Question de : Mme Marie-Hélène Fabre
Aude (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Marie-Hélène Fabre attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le phénomène de la fraude fiscale. Elle lui rappelle que ce serait un tiers du PIB mondial qui échapperait à toute taxation selon l'ONG britannique Tax justice network, soit plus de 20 000 milliards d'euros. Par ailleurs, selon un rapport établi par le principal syndicat de fonctionnaires des impôts (Solidaires-finances publiques), la fraude fiscale atteindrait dans notre pays 73 milliards à 95 milliards d'euros, soit près de deux fois ce que rapporte l'impôt sur le revenu. L'essentiel de cette fraude est constituée par les escroqueries liées à l'impôt sur les sociétés et à la TVA qui ont grimpé de manière exponentielle. Les créations de sociétés fictives ou encore le jeu des prix de transfert permettent aux multinationales de rapatrier leurs profits dans les pays où la fiscalité est plus légère. Et, malgré la crise mondiale et les déclarations d'intentions, aucune politique à l'échelon international ou européen ne semble être implémentée pour endiguer ce phénomène. Aussi face à cette inaction, elle lui demande quelles mesures il compte mettre en place pour soutenir la politique de lutte et d'éradication des paradis fiscaux et ainsi diminuer la pression fiscale transférée sur les classes moyennes.

Réponse publiée le 13 août 2013

La lutte contre la fraude fiscale est une priorité pour les pouvoirs publics. A cet égard, de nombreuses mesures législatives ont été adoptées à l'initiative du Gouvernement, notamment à l'occasion du collectif de fin d'année, pour donner des outils renforcés à l'administration fiscale. Il s'agit par exemple de l'extension du champ de la police fiscale aux domiciliations fiscales fictives hors de France ou de la solidarité de paiement pour les rappels de TVA dus par les participants à des circuits frauduleux dans le secteur des véhicules d'occasion. D'autres mesures seront adoptées dans le cadre du projet de loi de lutte contre la fraude en cours d'examen au Parlement. Dans ce cadre, le Gouvernement partage la préoccupation de l'auteure de la question à l'égard des politiques de prix de transfert parfois abusives au sein des groupes multinationaux, qui ont pour effet de soustraire leurs résultats à l'impôt sur les sociétés françaises. Face à ces pratiques, le Gouvernement a soumis au Parlement, dès l'été 2012, une mesure législative qui renforce les moyens de l'administration, à travers un renversement de la charge de la preuve, pour taxer sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts les bénéfices que les entreprises françaises localisent dans des Etats ou territoires hors de l'Union européenne (UE) où ils sont soumis à des régimes fiscaux privilégiés. S'agissant de l'action des services de contrôle fiscal, ils sont particulièrement mobilisés sur les problématiques de l'évasion fiscale des groupes multinationaux. Ainsi, les rectifications de prix de transfert se sont élevées à 3,5 milliards d'euros en base en 2012. Un rapport de l'inspection générale des finances (IGF) remis récemment au Gouvernement formule des propositions interessantes à cet égard. Enfin, des mesures ont été prises pour renforcer les moyens de l'administration fiscale afin de lutter contre la fraude fiscale en matière de TVA et en particulier, les formes les plus graves telles que les carrousels. Outre l'application de lourdes sanctions fiscales, la direction générale des finances publiques (DGFIP) peut par ailleurs déposer une plainte au pénal, pour fraude fiscale ou escroquerie, délits passibles d'une amende et d'une peine d'emprisonnement. Au plan des résultats, les rappels effectués par les services du contrôle fiscal concernant cette taxe se sont élevés à 3,2 milliards d'euros en 2012. L'administration fiscale a également rejeté 1,3 milliard d'euros de demandes injustifiées de remboursement de crédit de TVA. Pour lutter contre les phénomènes de fraude massifs et évolutifs qui peuvent potentiellement toucher tout Etat de l'UE, la Commission a proposé un mécanisme de réaction rapide, que la France soutient activement et qui permettra d'introduire des mesures législatives permettant de sécuriser les dispositifs fiscaux et de mettre un terme aux risques les plus importants dès qu'ils sont identifiés. Au plan international, la France joue également un rôle essentiel. Ainsi, plusieurs Etats du G20 dont la France ont pris l'initiative de demander à l'organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) de présenter des propositions afin de lutter contre l'érosion des assiettes fiscales et les transferts de bénéfices. Au G20 de Moscou, en juillet 2013, l'OCDE a présenté un plan d'action sur cette base. A cette occasion, les ministres français, allemands et britanniques ont publiquement rappelé leur détermination pour progresser sur ce dossier. La France plaide en priorité pour que des solutions soient trouvées pour résoudre les phénomènes de double exonération, pour renforcer les mesures anti-abus et pour que les règles soient adaptées afin de mieux appréhender les profits réalisés par le secteur numérique, actuellement sous-taxé. La France considère que l'UE doit également s'attacher à résoudre ces questions, ce qui suppose que la Commission, comme l'y invite le Conseil Ecofin du 14 mai 2013, amende en ce sens le droit applicable ou propose de nouvelles actions, comme dans le secteur du numérique. La France a également pris l'initiative d'un ensemble d'actions au niveau international en faveur du développement de l'échange d'informations. Elle préside le groupe d'évaluation par les pairs (PRG) au sein du forum mondial sur la transparence et l'échange d'informations, qui a pour mission de mettre en oeuvre un processus d'évaluation des échanges de renseignements mis en place par les différents Etats et territoires, notamment ceux qui ont conclu dernièrement des accords de coopération. Elle poursuit une politique volontariste d'échanges de renseignements avec les anciens Etats et territoires non coopératifs. Sur le plan européen, la France a pris l'initiative avec l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni de faire part à la Commission européenne le 9 avril 2013 de sa volonté de développer un projet pilote multilatéral d'échange automatique reposant sur un format proche de celui prévu dans le cadre des accords négociés avec les États-Unis dans le cadre de la réglementation américaine FATCA. Cette initiative a d'ailleurs été rejointe par 12 autres États membres lors du Conseil Ecofin du 14 mai dernier et la Commission a été en outre invitée par le Conseil européen à formuler des propositions avant l'été pour élargir en conséquence le champ de la directive relative à l'assistance mutuelle. Cette impulsion a permis la reconnaissance de l'échange automatique d'informations comme un nouveau standard par le G8 et le G20. La France agit enfin pour renforcer les obligations de transparence. D'une part, grâce à elle, le Conseil européen du 22 mai 2013 a demandé à la Commission de réfléchir à l'établissement d'une liste européenne des paradis fiscaux. D'autre part, la France fait partie des Etats qui promeuvent une plus forte exigence de transparence concernant les activités conduites à l'étranger par les filiales des banques et des grandes entreprises. Concernant les établissements financiers, ceci se traduit au plan national par de nouvelles obligations, dans le cadre de la loi bancaire du 16 juillet 2013, lesquelles viendront compléter et renforcer l'accord défendu et obtenu par la France dans le cadre de la révision de la directive CRD IV. Le Gouvernement porte également dans les instances internationales (G8, G20) et au Conseil européen la nécessité d'étendre ces mesures de transparence aux entreprises multinationales.

Données clés

Auteur : Mme Marie-Hélène Fabre

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 4 juin 2013

Dates :
Question publiée le 5 février 2013
Réponse publiée le 13 août 2013

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