14ème législature

Question N° 1468
de M. Marc Le Fur (Les Républicains - Côtes-d'Armor )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > professions de santé

Tête d'analyse > médecins

Analyse > effectifs de la profession. répartition géographique.

Question publiée au JO le : 17/05/2016
Réponse publiée au JO le : 25/05/2016 page : 3547

Texte de la question

M. Marc Le Fur attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la désertification médicale en zone rurale et en particulier dans de nombreux territoires bretons. En effet, un certain nombre de zones rurales bretonnes mais aussi de villes moyennes connaissent une véritable pénurie de médecins, ce qui rend les délais d'attente pour pouvoir obtenir une consultation, particulièrement longs et pénibles pour nos concitoyens. La tendance actuelle, déjà particulièrement préoccupante, devient désormais alarmante. En Bretagne, la densité médicale s'élève à 8,6 pour 10 000 habitants et ce taux a diminué entre 2007 et 2016 de 7 %. Dans les Côtes d'Armor, cette densité affiche même un taux de 7,7 pour 10 000 habitants et a enregistré une baisse entre 2007 et 2016 de 13 %. Il lui demande de lui indiquer les mesures concrètes et précises mises en œuvre par le Gouvernement et celles que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour lutter contre cette désertification médicale.

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LA DÉSERTIFICATION MÉDICALE


Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour exposer sa question, n°  1468, relative à la lutte contre la désertification médicale.

M. Marc Le Fur. Madame la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie, je souhaite vous interroger à propos de la démographie médicale et me faire ici le relais des inquiétudes de la population et des élus.

Ce problème, qui, naguère, concernait essentiellement le monde rural, gagne désormais les villes petites et moyennes. Je prendrai des exemples très concrets. Loudéac et sa périphérie immédiate, en quelques mois, ont perdu dix médecins pour une arrivée et, à Lamballe, nous constatons le départ concomitant de six médecins. À Loudéac, 10 000 patients vont se retrouver sans médecin généraliste, ce qui est contraire aux règles de la Sécurité sociale. Il en sera de même à Lamballe.

Que faire ? Installer des maisons médicales ? Il en existe une à Loudéac, qui fonctionne bien et est appréciée des professionnels. C'est certainement une condition nécessaire mais pas une condition suffisante pour accueillir des médecins.

J'ai invité dans ma circonscription des représentants de l'Agence régionale de santé, l'ARS, que je remercie de s'être prêtés à l'exercice d'une réunion publique. Il n'empêche, au terme de celle-ci, chacun a pu constater, hélas, l'impuissance de l'État.

Alors, que font les élus ? Ils sollicitent des chasseurs de têtes, qui se font grassement payer pour aller rechercher des médecins hors de France. Déjà, en Côtes-d’Armor, il faut le savoir, plus de 50 % des médecins qui s'inscrivent sur le tableau de l'Ordre n'ont pas obtenu leur diplôme en France. Cette situation, à elle seule, devient inquiétante.

On assiste par ailleurs à une forme de mercato très désagréable : des villes moyennes vont chercher dans les petites villes voisines les médecins dont elles ont besoin. Tout cela crée des tensions tout à fait inutiles et contre-productives, chacun le comprendra.

Je n'attends pas du Gouvernement un diagnostic – il est fait et il est inquiétant. Je n'attends pas non plus des mesurettes – nous n'en sommes plus là. Ce que j'attends, ce sont des vraies mesures, à effet immédiat, de vraies solutions. Je sais que ce n'est pas simple. Il n'en demeure pas moins que, pour une bonne partie de nos compatriotes, c'est aujourd'hui la préoccupation majeure, il faut que vous le sachiez.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur Le Fur, améliorer l'accès aux soins et réduire les inégalités entre les territoires sont des objectifs prioritaires du Gouvernement. Le pacte territoire santé, lancé par Marisol Touraine fin 2012, mobilise différents leviers, de la formation aux conditions d'exercice, notamment pour attirer les jeunes médecins dans les territoires manquant de professionnels.

Le département des Côtes-d'Armor est effectivement confronté à une démographie médicale préoccupante, avec une densité médicale inférieure à la densité médicale moyenne observée en Bretagne. Néanmoins, grâce aux mesures du pacte, des résultats positifs ont été obtenus et nous pouvons être fiers de la dynamique à l'œuvre. Voici quelques exemples.

Les projets d'exercice coordonnés, au travers des maisons de santé pluriprofessionnelles, constituent un axe important de redynamisation des territoires : vingt-six maisons de santé sont actuellement accompagnées par l'ARS Bretagne, dont quinze sites fonctionnent et onze sont en cours de mise en place.

Chaque projet de santé intègre l'objectif, pour les médecins, d'accueillir des stagiaires en médecine.

Cinq contrats de praticien territorial de médecine générale ont été signés en Côtes-d’Armor. Ces contrats sécurisent les deux premières années d'installation des jeunes médecins en leur offrant garantie de ressources et protection sociale améliorée.

Neuf contrats d'engagement de service public ont également été signés par des étudiants en médecine ayant manifesté leur souhait d'installation dans le département.

De nombreuses communes du département ont participé à la manifestation organisée par l'ARS, en partenariat avec les facultés de médecine de Rennes et de Brest, pour favoriser l'installation des étudiants en médecine sur les territoires les plus en difficulté.

Enfin, le Gouvernement, lors du comité interministériel aux ruralités, qui s'est tenu vendredi dernier à Privas, a fixé de nouveaux objectifs ambitieux pour plusieurs dispositifs clés de sa politique : 2 100 contrats d'engagement de service public signés en 2017 et 2 550 en 2018 ; fin 2017, 1 200 maisons de santé pluriprofessionnelles, réparties sur tout le territoire, notamment dans les zones fragiles, et 1 400 en 2018.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je comprends bien que le Gouvernement ne puisse pas apporter de réponse à l'ensemble de nos questions.

S'agissant des internes tournés vers la médecine libérale, parfois dans le monde rural, je crois que les choses ont effectivement évolué positivement. Il se trouve que nous avons été parmi les premiers à accueillir ce type d'internes.

Quoi qu'il en soit, votre réponse, madame la secrétaire d'État, a surtout porté sur les maisons médicales. Or, pour l'essentiel, nous les avons déjà réalisées : dans les endroits où elles étaient nécessaires, elles existent. C'est une condition nécessaire, je veux bien l'admettre, et les médecins qui y travaillent sont relativement satisfaits. Il n'en demeure pas moins, ne nous leurrons pas, que cela ne suffira pas pour attirer de jeunes médecins. Il faut impérativement changer d'échelle, de façon à envisager toutes les possibilités, sans tabou, pour faire en sorte que la couverture médicale de notre pays, jusqu'à présent satisfaisante, le demeure.