agriculteurs
Question de :
M. Paul Salen
Loire (6e circonscription) - Les Républicains
M. Paul Salen attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur la situation catastrophique que rencontrent les agriculteurs. En 2003, 47 % des agriculteurs avaient déjà un revenu inférieur au SMIC. En 2015, un tiers d'entre eux a touché moins de 350 euros par mois et cette proportion pourrait atteindre les 50 % pour l'année 2016. En parallèle, les appels à la plate-forme d'aide Agri'écoute ont été multipliés par trois en un an. Crise du prix du lait, grippe aviaire dans le sud-ouest, catastrophes climatiques ont encore un peu plus aggravé la situation des agriculteurs, à tel point que les chambres d'agriculture qualifient l'année 2016 « d'année noire ». Aussi, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement pour venir en aide aux nombreux agriculteurs en difficulté.
Réponse en séance, et publiée le 18 janvier 2017
DIFFICULTÉS DES EXPLOITANTS AGRICOLES
Mme la présidente. La parole est à M. Paul Salen, pour exposer sa question, n° 1592, relative aux difficultés des exploitants agricoles.
M. Paul Salen. Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la situation catastrophique que rencontrent les agriculteurs depuis quelques années, qui s'est encore aggravée avec les mauvaises récoltes de l'été 2016. En 2003, 47 % des agriculteurs avaient déjà un revenu inférieur au SMIC. En 2015, un tiers d'entre eux a touché moins de 350 euros par mois, et cette proportion pourrait atteindre les 50 % pour l'année 2016. Dans un même temps, le nombre d'appels à la plate-forme d'aide Agri'écoute a été multiplié par trois en un an. La crise laitière s'est déjà traduite par une baisse de plus de 20 % du prix du lait depuis deux ans et les cours de la viande ont encore chuté en raison d'une augmentation du troupeau laitier en Europe. Alors quand, en 2016, les aléas météorologiques ont de nouveau atteint de plein fouet le monde agricole – les cultures de blé, de betteraves, de pommes de terre ou encore de la vigne –, les agriculteurs étaient déjà à bout.
Crise du prix du lait, baisse des cours de la viande, catastrophes climatiques ont encore un peu plus accentué le climat désastreux qui règne dans les milieux agricoles, à tel point que les chambres d'agriculture qualifient l'année 2016 d'année noire. Le nombre de demandes de RSA est en constante augmentation depuis l'année dernière, tout comme celui de bénéficiaires de la prime d'activité, qui a explosé. D'ici un ou deux ans, beaucoup d'agriculteurs vont être contraints de cesser leur activité et de trouver un autre emploi. Dans la Loire, plusieurs agriculteurs sont au bord de la faillite ; pire, au bord du suicide. En parallèle, la réputation de pollueurs qu'ont, parfois à tort, les agriculteurs ne renforce pas l'attrait du métier et plonge ces professionnels dans un profond désarroi qui les fait se sentir très seuls face au reste du pays. Aussi, je souhaiterais connaître, monsieur le ministre, les intentions de votre Gouvernement pour venir très rapidement en aide aux nombreux agriculteurs en difficulté.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, vous avez rappelé la situation dans laquelle se trouve l'agriculture aujourd'hui. Elle subit des crises qui ne sont pas successives, mais cumulatives.
Le problème lié au prix du lait, d'abord, vient de loin : la surproduction laitière, à l'échelle mondiale aussi bien qu'européenne, n'est malheureusement pas uniquement liée à la conjoncture. Pour en sortir, il faudra donc du temps. Nous avons réussi à retirer à peu près 1,5 million de tonnes de poudre de lait sur l'année 2016 grâce aux mesures de maîtrise de la production que nous avons prises ; mais ces mesures ne peuvent enrayer la baisse des prix et compenser totalement ses conséquences pour les agriculteurs. J'en ai tout à fait conscience.
Comme vous l'avez indiqué, cela a aussi eu des conséquences sur le prix de la viande bovine. Les décisions prises à cet égard avaient aggravé notre inquiétude. Certes, les prix ne se redressent pas suffisamment, mais nous avons mis en place une prime de 150 euros liée à un plafond du poids des carcasses. D'autres nouvelles, de temps en temps, nous redonnent un peu d'espoir, par exemple l'ouverture du marché des États-Unis à la viande de bœuf française, pour la première fois depuis la crise de l'ESB – encéphalopathie spongiforme bovine, ou maladie de la vache folle –, même si nous n'en sommes pas encore à exporter.
Nous sommes en outre confrontés à des crises sanitaires, notamment à cause de la fièvre catarrhale ovine, ou FCO. Alors qu'un flux d'exportation s'était mis en place, notamment vers la Turquie, nous avons été rattrapés par cette maladie. Par ailleurs, l'influenza aviaire a touché la volaille française : l'an dernier, cette maladie était liée à des mutations du virus au sein de notre propre zone de production ; cette année, elle est liée à l'arrivée d'oiseaux migrateurs. Dans les deux cas, les conséquences représentent plusieurs centaines de millions d'euros. L'État s'est porté, et se portera, au secours des producteurs ; je participerai demain à une réunion avec l'ensemble des acteurs de filières, afin de nous mettre, encore une fois, en ordre de bataille.
Qu'avons-nous fait pour combattre cette crise ? Nous avons décidé d'un plan de soutien à l'élevage, dans le cadre duquel environ un milliard d'euros d'aides ont été alloués, à la fois sous forme d'allègement de charges – y compris d'allègements pérennes sur les cotisations sociales, comme je le disais tout à l'heure à M. Alain Marleix –, d'allègement de fiscalité, de report d'annuités, sans oublier la fameuse « année blanche » qui a mis du temps à partir, mais qui commence à être utile.
Dans un deuxième temps, malheureusement, la production a diminué en 2016 à cause des inondations et d'un printemps incroyablement désastreux, et ce alors que les prix étaient déjà bas ; en conséquence de quoi le produit brut à l'hectare a chuté de 30 % à 35 %. Cette situation cause de grandes difficultés aux agriculteurs ; nous devons donc leur apporter des aides afin qu'ils puissent relancer un cycle de production. Nous avons donc décidé de garantir 1,5 milliard d'euros de potentiel de prêts pour les agriculteurs.
Les avances de trésorerie versées au travers des aides européennes ont sûrement permis d'aider les agriculteurs pour la fin de l'année. Mais l'on sait que les exploitants agricoles vont à nouveau se retrouver fragilisés, et auront des besoins de trésorerie. Nous avons prévu, pour y répondre, un plan de conciliation avec la BPI – la banque publique d'investissement – et les banques ; nous sommes en train de le revoir, de le peaufiner, pour qu'il soit au rendez-vous.
Nous savons que c'est maintenant que le sort de beaucoup d'agriculteurs va se jouer ; c'est pourquoi nous mobiliserons des moyens non seulement pour apporter une aide conjoncturelle, mais aussi pour prendre des mesures de long terme, de maîtrise de la production, comme celles que j'évoquais au sujet du lait ou de la viande bovine.
Je le répète : je suis tout à fait conscient des très grandes difficultés auxquelles font face les agriculteurs, du climat de morosité dans lequel ils sont plongés, à cause de ces crises qui, loin de se succéder, se cumulent : crise sanitaire, crise de marché, crise climatique… Nous en sommes conscients, et nous sommes là pour les aider.
M. Paul Salen. Madame la présidente, je voudrais reprendre la parole.
Mme la présidente. Non, monsieur le député, excusez-moi, mais le temps est épuisé, et nous allons passer à la question suivante.
M. Paul Salen. Mais je n'ai pas épuisé mon temps de parole, moi ! Je peux reprendre la parole !
Mme la présidente. Monsieur le député, pardonnez-moi, mais le temps est limité à six minutes, question et réponse confondues. Ce n'est que lorsque ce temps n'est pas épuisé que je donne à nouveau la parole à l'auteur de la question. Et lorsqu'il est épuisé, on passe à la question suivante !
Auteur : M. Paul Salen
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 janvier 2017