14ème législature

Question N° 1558
de M. Julien Dive (Les Républicains - Aisne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > professions de santé

Tête d'analyse > médecins

Analyse > effectifs de la profession. répartition géographique.

Question publiée au JO le : 06/12/2016
Réponse publiée au JO le : 14/12/2016 page : 8593

Texte de la question

M. Julien Dive alerte Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le déséquilibre de répartition des médecins sur le territoire français, qui pénalise majoritairement les zones rurales. Le vieillissement de la profession - un médecin généraliste sur 4 prend sa retraite sur la période 2007-2025 - pose le problème du renouvellement de la médecine de proximité, et sa nécessaire évolution dans les années à venir. C'est toute une génération de médecins qui part à la retraite sans avoir trouvé de remplaçant, sachant que les jeunes médecins ont désormais de nouvelles aspirations en termes d'équilibre entre vie professionnelle et personnelle, ou en termes de qualité de vie. La création des zones franches urbaines donnant accès à une exonération totale de charges sociales et fiscales pendant cinq ans, a fortement incité les professionnels de santé libéraux à y installer leur activité. Toutefois, ce succès s'est fait au détriment de la présence de médecins à la fois dans les villes de taille moyenne, et dans les territoires ruraux. Il demande si le Gouvernement peut constituer un système analogue de zones franches médicales rurales, afin que plus de médecins libéraux puissent s'installer en zone rurale. L'intérêt d'une telle approche est de respecter la liberté d'installation des futurs médecins, tout en améliorant la répartition des professionnels sur l'ensemble du territoire.

Texte de la réponse

DÉMOGRAPHIE MÉDICALE EN ZONES RURALES


M. le président. La parole est à M. Julien Dive, pour exposer sa question, n°  1558, relative à la démographie médicale en zones rurales.

M. Julien Dive. Madame la secrétaire d'État, deux mois, c'est le temps qu'il faut parfois attendre pour se faire soigner une molaire quand on habite dans le Saint-Quentinois. Pour une prise en charge similaire, on peut obtenir un rendez-vous en moins d'une semaine ici, à Paris. L'Aisne est de ce fait classée par le Conseil national de l'ordre des médecins parmi les départements à la plus faible densité médicale, avec pour 100 000 habitants 200 médecins contre 291 pour la densité moyenne nationale. Et pour ne rien arranger, entre 2007 et 2016, la population de l'Aisne a augmenté de 3,5 % tandis que le nombre de médecins actifs dans le département baissait de 7,6 %.

Comme vous pouvez le constater, le nombre de médecins demeure problématique pour certains territoires. La question n'est pas uniquement celle du numerus clausus, qui a doublé ces dix dernières années. L'enjeu est aussi celui de la répartition et du vieillissement de la population médicale. Dans le petit village rural de Lehaucourt, par exemple, le médecin de campagne qui a suivi parfois trois générations d'une même famille est parti à la retraite en laissant son cabinet vide, faute de repreneur. À l'échelle de la France, un médecin généraliste sur quatre prendra sa retraite dans les dix prochaines années ; en 2015, la moitié des généralistes avait entre 55 et 70 ans. Nous sommes donc clairement confrontés à un problème de non-compensation des départs à la retraite, qui se pose dès aujourd'hui et qui va perdurer.

En effet, c'est toute une génération de médecins qui part à la retraite sans avoir trouvé de remplaçant. La question qui se pose réellement est de savoir comment renouveler la médecine de proximité tout en respectant le souhait des nouveaux médecins de ne plus faire de l'exercice de leur profession un sacerdoce. Et ce phénomène touche non seulement le monde rural, mais aussi les villes moyennes, telles que Saint-Quentin, où un cabinet médical situé dans un ancien quartier industriel a fermé à la suite du départ en retraite de l'un des trois praticiens, laissant les deux autres dans l'embarras.

Je le concède, des dispositifs ont été mis en place, comme les zones de revitalisation rurale, mais celles-ci restent trop restreintes sur le plan géographique ; il conviendrait donc d'élargir leur périmètre. Il est temps également de songer à des mesures plus efficaces que l'incitation fiscale, telles que la revalorisation des actes, ou encore une aide apportée aux communautés de communes pour le regroupement de médecins dans des maisons médicales. Une telle approche a le mérite de respecter la liberté d'installation des futurs médecins tout en améliorant considérablement la répartition des professionnels sur l'ensemble du territoire.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le député, vous m'interrogez sur une question importante pour nos concitoyens, celle de l'accès aux soins dans les zones rurales.

Comme vous le dites très justement, un nombre important de médecins partiront à la retraite très prochainement, et cette tendance est appelée à s'aggraver dans les années à venir. Je regrette toutefois que vous ayez ramené le problème de l'accès aux soins à une simple ségrégation entre zones rurales et zones urbaines, car celui-ci touche aujourd'hui des territoires extrêmement divers.

C'est pourquoi l'attribution des aides à l'installation se fait en fonction d'un zonage, c'est-à-dire d'une cartographie objective des territoires sous-dotés réalisée par les agences régionales de santé, tant dans les zones rurales que dans les zones urbaines. Les aides conventionnelles, notamment les nouveaux contrats d'aide à l'installation des médecins en zone sous-dotée, sont donc versées en fonction de ce zonage. Il en va de même pour les aides inscrites dans le pacte territoire santé, comme le contrat de praticien territorial de médecine générale ou du contrat d'engagement de service public, grâce auquel, en contrepartie d'une bourse versée pendant leurs études, de jeunes médecins s'engagent à exercer à l'issue de leur formation dans une zone sous-dotée.

Pour lutter plus efficacement encore contre les déserts médicaux, il est important d'écouter les premiers concernés, les représentants des internes et des jeunes médecins. Ces derniers ne sont pas demandeurs d'aides financières plus importantes ; ils veulent principalement sécuriser leurs premières années d'installation et bénéficier d'une aide organisationnelle afin de consacrer un maximum de temps à la prise en charge de leurs patients. C'est tout le sens des contrats de praticiens territoriaux de médecine et de la promotion des maisons de santé au travers du pacte territoire santé que Marisol Touraine a lancé dès 2012. Et les résultats sont là : plus de 830 maisons de santé pluriprofessionnelles maillent notre territoire, plus de 1 750 contrats d'engagement de service public ont été signés et plus de 660 praticiens territoriaux de médecine générale ont déjà été installés aujourd'hui.

Monsieur le député, pour résoudre ce problème d'accès aux soins, nous devons nous appuyons sur des mesures pragmatiques diverses agissant de la formation aux conditions d'installation tout en évitant les effets d'aubaine. Le Gouvernement reste bien évidemment pleinement mobilisé et convaincu que c'est dans la durée que nous mesurerons la portée de nos efforts.

M. le président. La parole est à M. Julien Dive.

M. Julien Dive. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Si vous aviez pris un peu de distance par rapport à vos fiches, cependant, vous auriez noté que j'ai bien évoqué à la fois le monde rural et le monde urbain. J'ai précisé que certains quartiers, que des villes moyennes étaient également confrontés au problème de l'accès aux soins.

J'appelle par ailleurs votre attention sur le fait que nos communautés de communes ont aujourd'hui besoin d'être accompagnées dans la création des maisons de santé pluridisciplinaires où on peut travailler avec les écoles et les facultés. Les maisons de santé ne doivent pas être des coquilles vides : elles doivent à la fois répondre au cahier des charges des futurs médecins qui s'y installeront et correspondre aux attentes des habitants du territoire. Je rencontre le cas dans la commune dont je suis le maire, Itancourt : deux autres maires voisins et moi-même essayons de mettre en place une maison médicale pluridisciplinaire. Notre principale difficulté est de trouver un interlocuteur, notamment au sein de la faculté. Il y a là un trou dans la raquette.