Question orale n° 1649 :
médecins

14e Législature

Question de : Mme Michèle Bonneton
Isère (9e circonscription) - Non inscrit

Mme Michèle Bonneton attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la place de l'hôpital et l'offre de soins en milieu rural. C'est une politique qui a été retenue prioritaire depuis 2012. Or, sur le terrain, les déserts médicaux sont loin de régresser ; la situation est même particulièrement tendue dans certains territoires comme les territoires ruraux et de montagne. Ainsi, il est parfois impossible à de nouveaux arrivants de trouver un médecin qui accepte de devenir leur médecin référent et après le départ d'un médecin (pour cause de retraite par exemple), il faut attendre, dans le meilleur des cas, de longs mois pour trouver un remplaçant (souvent au prix d'importants efforts de la collectivité). Les solutions proposées à ce jour ne permettent pas de solutionner de manière satisfaisante le problème et beaucoup craignent que cela ne fasse qu'empirer dans les années à venir malgré la montée en puissance des maisons de santé notamment. Cette situation ne manque pas d'impacter les services hospitaliers (notamment les urgences) des hôpitaux dans les villes petites et moyennes. Aussi, elle souhaiterait que Mme la ministre informe les Français sur les mesures mises en place ou envisagées pour pallier les manques constatés sur le terrain.

Réponse en séance, et publiée le 1er février 2017

HÔPITAUX ET OFFRE DE SOINS EN MILIEU RURAL
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour exposer sa question, n°  1649, relative aux hôpitaux et à l'offre de soins en milieu rural.

Mme Michèle Bonneton. Dans de nombreux secteurs ruraux, la question de l'accès aux soins et de la présence médicale est plus que jamais problématique. Nos concitoyens qui vivent en zone rurale ou de montagne subissent chaque jour les conséquences d'une fracture sanitaire qui semble se creuser toujours plus : plusieurs jours d'attente sont nécessaires pour obtenir un rendez-vous chez le généraliste, même en cas d'urgence ; le délai d'attente s'élève même à plusieurs mois pour obtenir une consultation chez certains spécialistes.

Les médecins généralistes n'acceptant parfois plus de nouveaux patients, certains Français sont dans l'impossibilité d'obtenir un médecin référent. Il en découle que les services d'urgence des hôpitaux de proximité sont souvent saturés. Le sentiment d'inégalité dans l'accès aux soins se renforce. Malgré la mise en place de mesures incitatives, la situation a plutôt tendance à se dégrader.

En Isère, dans ma circonscription, la commune de Pont-en-Royans a récemment perdu son dernier médecin et ne lui trouve pas de remplaçant, malgré de nombreux efforts. Les élus locaux engagent des actions volontaristes, telles que les maisons de santé. S'il convient évidemment d'accompagner leur création, elles ne suffiront pas à résoudre le problème. Ainsi, dans la maison de santé en construction à Saint-Marcellin, aucun nouveau médecin n'est prévu, faute de candidats. De plus, son rayon d'action, qui ne serait que de 15 kilomètres, serait loin de couvrir les besoins. Il apparaît donc que les mesures actuelles ne suffiront pas à résoudre durablement le problème de l'accès aux soins.

Quelles nouvelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour garantir l'accès à des soins de qualité à tout citoyen, quel que soit son lieu habitation ?

De plus, les hôpitaux locaux sont actuellement soumis à des contraintes financières et organisationnelles, notamment du fait de la mise en place des groupements hospitaliers de territoire, qui pourraient remettre en cause leur vocation et compromettre le maintien de capacités suffisamment larges d'hospitalisation de proximité et de qualité – je pense, par exemple, à l'hôpital de Voiron. Comment conforter ces établissements et garantir la présence d'une offre de soins de qualité au plus près de la population, sur l'ensemble du territoire ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la députée, vous interrogez la ministre des affaires sociales et de la santé quant aux mesures mises en place pour favoriser l'accès aux soins sur l'ensemble du territoire. Les deux minutes qui me sont imparties pour vous répondre ne me permettront pas d'être exhaustive, mais je veux vous citer quelques exemples très concrets de notre action.

D'abord, l'instauration de rémunération d'équipe permet aux maisons de santé pluriprofessionnelles de se développer. L'Isère en compte désormais dix-huit et deux nouvelles devraient voir le jour très prochainement. Notre territoire dispose désormais de plus de 800 maisons de santé pluriprofessionnelles et leur nombre a plus que triplé depuis 2012.

Puis viennent les vingt-huit médecins correspondants du SAMU de votre département, qui permettent aux patients d'accéder à des soins d'urgence en moins de trente minutes, comme s'y était engagé le Président de la République en 2012.

Je pourrais également vous citer les contrats de praticiens territoriaux de médecine générale que les jeunes médecins signent et qui leur garantissent des revenus minimums en échange de leur installation dans une zone prioritaire : trente-six contrats ont été signés dans l'Isère.

Vous évoquez la situation particulière des zones de montagne. Là aussi nous avons agi, puisqu'il existe désormais un statut de praticien isolé à activité saisonnière, qui cible les médecins de montagne exerçant dans les stations de sports d'hiver. Il leur permet de faire face à des fluctuations d'activité et de bénéficier pendant six ans d'une rémunération complémentaire.

Tous ces efforts seront rapidement renforcés par deux mesures récentes : l'assouplissement du statut d'adjoint du médecin, afin de permettre à un jeune remplaçant d'exercer en même temps que le médecin remplacé, et le contrat de praticien territorial médical de remplacement, qui garantira un pool de médecins remplaçants à destination des zones sous-denses.

Pour résoudre les problématiques d'accès aux soins, il n'y a pas une mesure miracle. Nous sommes convaincus que nous devons prendre des mesures pragmatiques et diverses, allant de la formation aux conditions d'installation.

Quant aux hôpitaux locaux, Marisol Touraine, dès son arrivée aux responsabilités, a souhaité prendre des mesures spécifiques de tarification complémentaire pour les hôpitaux locaux qui manquent d'activité. Ces mesures, votées par le Parlement, ont permis de maintenir de dizaines d'hôpitaux locaux sur l'ensemble du territoire.

Je me permets, pour finir, de vous alerter, madame la députée, sur les intentions d'un des candidats à la présidentielle, qui propose de fermer purement et simplement un certain nombre d'hôpitaux locaux dont le maintien ne lui semble pas indispensable. Or je peux vous assurer que, là où un hôpital a été fermé, les médecins s'installent encore moins volontiers, ce qui aggrave la désertification médicale. C'est pourquoi nous avons soutenu les hôpitaux locaux tout au long du quinquennat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Merci pour votre réponse, madame la secrétaire d'État. C'est vrai, des mesures ont été prises, mais je suis sur le terrain et je voulais appeler votre attention sur leur insuffisance. Ainsi, le critère retenu de trente minutes pour accéder à des soins d'urgence est purement théorique puisqu'il ne tient compte ni du relief, ni des aléas climatiques, ni des embouteillages.

Par ailleurs, je connais bien des élus qui essaient de trouver des médecins, pas seulement à Pont-en-Royans, mais aussi à Saint-Antoine, pour ne citer que ces deux villes. Si l'ARS dispose d'outils pour faciliter leur installation, elle ne propose pas de candidats. Il n'est pas possible de travailler en concertation avec le Conseil de l’ordre, lequel propose d'ailleurs peu de solutions. Les médecins étrangers qui pourraient s'installer sont souvent confrontés à des difficultés administratives.

Quant aux hôpitaux de proximité, celui de Voiron, que j'évoquais précédemment, est soumis à une contrainte financière telle que les conditions de travail pourraient se dégrader et décourager des médecins spécialisés de s'installer. Certains services pourraient en souffrir, voire fermer, comme ceux chargés de la stérilisation ou encore les laboratoires d'analyses médicales.

Nous sommes bien conscients des efforts consentis mais ils n'ont pas suffi à améliorer la situation sur le terrain.

Données clés

Auteur : Mme Michèle Bonneton

Type de question : Question orale

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Affaires sociales et santé

Ministère répondant : Affaires sociales et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2017

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