procréation médicalement assistée
Question de :
M. Bernard Gérard
Nord (9e circonscription) - Les Républicains
M. Bernard Gérard interroge Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, sur les conséquences du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Ce projet de loi, qui vise à ouvrir le mariage et l'adoption et donc la filiation aux couples de personnes de même sexe, suscite de nombreuses interrogations juridiques, sociales et éthiques. Parmi ces interrogations se trouve celle d'une éventuelle modification des règles d'accès à la procréation médicalement assistée pour l'ouvrir aux couples de femmes. La majorité et le Gouvernement entretiennent le flou sur cette question pourtant cruciale qui nécessite une réflexion globale et approfondie au titre du respect des lois bioéthiques. En ouvrant la PMA, la loi organiserait la conception d'un enfant privé de père. L'ouverture de la PMA aux couples de même sexe entraînerait, en outre, une nouvelle interrogation à savoir la légalisation de la gestation pour autrui que les couples d'hommes pourraient réclamer au nom du principe d'égalité. Opposé à ces mécanismes qui consacreraient un droit à l'enfant, il lui demande de lui préciser clairement la position du Gouvernement à l'égard de l'ouverture de la PMA aux couples de même sexe.
Réponse en séance, et publiée le 27 février 2013
OUVERTURE DE LA PMA AUX COUPLES DE PERSONNES DE MÊME SEXE
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Gérard, pour exposer sa question, n° 146, relative à l'ouverture de la PMA aux couples de personnes de même sexe.M. Bernard Gérard. Madame la ministre déléguée chargée de la famille, notre Assemblée, après plusieurs semaines de débat, a adopté en première lecture le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. J'ai voté contre ce texte en raison de ses conséquences juridiques, sociales et éthiques qui me paraissent mal prises en compte et qui seront, me semble-t-il, difficiles à maîtriser.
Dès lors que le mariage est lié de manière automatique à l'adoption et à la filiation, vous modifiez en profondeur le socle même du droit de la famille et des règles relatives à la filiation.
Les Français sont divisés sur cet aspect. S'ils étaient prêts à accepter une alliance civile, ils sont par contre très réservés voire hostiles à l'ouverture de l'adoption et de la filiation. Si le texte venait à être adopté au Sénat, une des conséquences redoutées de cette réforme sera à plus ou moins long terme une modification des règles de la procréation médicalement assistée. Aujourd'hui réservée aux couples hétérosexuels stériles, la PMA pourrait, selon votre logique d'un égal accès à la famille, être étendue aux couples de femmes. Nos concitoyens nous interpellent et beaucoup craignent que vous mettiez en place un droit à l'enfant.
Nous vous demandons depuis le mois d'octobre des états généraux sur la famille et la saisine du Comité national d'éthique, et ce sans succès. Finalement, le Comité national d'éthique s'est saisi de cette question des règles d'accès à la PMA juste avant l'ouverture des débats. Les confusions au sein même du Gouvernement à ce sujet sont révélatrices du fait que cette question est loin de faire l'unanimité dans la majorité. En ouvrant la PMA aux couples de même sexe, la loi organiserait la conception d'un enfant privé de père. Cela n'est pas sans conséquences. Nous attendons, les Français attendent des réponses claires. Nos concitoyens nous interpellent dans nos circonscriptions.
Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous dire si le Gouvernement va soutenir l'ouverture de la PMA aux couples de même sexe ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille.
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille. Monsieur le député, vous le rappeliez à l'instant, le 12 février 2013 l'Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Les débats qui se sont déroulés au sein de cette Assemblée ont été denses. Ils ont permis d'enrichir le texte sur des points significatifs. À cet égard, permettez-moi de saluer le travail des députés.
Cependant, pour avoir suivi avec beaucoup d'attention l'ensemble de la discussion, vous avez pu remarquer que les deux tiers des débats ont porté sur des sujets que n'aborde pas le projet de loi, à savoir la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui.
Votre question me donne l'occasion de préciser à nouveau que la GPA n'est pas abordée dans ce texte et qu'elle ne le sera dans aucun projet de loi de ce Gouvernement. Le Président de la République comme le Premier ministre ont toujours été fermes et on ne peut plus clairs : la GPA est interdite et le restera, l'article 16-1 du code civil venant étayer cette position.
Quant à la PMA sur laquelle vous m'interpellez, le Premier ministre, et j'ai eu l'occasion de le rappeler au cours des débats à l'Assemblée nationale, a annoncé qu'un projet de loi sur la famille serait présenté devant le Parlement au mois de décembre prochain. La finalité de ce texte est à la fois de reconnaître la diversité des modèles familiaux actuels, de s'adresser indifféremment à toutes les familles, quelle que soit l'orientation sexuelle des parents, de traiter des nouvelles filiations et des nouvelles parentalités, ainsi que de la capacité de l'enfant à connaître son histoire originelle. C'est effectivement dans le cadre de ce texte que la procréation médicalement assistée sera abordée.
Vous l'avez dit vous-même, le Comité consultatif national d'éthique s'est saisi de cette question. Il devrait rendre son avis d'ici le mois d'octobre 2013 et le Gouvernement attendra cet avis pour déposer son projet de loi.
Pour mémoire, monsieur le député, la question de la PMA n'est quand même pas une question nouvelle. La PMA est aujourd'hui ouverte, vous l'avez vous-même rappelé, aux couples hétérosexuels infertiles ou risquant de transmettre une maladie héréditaire grave. Dès lors, j'attire votre attention sur ce point, certains enfants sont dès à présent élevés par un parent biologique et par un parent non biologique lorsqu'ils ont été conçus par insémination artificielle avec donneur. Environ mille cinq cents enfants naissent chaque année en France par insémination artificielle.
Par ailleurs, le développement de la procréation médicalement assistée est un processus ancien. C'est en 1973 qu'ont été créés les CECOS. C'est en 1982 qu'a eu lieu la première fécondation in vitro. C'est en 1994 que les premières lois de bioéthique ont défini l'assistance médicale à la procréation. On ne peut donc pas dire qu'on découvre le processus de procréation médicalement assistée et ses implications.
Enfin, vous n'êtes pas sans savoir que quarante mille à trois cent mille enfants vivent aujourd'hui dans des familles homoparentales. Certes tous ces enfants n'ont pas été conçus par insémination artificielle avec donneur, mais certains d'entre eux l'ont été, puisque la Belgique et l'Espagne ont ouvert depuis plusieurs années la PMA aux couples de femmes, à deux heures de notre pays.
Je suis sûre que, fort de ces éclairages, vous saurez mener un combat digne et utile à la société. J'espère avoir répondu à vos interrogations.
Auteur : M. Bernard Gérard
Type de question : Question orale
Rubrique : Assurance maladie maternité : prestations
Ministère interrogé : Famille
Ministère répondant : Famille
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 février 2013