Question orale n° 1631 :
immigration

14e Législature

Question de : M. Xavier Breton
Ain (1re circonscription) - Les Républicains

M. Xavier Breton attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la question des migrants. La France et l'Europe subissent depuis plusieurs années déjà une vague migratoire de très grande importance. C'est dans ce cadre qu'en septembre 2016, le Gouvernement a finalement décidé de démanteler la « jungle » de Calais en confiant aux Préfectures le soin d'organiser la prise en charge de près de 6 000 migrants. La France a historiquement une tradition d'asile qui permet d'accueillir sur son sol des personnes persécutées. Or depuis 2012, les demandes ont explosé et de trop nombreux demandeurs d'asile, toujours dans l'attente d'une éventuelle reconnaissance du statut de réfugié, vivent à la rue des situations humainement dégradantes et inacceptables, comme c'est le cas actuellement à Bourg-en-Bresse. L'État, malgré la loi de juillet 2015, est incapable d'accélérer les procédures et de faire appliquer les décisions de justice de reconduite à la frontière, entraînant de fait un accroissement constant du nombre de personnes en situation irrégulière, et plus largement un appel d'air pour les migrations. Toute la procédure de demande d'asile est complètement embolisée avec des Centres d'accueil de demandeurs d'asile et hébergements d'urgence majoritairement occupés par des déboutés du droit d'asile. Ces situations sont bien sûr complexes à gérer ! Mais la fermeté doit prévaloir quand les voies de recours sont épuisées. Il n'est pas possible de continuer plus longtemps à leurrer ces populations étrangères en leur faisant croire que la France peut les accueillir en leur offrant de nouveaux droits, alors que notre pays compte 15 millions de chômeurs et précaires et que nombre de nos compatriotes qui ont travaillé leur vie durant n'ont pas l'essentiel pour vivre dans de bonnes conditions. Aussi, il lui demande quelles dispositions le Gouvernement compte enfin prendre afin de mettre un terme au détournement des procédures de droit d'asile, et d'éloigner du territoire national tous les migrants déboutés à l'issue des voies de recours.

Réponse en séance, et publiée le 1er février 2017

PROCÉDURES DU DROIT D'ASILE
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour exposer sa question, n°  1631, relative aux procédures du droit d'asile.

M. Xavier Breton. À travers vous, monsieur le secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire, je souhaite interroger le ministère de l'intérieur sur la vague migratoire de très grande importance que connaissent la France et l'Europe.

Bien sûr, notre pays a historiquement une tradition d'asile, qui permet aux personnes persécutées du fait de leur appartenance politique, religieuse ou ethnique d'être accueillies et de trouver sécurité et solidarité dans un pays de liberté. Or, au cours des dernières années, les demandes d'asile dans notre pays ont explosé. Chacun sait très bien qu'une grande majorité de ces demandeurs ne sont pas de vrais réfugiés politiques.

Aujourd'hui, en France, de très nombreux demandeurs d'asile sont toujours dans l'attente d'une éventuelle reconnaissance du statut de réfugié ; ils vivent dans la rue des situations humainement dégradantes et inacceptables, comme on peut le voir actuellement dans la ville de Bourg-en-Bresse.

Malgré la loi du 29 juillet 2015, l'État est incapable d'accélérer les procédures et de faire appliquer les décisions de justice de déboutement du droit d'asile et donc de reconduite à la frontière, ce qui entraîne de fait un accroissement constant du nombre de personnes en situation irrégulière. Toute la procédure de demande d'asile est ainsi complètement embolisée. Les centres d'accueil de demandeurs d'asile – CADA – et les hébergements d'urgence sont majoritairement occupés par des déboutés du droit d'asile non reconduits à la frontière à l'issue des décisions définitives de rejet de leur demande, par absence totale de volonté politique. Moins de 10 % des déboutés quittent effectivement notre territoire une fois qu'ils ont épuisé les voies de recours.

Au moment où notre pays compte plusieurs millions de personnes en situation de chômage et de précarité, nous ne pouvons plus ouvrir nos portes aux réfugiés « économiques », qui ne peuvent trouver une activité sur notre territoire. De même, nous ne pouvons plus longtemps accepter sur le territoire national autant d'immigrés en situation irrégulière.

Bien sûr, la gestion de ces situations est complexe et nous devons saluer le travail effectué par les services préfectoraux et les associations locales, avec lesquelles nous sommes régulièrement en contact. Mais l'absence de clarté et de détermination crée fatalement un appel d'air pour les migrations, notamment vers des départements frontaliers comme l'Ain, dont les structures sont déjà surchargées.

Nous ne pouvons plus longtemps continuer à leurrer ces populations étrangères en leur faisant croire que notre pays peut continuer à les accueillir en leur offrant de nouveaux droits alors que la France est confrontée aux difficultés majeures que nous connaissons et que nombre de nos compatriotes qui ont travaillé toute leur vie durant n'ont même pas l'essentiel pour vivre dans de bonnes conditions.

Aussi, monsieur le secrétaire d'État, quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il enfin prendre pour mettre un terme aux détournements des procédures du droit d'asile et pour appliquer enfin les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides – OFPRA – et de la justice tendant à l'éloignement du territoire national de tous les migrants déboutés lorsqu'ils ont épuisé les voies de recours ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur le député, pendant ces cinq dernières années, dans un contexte migratoire mouvementé, le Gouvernement a su perpétuer la force de la tradition républicaine d'accueil des demandeurs d'asile. Il l'a fait dans le cadre d'une réforme redonnant de la vigueur à nos procédures d'asile tout en renforçant les droits et les garanties des demandeurs. Contrairement à votre analyse, les premiers résultats sont tout à fait encourageants, même si les effets attendus de la réduction des délais de traitement se sont trouvés atténués par l'augmentation du nombre de demandes d'asile.

Nous avons aussi fait des efforts en matière d'hébergement des demandeurs d'asile en doublant le nombre de places offertes en CADA, soit une création de 20 000 places sur la durée du quinquennat alors que seules 2 000 places avaient été créées par la majorité précédente. Par ailleurs, depuis octobre 2015, la création de places en centres d'accueil et d'orientation a permis à 17 000 personnes de trouver un moment de répit dans leur parcours migratoire. C'est dans ces centres qu'elles ont pu bénéficier d'un accompagnement social, sanitaire et administratif et, pour un grand nombre d'entre elles, entreprendre de déposer une demande d'asile en France.

Afin d'assurer un juste équilibre, cette politique va de pair avec notre engagement à lutter contre le détournement des procédures d'asile et l'immigration irrégulière. Dès lors qu'un étranger est sous le coup d'une mesure d'éloignement et que sa situation administrative a fait l'objet d'un examen global, nous mettons tout en œuvre pour que l'éloignement soit effectif. Par la loi du 7 mars 2016, nous avons renforcé le dispositif d'assignation à résidence pour accroître l'efficacité de cette politique.

L'efficacité de notre action se traduit par l'évolution des éloignements forcés. Dans ce cadre, l'éloignement de ressortissants de pays tiers est la mesure la plus emblématique car c'est la plus complexe à mettre en œuvre. Certes, le nombre de ces éloignements est passé de 6 311 en 2015 à 6 166 en 2016, soit une baisse de 2,3 % – 145 mesures –, mais cette évolution doit être mise en perspective avec les effets du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de l'espace Schengen. Celui-ci s'est traduit par une très forte augmentation des non-admissions d'étrangers en situation irrégulière prononcées par les services de police aux frontières – le nombre de ces décisions est passé de 15 849 en 2015 à 63 732 en 2016, soit une hausse de 47 833 mesures ou 302 %. Ces personnes non admises n'ont pu entrer sur le territoire national ; ainsi, il n'a pas été nécessaire de prendre à leur encontre des mesures d'éloignement et encore moins de les faire exécuter.

Enfin, depuis 2009, le nombre total de mesures d'éloignement forcé est passé de 12 547 à 12 961, soit une augmentation de 3 %. De même, le nombre de retours forcés de ressortissants de pays tiers est à la hausse, passant de 4 015 à 6 539 mesures, soit une augmentation de 62 %.

Aussi, afin de favoriser la dynamique de retour des demandeurs d'asile déboutés, des dispositifs spécifiques de préparation au retour volontaire sont mis en place.

Enfin, les dispositions de l'article L. 551-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent de rejeter des demandes d'asile formulées tardivement dans les lieux de rétention ou pouvant être considérées comme dilatoires, afin de ne pas entraver l'exécution des mesures d'éloignement.

Données clés

Auteur : M. Xavier Breton

Type de question : Question orale

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2017

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