14ème législature

Question N° 1779
de M. Philippe Meunier (Union pour un Mouvement Populaire - Rhône )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires étrangères
Ministère attributaire > Affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Tête d'analyse > Syrie

Analyse > groupes terroristes. attitude de la Turquie.

Question publiée au JO le : 01/05/2014
Réponse publiée au JO le : 01/05/2014 page : 2756

Texte de la question

Texte de la réponse

SITUATION EN SYRIE


M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Philippe Meunier. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères ; j'y associe ma collègue Valérie Boyer. En Syrie, des milliers d'islamistes procèdent actuellement à un nettoyage ethnique, religieux et culturel en attaquant le territoire de Kassab, territoire habité par des familles syriennes d'origine arménienne, rescapées du génocide de 1915 perpétré par la Turquie. Ces djihadistes commettent ces atrocités à l'encontre de la population civile en bénéficiant de soutiens provenant du territoire turc. Ces violents combats ont aussi pour conséquence de rendre le désarmement chimique de la Syrie plus difficile. En effet, situés à quelques kilomètres du port de Lattaquié, ils paralysent l'évacuation par la communauté internationale de ces armes non conventionnelles appartenant à l'armée syrienne. Depuis trois ans, à Kassab, à Alep et dans de très nombreuses villes de ce pays, les minorités chrétiennes subissent le martyre. La Syrie ne compte plus les hommes égorgés, crucifiés et les femmes violées puis tuées par ces islamistes dont plusieurs centaines, nourris au sein même de notre République, sont partis de nos quartiers pour commettre leurs crimes.

Les députés UMP se sont opposés à une intervention de nos forces armées contre la Syrie, intervention armée souhaitée par François Hollande, qui n'aurait eu pour résultat que de servir les intérêts de cette internationale djihadiste (« Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe UMP.) Les faits nous ont donné raison. Aujourd'hui, il s'agit pour le Gouvernement d'assumer ses responsabilités au nom de la protection des minorités et de l'élimination des armes chimiques en Syrie. Ma question est donc simple et exige une réponse claire, monsieur le ministre : allez-vous demander à la Turquie de prendre les mesures nécessaires afin de mettre fin à la présence de ces bases islamistes sur son territoire, bases arrières qui permettent à ces criminels de commettre leurs atrocités et qui empêchent le bon déroulement du désarmement chimique de la Syrie ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le député, sur la protection des minorités, je pense que nous sommes absolument d'accord : rien ne justifie, rien ne peut expliquer, rien ne peut excuser que des minorités, quelles qu'elles soient, soient massacrées comme elles le sont. Sur ce point, l'accord est total entre nous. De même, nous pouvons faire des démarches à l'égard des pays circumvoisins et nous le faisons : là encore, je vous en donne acte. Cependant, je pense qu'il ne faut pas tout mélanger, notamment lorsque, à partir de cette demande parfaitement justifiée qui est la vôtre et que nous appuyons, vous laissez entendre que la politique menée par la France – comme par d'autres pays – serait contestable, en particulier lorsque vous dites – je ne crois pas me tromper, car cela m'a frappé en écoutant votre question –, que c'était une erreur de menacer la Syrie d'une intervention au moment où des armes chimiques étaient brandies.

M. Franck Gilard. C'était du bluff !

M. Laurent Fabius, ministre . Je ne partage pas votre sentiment : je pense que si, à ce moment-là, autour de la France, la Grande-Bretagne – qui n'a pas pu le faire pour les raisons que l'on sait – et les États-Unis d'Amérique étaient intervenus sur la base de ce que l'on a appelé les « lignes rouges », non seulement l'attitude du gouvernement de M. Bachar el-Assad aurait été différente, mais la crédibilité même des interventions occidentales, y compris par rapport à la Russie, aurait été différente. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Je pense qu'à cette époque une erreur a été commise, qui ne dépend pas de la France.

M. Claude Goasguen. C'est ce que disent les djihadistes !

M. Laurent Fabius, ministre . Pour conclure, monsieur le député – quitte à continuer la conversation avec vous, j'en suis tout à fait d'accord –, on a malheureusement tendance, en France comme dans d'autres pays, parce qu'il y a la crise ukrainienne, parce qu'il y a d'autres crises, à oublier ce qui se passe en Syrie, ce qui est absolument dramatique. Jour après jour, il y a des dizaines et des dizaines de tués. Il va y avoir la parodie de l'élection de Bachar el-Assad : or un homme qui est responsable de la mort de cent cinquante mille personnes ne peut pas être l'avenir de son peuple ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP et sur quelques bancs des groupes UMP et UDI.)