Question orale n° 1543 :
La Poste

14e Législature

Question de : M. Jean-Patrick Gille
Indre-et-Loire (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Jean-Patrick Gille attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'avenir du service public postal. À l'issue des premières discussions entre l'État, La Poste et l'Association des maires de France sur le contrat tripartite de présence postale territoriale pour 2017-2020, les représentants de l'Association des maires de France ont fait savoir qu'ils refusaient de signer le contrat en l'état. Ces derniers dénoncent les nombreuses fermetures de bureaux, en milieu rural comme en milieu urbain, et la charge financière qui pèse sur leurs épaules. Car si La Poste doit prendre en compte les évolutions dues aux nouvelles technologies, cette modernisation ne peut se faire au détriment des usagers, en particulier les plus fragiles. Les maires dénoncent également que le texte ne prévoit plus de solliciter l'accord préalable du conseil municipal pour les transformations ou fermetures de bureaux de poste. Aussi, il lui demande de bien vouloir indiquer si le Gouvernement envisage de prendre en considération les revendications des maires de France.

Réponse en séance, et publiée le 30 novembre 2016

AVENIR DU SERVICE PUBLIC POSTAL
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour exposer sa question, n°  1543, relative à l'avenir du service public postal.

M. Jean-Patrick Gille. Madame la secrétaire d'État chargée du numérique, alors que La Poste a dégagé un excédent de 635 millions d'euros en 2015, je voudrais vous interroger sur l'avenir du service public postal.

Comme dans plusieurs villes du pays, dans ma circonscription, à Tours, nous avons appris du jour au lendemain, dans la presse locale, que La Poste allait fermer quatre agences postales dans les prochaines semaines et que trois autres étaient menacées. Devant la mobilisation des habitants, La Poste a daigné organiser des réunions d'information dans chacun des quartiers concernés, mais tout en précisant que la fermeture des agences était irréversible. Étrange façon d'organiser la concertation !

Bien sûr, les représentants de La Poste que je rencontre ne parlent pas de fermetures, mais de transformations en relais postaux. Cependant, lors des réunions publiques, les habitants soulèvent des problèmes simples que La Poste n'a pas toujours anticipés. En transférant par exemple un bureau de poste dans un bar-tabac, comment garantir l'accès des personnes handicapées ? Peut-on envoyer ses enfants et petits-enfants dans un bar-tabac ? Que faire quand le buraliste est parti en vacances ? Quid des retraits par procuration ? Et que penser de la disparition de certains distributeurs automatiques de billets, au mépris du bon sens ?

Madame la secrétaire d'État, les Français sont attachés à la poste comme à leurs services publics. Dans un village comme en centre-ville, un bureau de poste est comme une mairie ou une école : c'est un patrimoine qui appartient à tous les Français, un patrimoine commun qui s'appelle tout simplement la République.

Si nous comprenons la nécessité pour La Poste de s'adapter aux évolutions liées à internet, au numérique et à un marché désormais concurrentiel depuis que le gouvernement de François Fillon a modifié le statut de l'entreprise en 2010, nous ne pouvons accepter que cette modernisation se fasse au détriment des usagers, en particulier des plus fragiles, transformés en clients et en consommateurs.

Aussi, madame la secrétaire d'État, ne pourrait-on pas inscrire dans le contrat de présence postale l'obligation d'une concertation préalable avec les municipalités et les habitants concernés avant toute opération de transformation d'un bureau de poste, comme c'est le cas aujourd'hui dans les zones rurales ? Dans l'attente de cette décision, le Gouvernement pourrait-il demander à La Poste de suspendre son offensive de réduction par deux des bureaux de poste dans les villes ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du numérique et de l'innovation.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État chargée du numérique et de l'innovation. Monsieur le député, la loi du 2 juillet 1990 prévoit que le réseau de La Poste doit compter au moins 17 000 points de contact sur le territoire et que 90 % de la population de chaque département doit être éloignée de moins de cinq kilomètres et de moins de vingt minutes de trajet automobile des points de contact de La Poste les plus proches. Le Gouvernement veille attentivement au respect par La Poste de ces obligations légales. Dans cette phase de transformation numérique que traverse un groupe comme La Poste, il est attentif à ce que soient trouvées des solutions équilibrées permettant de pérenniser la présence postale sur l'ensemble du territoire.

Cela repose sur trois exigences.

Tout d'abord, La Poste doit pouvoir faire évoluer son réseau, dans le respect de la loi, car elle n'a pas d'autre choix face à la décroissance objective du volume du courrier, en baisse de 6 % par an, et à la diminution très réelle de la fréquentation des bureaux de poste. En effet, nos concitoyens envoient de moins en moins de courrier et réalisent de plus en plus de démarches par internet. C'est d'ailleurs le souhait qu'ils expriment le plus généralement.

Par ailleurs, l'évolution du réseau doit se faire au bénéfice des usagers, en adaptant les points de contact à l'évolution des modes de vie et de consommation des clients.

L'État et La Poste ont conclu un partenariat pour ouvrir 500 maisons de services au public dans les bureaux de poste en zone rurale et de montagne d'ici la fin de cette année. Dans un point d'accès unique, les usagers auront ainsi accès à toute une palette de services publics : outre les services postaux et bancaires, ils pourront solliciter des représentants de Pôle Emploi par exemple.

Dans les zones urbaines comme dans votre ville de Tours, la transformation de points de contact en « relais poste urbains », ouverts par exemple dans des supermarchés, permet aux usagers de bénéficier d'horaires d'ouverture élargis. C'est le cas pour les deux points de contact déjà transformés à Tours : le relais poste urbain de Sainte-Radegonde est ouvert soixante-treize heures et trente minutes par semaine, contre vingt-sept heures en moyenne pour un bureau de poste, et celui de Rochepinard est ouvert cinquante heures par semaine, contre douze heures pour l'ancien bureau de poste.

La Poste met en œuvre des solutions concrètes, en lien avec l'État et les maires, pour pérenniser la présence postale territoriale en dépit de la situation économique dont je vous ai parlé.

Enfin, le Gouvernement est attaché à ce que ces évolutions se construisent dans le dialogue et en concertation avec les municipalités concernées. À ce titre, vos demandes sont tout à fait légitimes : les élus locaux ont un rôle central à jouer, avec La Poste, dans les évolutions en cours. C'est pourquoi, avant toute évolution en zone urbaine, La Poste partage avec les communes un dossier de synthèse des évolutions envisagées et conduit un dialogue avec elles. C'est ce qui a été fait à Tours, où les échanges avec la mairie ont commencé dès le début de cette année. Les dossiers de synthèse ont été remis en mars dernier. Ce dialogue doit naturellement être poursuivi et approfondi avant toute nouvelle évolution de points de contact à Tours.

Pour conclure, monsieur le député, le prochain contrat de présence postale, en cours de discussion entre l'État, La Poste et l'Association des maires de France, sera l'occasion de poser cette question sur la table et de rappeler la nécessité d'une concertation préalable, en bonne intelligence, entre La Poste et les municipalités concernées. Le Gouvernement vous est redevable d'avoir souligné l'importance de cette question.

Données clés

Auteur : M. Jean-Patrick Gille

Type de question : Question orale

Rubrique : Postes

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 novembre 2016

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