14ème législature

Question N° 1633
de M. Jean-Luc Bleunven (Socialiste, écologiste et républicain - Finistère )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Personnes handicapées et lutte contre l'exclusion
Ministère attributaire > Personnes handicapées et lutte contre l'exclusion

Rubrique > handicapés

Tête d'analyse > établissements

Analyse > IME. capacité d'accueil.

Question publiée au JO le : 24/01/2017
Réponse publiée au JO le : 01/02/2017 page : 566

Texte de la question

M. Jean-Luc Bleunven attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, sur le manque de places en instituts médico-éducatifs (IME) pour les enfants souffrant d'un handicap physique ou mental. L'éducation est un droit fondamental pour chaque enfant. Aujourd'hui, les enfants sujets à un handicap ne voient pas leur droit à une scolarisation adaptée, et donc à une éducation, respecté. En Bretagne comme dans le reste de la France, de nombreux enfants sont depuis plusieurs années sur liste d'attente pour pouvoir intégrer l'un des cinquante-cinq IME présents dans la région. Cette situation est particulièrement difficile pour l'enfant qui doit subir cette rupture totale dans son parcours de soin mais également pour les parents qui ressentent un profond abandon. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer les mesures concrètes afin de remédier à cette pénurie de place en IME.

Texte de la réponse

MANQUE DE PLACES DANS LES INSTITUTS MÉDICO-ÉDUCATIFS


Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Bleunven, pour exposer sa question, n°  1633, relative au manque de places dans les instituts médico-éducatifs.

M. Jean-Luc Bleunven. Madame la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, je souhaite vous interroger sur le manque de place dans les instituts médico-éducatifs, plus couramment appelés IME, pour les enfants et adolescents en situation de handicap. Ces instituts, comme vous le savez, prennent en charge les enfants ou adolescents présentant une déficience à prédominance intellectuelle. L'éducation est non seulement un droit fondamental pour chaque enfant mais également un outil essentiel de la construction individuelle et sociale des individus. Tous les enfants doivent pouvoir aller à l'école et ainsi bénéficier des mêmes opportunités de se construire un avenir. En Bretagne, il existe quarante-cinq IME, dont treize dans le Finistère.

Un problème se pose : du fait de l'amendement dit « Creton », les adultes en situation de handicap ne trouvant pas de place dans les ESAT – les établissements et services d'aide par le travail – ont la possibilité de conserver leur place en IME, normalement réservés aux enfants et adolescents, ce qui aboutit à une raréfaction des places disponibles pour ces derniers. La réponse apportée aux parents est que leur enfant est placé sur liste d'attente. Cette situation peut être extrêmement longue, puisqu'il n'est pas rare qu'un enfant reste sur cette liste pendant plusieurs années successives.

Je voudrais également vous faire part de la réalité du terrain. Dans nos circonscriptions, nous nous trouvons bien souvent face à des drames humains : des familles, déjà démunies face aux difficultés auxquelles elles doivent faire face du fait du handicap dont souffre leur enfant, doivent bien souvent entamer un parcours du combattant pour arriver à le scolariser.

M. Arnaud Richard. C'est vrai !

M. Jean-Luc Bleunven. À titre d'exemple, l'un d'eux, résidant dans ma circonscription, avait progressé grâce à une classe spécialisée en école élémentaire, mais a dû la quitter car il est devenu trop âgé. Il est essentiel que son éducation se poursuive mais, faute de place en IME, aucune solution n'a été trouvée pour cet enfant, malgré les instructions de son médecin traitant. L'un de ses parents a donc dû quitter son travail pour se consacrer à lui à plein-temps, avec tous les sacrifices que cela suppose et bien qu'il ne possède pas les qualifications nécessaires.

Je connais et je salue les avancées de la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016. Les nouvelles mesures qui en sont issues me semblent intéressantes mais des lenteurs dans leur application sont à déplorer. Le programme pluriannuel 2008-2016 de création de places en établissements et services pour personnes handicapées comprend, parmi ses principaux objectifs, la réduction des listes d'attente. Pour le moment, cette mesure vise principalement les ESAT, ce qui permettrait de désengorger les IME. Mais, si le problème vous est connu, madame la secrétaire d'État, l'effectivité des solutions amorcées n'est pas encore ressentie sur nos territoires.

Je vous demande donc quelles seraient les solutions à mettre en œuvre pour que chaque enfant, même en situation de handicap, voie son droit à l'éducation devenir effectif.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur Bleunven, vous avez raison, l'éducation est un droit fondamental poux chaque enfant, et chaque situation doit pouvoir trouver une réponse personnalisée. La politique du handicap que nous avons menée depuis 2012 va tout à fait dans ce sens, puisque nous souhaitons, comme vous, que tous les enfants en situation de handicap puissent recevoir une éducation correspondant à leurs besoins.

Je me dois de vous dire que, depuis 2012, la proportion d'enfants accueillis à l'école « ordinaire » a augmenté de 30 %, précisément en raison des efforts que nous avons déployés. De fait, tous les enfants en situation de handicap n'ont pas vocation à intégrer un IME. Certains peuvent aller à l'école dans une classe ordinaire mais dans le cadre d'un accompagnement adapté – nous avons d'ailleurs professionnalisé les accompagnants d'élèves en situation de handicap et mettons progressivement fin aux contrats précaires pour les remplacer par des contrats pérennes. D'autres peuvent être accueillis dans des classes spécialisées – plus de cent unités d'enseignement en maternelle ont été créées pour les enfants autistes – comme les unités localisées pour l'inclusion scolaire, les ULIS. D'autres encore peuvent être accompagnés dans le cadre des services d'éducation spéciale et de soins à domicile, les SESSAD – ce pourquoi nous créons des places. D'autres, enfin, devront effectivement bénéficier de places en IME.

Cela implique de créer des places, ce que nous continuons à faire – dans votre région, en Bretagne, un peu plus de cent places d'IME ont été créées depuis 2012. Par ailleurs, le déblocage de 180 millions a été annoncé par le Président de la République à la suite de la Conférence nationale du handicap qui s'est tenue au mois de mai 2016. Ces fonds sont dédiés au développement de l'offre médico-sociale : la moitié est destinée à la création de nouvelle places car, vous avez raison, les besoins demeurent dans ce domaine, et l'autre moitié vise à transformer l'offre, c'est-à-dire à trouver de nouvelles solutions. Je pense en effet qu'il est encore possible d'aller plus loin en matière d'accueil des enfants en situation de handicap à l'école ordinaire. Tel est le mouvement que nous avons enclenché en externalisant aussi des classes en IME vers les écoles.

Vous avez également rappelé avec raison la situation des adultes : certains sont toujours accueillis en IME, en vertu de que l'on appelle l'« amendement Creton ». Il faut donc continuer à créer des places pour adultes, ce que nous faisons à travers les programmes dédiés. À cet égard, les départements sont eux aussi concernés : si, dans un certain nombre d'établissements comme les foyers d'accueil médicalisés, les places pour adultes sont financées conjointement par les départements et l'assurance maladie, les places en foyer d'hébergement et en foyer de vie – ou foyers occupationnels – le sont quant à elles exclusivement par les départements.

J'ajoute qu'une démarche importante a été initiée, intitulée « une réponse accompagnée pour tous », qui consiste à trouver une solution personnalisée pour chaque personne concernée. Depuis le début du mois, 90 départements se sont engagés en ce sens. Cette démarche complètement nouvelle, qui consiste à fournir une réponse à toutes celles et ceux, enfants ou adultes, dont les besoins ne sont pas jusqu'ici satisfaits, sera obligatoire à partir du 1er janvier 2018. Il s'agit d'un véritable changement dans la politique du handicap.

Mme la présidente. Comme nous avons dépassé le temps imparti, monsieur Bleunven, je ne vous donne pas la parole à nouveau. Je vous rappelle que nous disposons de six minutes au total pour la question et la réponse.