Question orale n° 1625 :
emploi

14e Législature

Question de : M. Alain Leboeuf
Vendée (1re circonscription) - Les Républicains

M. Alain Leboeuf attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la question de la préférence régionale pour les emplois publics dans les départements d'outre-mer. La nomination d'un maître de conférences en histoire de l'esclavage à l'université de Saint-Denis de la Réunion a été attaquée par plusieurs associations en raison de l'origine métropolitaine, et plus particulièrement nantaise, de l'enseignante. Selon les détracteurs de cette nomination, l'histoire de l'esclavage ne pourrait être enseignée par un professeur originaire de la ville qui a été le premier port français pour la traite négrière. Aussi, il lui demande de lui indiquer les règles des concours de professeurs d'université et de lui préciser si elles s'appliquent de la même façon en métropole et dans les DOM.

Réponse en séance, et publiée le 1er février 2017

RECRUTEMENT DES PROFESSEURS D'UNIVERSITÉ DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Leboeuf, pour exposer sa question, n°  1625, relative au recrutement des professeurs d'université dans les départements d'outre-mer.

M. Alain Leboeuf. Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; néanmoins, puisqu’elle concerne l’université de Saint-Denis de La Réunion, vous serez tout à fait en mesure d’y répondre, monsieur le secrétaire d’État chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le problème qui me préoccupe porte sur la préférence régionale pour les emplois publics dans les départements d'outre-mer.

La nomination d'une maître de conférences en histoire de l'esclavage à l'université de Saint-Denis de La Réunion est en effet le sujet d'un feuilleton rocambolesque qui fait les gros titres de la presse et des réseaux sociaux depuis plusieurs mois. Je rappellerai brièvement les faits.

En 2015, un emploi de maître de conférences en histoire de l’esclavage, de l'engagisme et de l'économie des colonies dans les îles du sud-ouest de l'océan Indien aux XVIIIe et XIXe siècles est mis au concours par l'université de La Réunion. Ce poste est en parfaite adéquation avec les compétences d’une universitaire qui a précisément rédigé sa thèse sur ce sujet. Celle-ci postule, mais, surprise ! le concours est annulé. Deuxième épisode : en 2016, un concours est rouvert et la candidature de cette même enseignante est, cette fois, retenue.

Débute alors une véritable campagne de lobbying menée par des universitaires réunionnais et des associations identitaires contre ce recrutement, en raison, disent-ils, de l'origine métropolitaine, et plus spécifiquement nantaise, de l'enseignante. Selon les détracteurs de cette nomination, l'histoire de l'esclavage ne pourrait être enseignée par un professeur originaire de la ville qui fut le premier port français pour la traite négrière. Saisi par des associations, le tribunal administratif décide, en juillet 2016, de suspendre la nomination de l'universitaire nantaise.

Monsieur le secrétaire d’État, mes questions sont donc simples : quelles sont les règles des concours de recrutement des professeurs d'université ? s'appliquent-elles de la même façon en métropole et dans les DOM ? Ce sont des questions très précises, auxquelles je vous demande de répondre avec précision.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Leboeuf, si je répondais à votre seconde question avec précision, ma réponse tiendrait en un mot : « oui ». Mais vous en seriez frustré. Permettez-moi donc d’aller au-delà de la réaffirmation de ce qui devrait être un principe évident.

Les enseignants-chercheurs sont, je vous le rappelle, des fonctionnaires titulaires nommés sur un emploi dans un établissement public d'enseignement supérieur et de recherche. Sous réserve des dispositions particulières concernant les disciplines juridiques, politiques, économiques et de gestion, ils sont recrutés, comme vous l’avez indiqué, par concours ouverts et organisés par les établissements. Ils doivent au préalable avoir été inscrits sur une liste de qualification établie par le Conseil national des universités, le CNU, et remplir plusieurs conditions.

Conformément aux dispositions des articles L. 952-6 et L. 952-6-1 du code de l'éducation, les candidatures, pour chaque recrutement d'enseignant-chercheur, sont examinées, sur l'ensemble du territoire national, par les organes compétents là où le concours a été organisé, à savoir le comité de sélection, le conseil académique et le conseil d'administration. En vertu du principe d'indépendance des enseignants-chercheurs, ces organes sont composés de leurs seuls représentants, et il n'existe pas de dispositions particulières pour l'outre-mer.

Vous m'interpellez à propos d'un concours de recrutement de maître de conférences en histoire avec un profil d'emploi orienté sur l'histoire de l'esclavage, de l'engagisme et de l'économie aux XVIIIe et XIXe siècles. Une candidate au concours ouvert par l'université de La Réunion a été classée en première position par délibération du comité de sélection, classement confirmé par les autres instances de l'établissement.

Cependant, le tribunal administratif de La Réunion a effectivement suspendu, le 4 juillet 2016, l'exécution de la délibération du conseil d'administration, car le moyen tiré de la composition du comité de sélection était de nature à jeter un doute sérieux sur la légalité de la procédure de recrutement. C'est donc une contestation de la procédure pour vice de forme qui explique que cette procédure ait été suspendue, dans l'attente de la décision au fond.

Je le dis très clairement : si le tribunal confirme la légalité de la procédure, la nomination par les services du ministère aura lieu. Dans le cas contraire, cette procédure devra être reprise dans son ensemble.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Leboeuf.

M. Alain Leboeuf. Permettez-moi de continuer de m'inquiéter de l'importance croissante, voire démesurée, prise par ces associations identitaires dans les départements d'outre-mer. Au fond, les lois de la République s'appliquent-elles vraiment de la même manière en outre-mer et en métropole ? Je m'interroge vraiment…

Données clés

Auteur : M. Alain Leboeuf

Type de question : Question orale

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2017

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