le cas, il n'y aurait aucun intérêt à respecter l'article 55 de la loi SRU.