crimes et délits
Question de :
M. Patrice Carvalho
Oise (6e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la nécessité de renforcer encore l'efficacité du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Celui-ci a été créé par la loi Guigou du 18 juin 1998. Il concernait alors les personnes condamnées dans des délits à caractère sexuel. Entre 2001 et 2007, six lois en ont élargi le champ à la quasi-totalité des délits. En 2011, le FNAEG comptait 1,75 millions d'empreintes. Depuis sa création, il aura permis le rapprochement de 111 002 profils. Grâce à lui des auteurs de crimes ont pu être identifiés. Il en est ainsi, en Picardie, de l'assassin d'Angélique à Compiègne (60) et de celui d'Élodie près de Péronne (80). Dans le premier cas, le meurtrier a été identifié 14 ans après, suite à l'assassinat de son épouse et à son suicide. Dans le second cas, 10 ans auront été nécessaires pour confondre l'auteur grâce à une première en France avec le recours à une technique basée sur l'ADN nucléaire. Malheureusement, l'assassin a été tué dans un accident de voiture peu de temps après son crime. Il demeure que l'assassin d'Angélique aurait pu être identifié plus tôt et vivant s'il avait fait l'objet d'un prélèvement ADN lors d'un délit routier dont il s'était rendu coupable. Mais il se trouve que deux types de délits ne figurent pas parmi les critères d'inscription au FNAEG : les délits routiers et les délits financiers. Cette situation est pour le moins paradoxale quand nous savons que des syndicalistes, eux, ont été sommés de se soumettre à des prélèvements suite à des actions destinées à défendre leur emploi. Le dossier Angélique montre que l'identification d'un délit routier peut conduire à confondre un meurtrier et que, par ailleurs, la délinquance financière porte sur un objet qui constitue un mobile fréquent de faits plus graves. Le député souhaite donc savoir si M. le ministre est prêt à élargir le FNAEG à ces deux types de délits.
Réponse publiée le 2 avril 2013
Créé par la loi Guigou du 18 juin 1998, le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) était destiné à recueillir les empreintes génétiques des personnes impliquées dans les infractions à caractère sexuel. Le FNAEG a été ensuite étendu par des lois successives (loi sur la sécurité quotidienne de 2001, loi pour la sécurité intérieure de 2003, loi Perben II, etc.) à de nombreux autres crimes et délits, et a été ainsi détourné de sa vocation initiale. Aux termes de l'article 706-55 du code de procédure pénale, le FNAEG centralise aujourd'hui les traces et empreintes génétiques concernant des infractions de nature sexuelle, les crimes contre l'humanité, les crimes et délits d'atteintes volontaires à la vie de la personne, de torture et actes de barbarie, de violences volontaires, de menaces d'atteintes aux personnes, de trafic de stupéfiants, d'atteintes aux libertés de la personne, de traite des êtres humains, de proxénétisme, d'exploitation de la mendicité et de mise en péril des mineurs, les crimes et délits de vols, d'extorsions, d'escroqueries, de destructions, de dégradations, de détériorations et de menaces d'atteintes aux biens, les atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation, les actes de terrorisme, la fausse monnaie, l'association de malfaiteurs, certaines infractions à la législation sur les armes et explosifs et les infractions de recel ou de blanchiment du produit de l'une des infractions. Elargir cette liste, jugée par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2010-25 QPC du 16 septembre 2010 (considérant n° 22), à d'autres délits tels que les infractions au code de la route, risquerait de soumettre les personnes concernées à une rigueur qui ne serait pas nécessaire au regard de la nature des faits commis. En effet, le Conseil constitutionnel a rappelé, dans la décision susvisée (considérant n° 11), qu'il appartenait « au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d'autre part, la protection des droits et libertés constitutionnellement garantis, au nombre desquels figurent le respect de la vie privée, protégé par l'article 2 de la Déclaration de 1789, le respect de la présomption d'innocence, le principe de dignité de la personne humaine, ainsi que la liberté individuelle que l'article 66 place sous la protection de l'autorité judiciaire ». Il a en outre indiqué que si le législateur pouvait « prévoir des mesures d'investigation spéciales en vue de constater des crimes et délits d'une gravité et d'une complexité particulières, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs, c'était sous réserve que [...] les restrictions qu'elles apportent aux droits et libertés constitutionnellement garantis soient nécessaires à la manifestation de la vérité, proportionnées à la gravité et à la complexité des infractions commises [...] ».
Auteur : M. Patrice Carvalho
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 1er janvier 2013
Réponse publiée le 2 avril 2013