Question orale n° 1618 :
logement social

14e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Barbier
Isère (7e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Pierre Barbier appelle l'attention de Mme la ministre du logement et de l'habitat durable sur la problématique de la garantie des emprunts destinés à financer la production de logements sociaux. Le département de l'Isère garantit les emprunts des bailleurs sociaux de son territoire selon des critères définis par son assemblée. Fort de sa politique volontariste en la matière, son encours de dette garantie est le 3ème plus important de France avec 1 285 millions d'euros fin 2014 soit 2 fois supérieur à la moyenne des départements similaires. Aussi, pour diminuer ses engagements financiers hors bilan, le département a modifié ses règles d'attribution des garanties d'emprunt pour ramener cet encours à un niveau plus raisonnable à moyen terme. Cependant, pour obtenir des prêts de la caisse des dépôts et consignations, les bailleurs sociaux sont contraints de disposer d'une garantie. Ils se tournent donc vers les collectivités territoriales ou vers la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Or cet établissement public administratif refuse de garantir à 100 % les emprunts des bailleurs sociaux adossés à une collectivité. Par ailleurs, lorsqu'il consent à octroyer une garantie partielle, elle est facturée au bailleur à hauteur de 2 % du montant garanti, ce qui est tout à fait prohibitif dans un secteur où le défaut de remboursement par les bailleurs est extrêmement rare. Cette situation est de nature à mettre en péril la production de logement social en France ou alors à enfermer les collectivités dans une spirale de dégradation continue de leur situation financière et qui n'auraient d'autres choix que celui d'accepter l'octroi de garanties d'emprunt. Il lui demande que la CGLLS assouplisse ses règles d'attribution de garanties d'emprunt et que cet établissement pratique des tarifs plus en adéquation avec le risque encouru.

Réponse en séance, et publiée le 1er février 2017

GARANTIES D'EMPRUNT DES BAILLEURS SOCIAUX
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour exposer sa question, n°  1618, relative aux garanties d'emprunt des bailleurs sociaux.

M. Jean-Pierre Barbier. Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche, je veux appeler votre attention sur la problématique de la garantie des emprunts destinés à financer la production de logements sociaux.

Comme la plupart des collectivités, le département de l'Isère garantit les emprunts des bailleurs sociaux de son territoire, selon des critères définis par son assemblée. Faute d'une réelle gestion de ces garanties jusqu'en 2014, son encours de dette garantie est le troisième plus important de France, avec 1,285 milliard fin 2014, ce qui est deux fois supérieur à la moyenne des départements similaires. Aussi, pour diminuer ses engagements financiers hors bilan et ramener cet encours à un niveau plus raisonnable à moyen terme, le département de l'Isère, que je préside, a modifié ses règles d'attribution des garanties d'emprunt. Pour mémoire, le budget total du département de l'Isère est de 1,5 milliard d'euros.

Cependant, pour obtenir des prêts de la Caisse des dépôts et consignations, les bailleurs sociaux sont contraints de disposer d'une garantie. Ils se tournent donc vers d'autres collectivités territoriales ou vers la Caisse de garantie du logement locatif social, la CGLLS. Or cet établissement public administratif refuse de garantir à 100 % les emprunts des bailleurs sociaux adossés à une collectivité. Par ailleurs, lorsqu'il consent à octroyer une garantie partielle, celle-ci est facturée, selon les types de logement, à hauteur de 2 % du montant garanti, ce qui est tout à fait prohibitif dans un secteur où le défaut de remboursement par les bailleurs est extrêmement rare.

Cette situation est de nature à mettre en péril la production de logement social dans notre pays ou à enfermer les collectivités dans une spirale de dégradation continue de leur situation financière, puisqu'elles n'auraient d'autre choix que d'accepter l'octroi de garanties d'emprunt. Vous l'avez bien compris, monsieur le secrétaire d'État, l'enjeu est de continuer à construire du logement social sans dégrader la situation financière des collectivités.

Aussi, je vous serais reconnaissant d'intervenir auprès de la Caisse de garantie du logement locatif social pour qu'elle assouplisse ses règles d'attribution de garanties d'emprunt ou, à défaut, qu'elle pratique des tarifs plus en adéquation avec le risque encouru. L'idéal serait cependant de cesser d'imposer de telles garanties d'emprunt aux bailleurs sociaux et à la Caisse des dépôts, compte tenu du fait que le risque est très limité – pratiquement aucune défaillance n'a été enregistrée pendant les trente dernières années.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Vous soulignez, monsieur Barbier, la politique volontariste du département de l'Isère en matière de garantie d'emprunt des prêts de la Caisse des dépôts et consignations pour la construction et la rénovation du logement social. Un tel volontarisme des acteurs locaux est indispensable à la continuité du dispositif de financement de ces investissements.

La Caisse de garantie du logement locatif social intervient en complément ou en remplacement des collectivités locales, lorsque celles-ci font défaut. La ministre du logement et de l'habitat durable considère que, sauf cas exceptionnel, les collectivités sur le territoire desquelles sont construits ou rénovés des logements sociaux, les collectivités de rattachement des offices public d'habitat, ainsi que les collectivités membres des conseils d'administration des organismes bailleurs ont une responsabilité particulière, qui doit les amener, comme c'est généralement le cas, à se coordonner afin que les prêts de la CDC soient garantis dans les meilleures conditions.

La garantie de la CGLLS n'intervient donc qu'à titre subsidiaire, pour moins de 2,5 % des émissions annuelles de prêts de la CDC en la matière, ce qui est le signe de la constance de l'engagement des collectivités. Il faut aussi rappeler que la garantie apportée par les collectivités aux emprunts des organismes constructeurs du logement social est gratuite et n'est pas soumise aux obligations prudentielles de solvabilité bancaire. Or ce n'est pas le cas de la CGLLS, laquelle, en qualité de société de financement, est soumise à la réglementation bancaire et au respect des ratios prudentiels, ce qui nécessite des fonds propres conséquents.

Le taux de 2 % pratiqué est donc très faible, notamment au regard de la durée des prêts, généralement de quarante ans ; il permet de majorer le taux d'emprunt de manière très limitée – de 0,05 % seulement. Par ailleurs, je vous rappelle que la garantie de la CGLLS est gratuite pour les logements très sociaux, afin d'inciter à l'effort de construction de ce type de logements. Le Gouvernement ne peut donc pas partager votre analyse sur le caractère prohibitif du prix des garanties que pratique la CGLLS. Au contraire, ce prix est juste suffisant pour inciter les collectivités à maintenir leurs efforts.

Comme la CGLLS l'indique dans son dernier rapport d'activité, les conseils départementaux préfèrent limiter l'apport de leur garantie aux organismes constructeurs de logements sociaux pour les opérations en zone rurale et exigent souvent une participation des communes concernées. Lorsque celles-ci refusent d'offrir leur garantie, il s'avère que la CGLLS est alors fréquemment sollicitée pour accorder la totalité de la garantie nécessaire. Cette situation me paraît inappropriée au regard de la gouvernance partenariale que la ministre du logement souhaite encourager sur les territoires.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier.

M. Jean-Pierre Barbier. J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, mais il faut tenir compte des difficultés financières croissantes des collectivités. Il faut reconnaître que les organismes bancaires, à cause de cet encours de garantie, commencent à refuser certains emprunts aux collectivités.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Barbier

Type de question : Question orale

Rubrique : Logement

Ministère interrogé : Logement et habitat durable

Ministère répondant : Logement et habitat durable

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2017

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