14ème législature

Question N° 1504
de M. Yann Capet (Socialiste, écologiste et républicain - Pas-de-Calais )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Environnement, énergie et mer
Ministère attributaire > Environnement, énergie et mer

Rubrique > animaux

Tête d'analyse > nuisibles

Analyse > rat musqué. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 07/06/2016
Réponse publiée au JO le : 16/06/2016 page : 4299

Texte de la question

M. Yann Capet attire l'attention de Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat sur la lutte contre la prolifération du rat musqué. Cet animal classé parmi les organismes nuisibles, présent massivement dans le Nord de la France et notamment sur le territoire du delta de l'Aa, cause de nombreux dégâts sur les cours d'eau et détériore les routes, les berges et les cultures attenantes générant des coûts pour leurs réparations. De plus le rat musqué peut transmettre à l'homme une maladie infectieuse dangereuse : la leptospirose. Depuis l'interdiction de la lutte chimique en 2009, seul le piégeage mécanique est utilisé entraînant une invasion exponentielle du rat musqué. Il aimerait connaître les moyens de lutte alternatifs et les moyens financiers pouvant être mobilisés par l'État mais également les pistes de réflexion à engager pour définir une stratégie de territoire cohérente de lutte contre la prolifération de cette espèce nuisible.

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LA PROLIFÉRATION DES RATS MUSQUÉS


M. le président. La parole est à M. Yann Capet, pour exposer sa question, n°  1504, relative à la lutte contre la prolifération des rats musqués.

M. Yann Capet. Le rat musqué, présent massivement dans le nord de la France et notamment dans le delta de l'Aa et dans le Calaisis, est classé parmi les espèces nuisibles et invasives. Il cause de nombreux dégâts en raison des terriers et galeries qu'il creuse dans les berges. Les conséquences sont multiples : effondrement de chemins ou de routes, dégâts aux cultures, effondrement des watergangs qui jouent un rôle majeur dans la gestion des inondations. Les rats musqués présentent également un risque sanitaire, car ils peuvent transmettre à l'homme la leptospirose.

L'évolution de la réglementation, avec l'abandon du piégeage chimique, a rendu plus difficile la régulation de cette espèce, malgré le travail acharné des piégeurs, souvent bénévoles. Aujourd'hui, seul le piégeage mécanique subsiste et les rats musqués, qui n'ont pas de prédateurs naturels, n'ont jamais été aussi nombreux, en zone rurale comme en zone urbaine.

Ainsi, pour le seul groupement intercommunal de défense contre les organismes nuisibles, accompagné par la communauté de communes de la région d'Audruicq, ce ne sont pas moins de 18 683 prises qui ont été enregistrées pour la seule année 2015, contre 13 872 en 2013. Cela représente un coût important pour les collectivités : plus de 100 000 euros en 2015 pour la seule communauté de communes de la région d'Audruicq, sans parler des dépenses engagées pour réparer les dégâts causés.

Cette prise en charge de la lutte contre le rat musqué est inégale selon les collectivités, alors qu'une coordination est indispensable à l'échelle des territoires de référence comme le delta de l'Aa. On sait en effet que la lutte sur un point du territoire, si elle n'est pas prolongée sur les territoires voisins, ne freine pas la prolifération, cette espèce nuisible ne s'arrêtant évidemment pas aux frontières administratives. Il est donc impératif que la lutte contre la prolifération du rat musqué soit gérée de manière plus cohérente et plus solidaire entre les territoires concernés.

Les intercommunalités, et plus largement les collectivités, doivent jouer un rôle et se structurer aux échelles adaptées afin de lutter efficacement contre ce fléau. Mais cela ne peut effacer l'indispensable solidarité nationale. Je souhaite donc savoir comment l’État compte accompagner les collectivités qui assument seules la lutte contre les rats musqués ainsi que la réparation des dégâts causés.

À terme, l'objectif pourrait être de développer cette compétence dans le prolongement de celle relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations – GEMAPI –, ce qui n'efface en rien, au contraire, la nécessité que l'État soit pleinement solidaire de cette démarche.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député, vous avez interrogé Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ainsi que des relations internationales sur le climat. Elle ne peut être présente ce matin et m'a chargé de vous répondre.

Vous l'avez dit, le rat musqué est une espèce essentiellement aquatique, exotique, envahissante, susceptible d'occasionner des dommages non seulement aux activités humaines mais, aussi, à la faune, à la flore autochtones des cours d'eau ou des zones humides en creusant des galeries dans les berges. Le montant des dommages non indemnisés est de fait très difficile à estimer.

Les rats musqués sont actuellement classés comme espèce nuisible sur l'ensemble du territoire métropolitain et peuvent faire l'objet d'une pression de destruction élevée. Ils peuvent être piégés toute l'année en tout lieu, détruits à tir et déterrés avec ou sans chien, en particulier dans le Nord et le Pas-de-Calais.

Dans ce contexte, l'État n'est pas fondé à intervenir et ne participe pas au financement des opérations de destruction ni à l'indemnisation des particuliers ou des collectivités pour les dommages que cette espèce pourrait provoquer.

L'arrêté ministériel du 30 juin 2015 relatif au classement et aux modalités de destruction des espèces nuisibles non indigènes renforce le dispositif de régulation dans lequel les piégeurs agréés ont toute leur place. Ce droit de destruction est donné aux propriétaires ou fermiers et peut être délégué gratuitement aux chasseurs ou aux piégeurs agréés – nombreux dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais.

De plus, le rat musqué est une espèce de gibier dont la chasse est autorisée, de l'ouverture à la clôture générale, y compris en temps de neige, sur l'ensemble du territoire métropolitain. Les piégeurs peuvent également intervenir dans le cadre d'opérations ciblées de destructions administratives ordonnées par les préfets ou les maires, de jour comme de nuit, toute l'année.

La destruction à tir ou par piégeage est également autorisée toute l'année pour les propriétaires ou fermiers en cas de dégâts avérés ou imminents conformément à l'article 427-9 du code de l'environnement, qui intègre cette espèce dans sa jurisprudence.

Enfin, les lieutenants de louveterie, auxiliaires bénévoles du service public de l'État, de même que les fédérations départementales des groupements de défense contre les organismes nuisibles et les syndicats professionnels agricoles chargés de l'organisation de la lutte collective contre le ragondin et le rat musqué peuvent aussi être mis à contribution pour lutter contre la propagation du rat musqué.

M. le président. La parole est à M. Yann Capet.

M. Yann Capet. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Je souhaite néanmoins que l'on envisage la question de l'intégration de cette compétence à celle en matière de GEMAPI car, nous le savons, les territoires ne sont pas en l'occurrence égaux, certains étant plus concernés et plus touchés que d'autres.

Dans ce territoire de polders que sont le delta de l'Aa et le Pas-de-Calais, qui doivent déjà lutter contre le risque d'inondations et de submersions marines – notre vaste littoral est en effet menacé par les risques d'érosion et de submersion –, la lutte contre les espèces nuisibles et le rat musqué est bien sûr d'une tout autre ampleur que dans d'autres parties du territoire national. Ce cumul de difficultés me semble devoir appeler une forme de solidarité nationale.