Question orale n° 1509 :
PLU

14e Législature

Question de : Mme Annick Le Loch
Finistère (7e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Annick Le Loch attire l'attention de Mme la ministre du logement et de l'habitat durable sur les attentes du mouvement connu sous l'appellation des « PLUmés », au sujet du déclassement de certains terrains en Finistère. Leurs interrogations portent sur la constructibilité des espaces intermédiaires, non construits et entourés de parcelles bâties dans les hameaux, espaces communément appelés « dents creuses ». La loi « Littoral » protège la beauté de nos côtes et la loi « ALUR » préserve nos terres agricoles. Toutefois, face au cadre juridique complexe et insécurisant, à une incompréhension grandissante, notamment des maires, une clarification s'impose. Il conviendrait de sécuriser la caractérisation réglementaire des « dents creuses » sans porter préjudice à la préservation du littoral, ni au développement agricole, mais en prenant en considération les spécificités territoriales de la Bretagne. Aussi, elle lui demande de lui préciser ses intentions permettant des évolutions en la matière.

Réponse en séance, et publiée le 16 juin 2016

CONSTRUCTIBILITÉ DES ESPACES INTERMÉDIAIRES SUR LE LITTORAL
M. le président. La parole est à Mme Annick Le Loch, pour exposer sa question, n°  1509, relative à la constructibilité des espaces intermédiaires sur le littoral.

Mme Annick Le Loch. Madame la ministre, j'appelle votre attention sur la complexité, parfois même l'incohérence de l'application conjointe de la loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi littoral, et de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR. Des problèmes se posent notamment à propos de la constructibilité des espaces intermédiaires non construits et entourés de parcelles bâties dans les hameaux, espaces communément appelés « dents creuses ».

La loi littoral protège nos côtes et notre environnement, la loi ALUR préserve nos terres agricoles et naturelles : nous y tenons beaucoup. Mais leur application combinée pose des problèmes aux maires en matière d'urbanisme, et pénalise certains propriétaires, dont les terrains sont déclassés. Face à la complexité et à l'instabilité de ce cadre juridique, il est indispensable, et même urgent, de procéder à une clarification.

Il s'agit notamment de définir la notion de « hameau », ces groupes d'habitations rurales qui caractérisent la Bretagne, et auxquels fait référence la loi littoral. Cette demande n'est pas nouvelle, madame la ministre, mais jusqu'ici les réponses ministérielles ne nous ont pas donné les précisions souhaitées. Que la commune littorale soit dotée de documents d'urbanisme récents ou non ne change rien au problème de la constructibilité des « dents creuses ». De nombreux propriétaires se trouvent ainsi confrontés au déclassement de leurs parcelles, qui étaient hier urbanisables et sont aujourd'hui inconstructibles. Par ailleurs, les collectivités territoriales se trouvent particulièrement exposées à des risques de contentieux coûteux et fréquents.

La loi ALUR vise à densifier l'urbanisation ; or il n'est pas permis d'urbaniser, dans les communes littorales, les parcelles non construites entourées de parcelles bâties. Ne convient-il pas, compte tenu de cette situation, de mieux caractériser juridiquement les « dents creuses » ? Comment concevoir, en effet, un aménagement équilibré et harmonieux du territoire sans tenir compte de l'organisation historique locale du cadre bâti ?

La question de l'application de la loi littoral aux « dents creuses » appelle d'autres questions. Je profite de votre présence ici ce matin pour évoquer l'une d'elles : le périmètre concerné, calqué actuellement sur les limites des communes. En effet, toutes les communes estuariennes sont concernées par la loi littoral, sur la totalité de leur territoire. Or la loi du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle prévoit que la loi littoral ne s'applique pas à l'intégralité du territoire d'une commune nouvelle, si l'une des anciennes communes n'était pas une commune littorale. N'y a-t-il pas, là aussi, une certaine incohérence ? Il faudrait, à mon sens, revoir le périmètre concerné, à partir d'un critère tel que la distance au rivage.

Vous l'aurez compris, madame la ministre, je ne remets aucunement en cause ces lois ; mais n'est-il pas temps de lancer ce chantier ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre du logement et de l’habitat durable.

Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable. Je vous remercie, madame la députée. Ce n'est pas la première fois, en effet, que des députés bretons interrogent, de façon très précise, le Gouvernement sur ce point. Du fait de l'application conjointe de la loi littoral et de la loi ALUR, certains terrains que l'on pensait urbanisables ne le sont pas, ce qui pénalise leurs propriétaires.

La loi ALUR visait, entre autres, à réduire au maximum le recours aux STECAL – secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées –, qui ne subsisteraient plus qu'à titre exceptionnel. Les PLU – plans locaux d'urbanisme – doivent donc être mis en conformité avec la loi ALUR sur ce sujet. La formule des STECAL avait permis de rendre constructibles certains terrains, qualifiés de « dents creuses ». Mais la mise en conformité des PLU est également liée à la refonte de la carte de l'intercommunalité. C'est là que des difficultés peuvent se poser.

Par ailleurs, des difficultés se posent quant à l'application de certaines dispositions de la loi littoral. Il semble particulièrement difficile de se mettre d'accord sur la définition de la notion de hameau. Il faudrait, en effet, trouver une définition unique pour l'ensemble des départements bretons. J'ai été sollicitée sur ce point par des députés, mais aussi des sénateurs. Je vous proposerai donc, dans les prochains jours, de participer à une réunion de travail, afin de confronter les expériences. Je verrai ensuite quelles instructions je donnerai aux services déconcentrés. Il est en effet nécessaire de travailler sur cette question spécifique, afin de rendre la situation plus stable et le statut des terrains concernés plus clair, pour les élus locaux et les propriétaires.

Nous voulons par ailleurs donner toute sa place, dans cette tâche, au réseau de travail littoral et urbanisme. Ce réseau, animé par le ministère du logement, a pour vocation non seulement de faire vivre les principes de la loi littoral, mais aussi d'envisager la suite. De nombreuses questions se posent, en effet : celle de la constructibilité, que vous avez évoquée, mais aussi celle de l'évolution du trait de côte, du fait de l'érosion du littoral, et de ses conséquences sur le statut des terrains. Sur tous ces aspects, il me semble que nous devons travailler à une plus grande stabilité.

J'espère qu'au terme de ce travail que nous allons mener dans les prochaines semaines, je pourrai vous donner des réponses satisfaisantes et surtout solides d'un point de vue juridique.

Mme Annick Le Loch. Merci, madame la ministre.

Données clés

Auteur : Mme Annick Le Loch

Type de question : Question orale

Rubrique : Urbanisme

Ministère interrogé : Logement et habitat durable

Ministère répondant : Logement et habitat durable

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 juin 2016

partager