14ème législature

Question N° 1519
de M. Camille de Rocca Serra (Les Républicains - Corse-du-Sud )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Environnement, énergie et mer
Ministère attributaire > Environnement, énergie et mer

Rubrique > animaux

Tête d'analyse > protection

Analyse > cerf de Corse. sous-espèce. reconnaissance.

Question publiée au JO le : 22/11/2016
Réponse publiée au JO le : 30/11/2016 page : 7998

Texte de la question

M. Camille de Rocca Serra interroge Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat sur la reconnaissance par l'État de la sous-espèce du cerf de Corse. Il rappelle qu'après sa disparition en 1969, le cerf de Corse avait été réintroduit à l'état sauvage par lâchers successifs à partir de 1998. En 2015, la population des cerfs a été estimée par le parc naturel régional entre 1 200 et 1 300 individus. Le programme de réintroduction a donc été un vrai succès. En Corse, l'espèce est bien entendu protégée au niveau communautaire et il est interdit de la chasser. Il n'y a donc pas de raison fondée à ce que les fédérations de chasseurs s'acquittent du paiement d'amendes liées aux dégâts d'animaux sur l'espace agricole. En effet, les chasseurs n'ont pas le droit de tuer les cerfs mais on leur reproche simultanément de ne pas les abattre. Le problème juridique réside dans le fait que, contrairement aux instances européennes, l'État n'a jamais reconnu la sous-espèce du cerf de Corse. Le vide juridique suscité par cette situation crée des crispations alors même qu'est en cours d'élaboration le plan de gestion de l'espèce par le parc naturel régional. Ce plan que devra élaborer et mettre en œuvre le parc naturel régional exige, pour être efficace et compter sur tous les partenaires potentiels parmi lesquelles les fédérations de chasseurs, que l'espèce concernée puisse disposer d'un véritable statut. Il lui demande d'engager les procédures visant à reconnaître le cerf corse et de parvenir ainsi à une mise en conformité et à une adéquation du droit national avec le droit européen.

Texte de la réponse

RECONNAISSANCE DE LA SOUS-ESPÈCE DE CERF DE CORSE


Mme la présidente. La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour exposer sa question, n°  1519, relative à la reconnaissance de la sous-espèce de cerf de Corse.

M. Camille de Rocca Serra. Ma question s'adresse à Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.

Alors qu'il avait disparu depuis 1969, le cerf de Corse, espèce endémique commune à notre île et à la Sardaigne, a été réintroduit à l'état sauvage par lâchers successifs à partir de 1998. En 2015, le parc naturel régional de Corse a établi un recensement qui estime la population de cerfs entre 1 200 et 1 300 individus. Le programme de réintroduction a donc été un vrai succès.

La préservation du cerf s'est inscrite dans une démarche coopérative avec la Sardaigne. En 2012, la mission de réintroduction a été étayée par le programme européen LIFEqui représente une enveloppe de 2 millions d'euros sur cinq ans.

Les objectifs initiaux ayant été atteints, l'on s'oriente vers un plan de gestion de l'espèce en lieu et place des opérations de lâchers que l'on connaît depuis une vingtaine d'années. Le cerf a progressivement retrouvé son habitat naturel, causant quelques dégâts aux espaces agricoles.

Sur le continent, ce type de désagrément est à la charge des fédérations de chasseurs, qui doivent assurer une régulation par la chasse. Or en Corse l'espèce est bien entendu protégée au niveau communautaire : il est interdit de la chasser. Il n'y a donc pas de raison à ce que les fédérations de chasseurs s'acquittent du paiement d'amendes. En effet, ces amendes sont liées aux dégâts causés par des animaux qu'ils n'ont pas le droit de chasser : on ne peut leur reprocher de ne pas les abattre !

Le problème juridique réside dans le fait que, contrairement aux instances européennes, l'État n'a jamais reconnu la sous-espèce de cerf de Corse. Le vide juridique causé par cette situation crée des crispations alors même qu'est en cours d'élaboration le plan de gestion de l'espèce.

Ce plan sera élaboré et mis en œuvre par le parc naturel régional. Pour qu'il soit efficace, il faudra compter sur tous les partenaires potentiels, parmi lesquelles les fédérations de chasseurs ; il faudra aussi que l'espèce concernée dispose d'un véritable statut. C'est pourquoi je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, d'engager les procédures visant à reconnaître le cerf corse afin de parvenir à une mise en conformité et à une adéquation du droit national avec le droit européen.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, vous appelez l'attention de Mme la ministre de l'environnement sur le statut du cerf élaphe de Corse et sur l'indemnisation des dégâts agricoles provoqués par cette sous-espèce, qui a un statut particulier dans cette région.

En effet ce grand gibier est classé juridiquement comme espèce chassable mais le plan de chasse pour cette espèce est fixé à zéro en Haute-Corse comme en Corse-du-Sud. Ceci permet de tenir compte du statut européen de protection de la sous-espèce corse du cerf élaphe, inscrite à l'annexe II de la Convention de Berne et aux annexes II et IV de la directive européenne du 21 mai 1992 « habitats-faune-flore ».

Ce statut de protection européen n'interdit pas toutefois la régulation des populations si celles-ci provoquent des dommages ou des déséquilibres dans l'écosystème où elles se trouvent. La gestion des populations de cerfs élaphes, si elle s'avère nécessaire, est possible dans le parc naturel régional dès lors qu'elle s'appuie sur un dispositif de régulations administratives ciblées, de manière à revenir à une situation d'équilibre satisfaisante. Ces opérations sont ordonnées par le préfet dans chaque département en application de l'article L. 427-6 du code de l'environnement, actualisé par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

Il n'est pas opportun de solliciter les fédérations départementales des chasseurs de Corse pour indemniser les dégâts agricoles dus aux cerfs élaphes, puisque leur chasse n'est concrètement pas possible. La ministre de l'environnement demande qu'aucun paiement d'amendes liées aux dégâts d'animaux sur l'espace agricole ne soit réclamé.

Dans ce contexte, il convient en priorité de rechercher localement les solutions adéquates pour protéger les parcelles culturales et les vergers exposés aux déprédations des cerfs élaphes en Haute-Corse et d'intégrer ces mesures préventives dans la réflexion associée à la régulation ciblée des effectifs, si cette dernière s'avérait nécessaire. Dans la mesure où la France tient compte du statut de protection européen du cerf élaphe, il n'y a donc pas de vide juridique, ni pour le statut de cette espèce et ni pour sa gestion en Corse.

Mme la présidente. La parole est à M. Camille de Rocca Serra.

M. Camille de Rocca Serra. Il faut éviter d'être en contradiction avec le droit communautaire, étant donné que les cerfs corses ont pu bénéficier du plan européen LIFE. Je prends bonne note de la réponse de M. le secrétaire d'État, et j'espère qu'elle est conforme au droit communautaire.