14ème législature

Question N° 2023
de M. Alain Calmette (Socialiste, républicain et citoyen - Cantal )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Budget
Ministère attributaire > Budget

Rubrique > entreprises

Tête d'analyse > compétitivité

Analyse > optimisation fiscale. perspectives.

Question publiée au JO le : 26/06/2014
Réponse publiée au JO le : 26/06/2014 page : 4690

Texte de la question

Texte de la réponse

OPTIMISATION FISCALE DES MULTINATIONALES


M. le président. La parole est à M. Alain Calmette, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Alain Calmette. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d’État chargé du budget.

À l'occasion des débats sur le projet de loi de finances pour 2014, notre groupe, par voie d'amendements, avait engagé des initiatives fortes pour renforcer les dispositifs de lutte contre les abus d'optimisation fiscale pratiqués par certaines multinationales, et, plus particulièrement, les géants d'internet. Malheureusement, ces dispositions avaient été censurées par le Conseil constitutionnel. Ce débat a cependant eu le mérite de placer au cœur du débat public une question majeure pour l'équilibre de nos systèmes fiscaux.

En effet, la multiplication des abus par quelques multinationales tentant par tous moyens de s'exonérer de leurs obligations, porte un préjudice grave à toutes les entreprises et tous les citoyens auxquels la puissance publique demande des efforts pour sortir de la crise. On connaît les stratégies agressives d'optimisation fiscale développées par les grandes entreprises du numérique. Ces mécanismes consistent par exemple à endetter artificiellement des structures françaises, à dissimuler des prêts en apport de capital ou à créer des sociétés écrans pour dissimuler les revenus.

Au moyen de ces stratégies, l'optimisation fiscale devient une véritable évasion fiscale : certaines entreprises exploitent la diversité des règles entre les États membres pour éviter toute forme d'imposition dans quelque pays que ce soit. À titre d'exemple, en 2013, le cabinet Greenwich Consulting a analysé les mécanismes d'optimisation pratiqués par les grandes entreprises numériques du GAFAM – groupement constitué de Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft. Il en ressort que, si ces sociétés s'étaient soumises aux règles fiscales en vigueur sur le territoire, elles auraient dû acquitter, en 2011, 828 millions d'euros. Or, à elles cinq, elles n'ont payé que 37 millions, soit vingt-deux fois moins.

À cet égard, notre groupe salue la décision du conseil des ministres des finances de l'Union, prise le 20 juin, de renforcer la lutte contre les montages fiscaux de type « prêts hybrides » par une modification de la directive dite « mères-filiales ».

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous dire quels sont les objectifs de la France en la matière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le Secrétaire d'État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Monsieur le député Alain Calmette, mesdames, messieurs les députés, je vous prie d'abord d'excuser mon collègue Michel Sapin, en déplacement en Suisse (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) un motif qui n'est d'ailleurs pas totalement étranger au sujet qu'aborde votre question.

Pour lutter contre les pratiques d'optimisation fiscale agressive de certaines multinationales, il est nécessaire de réformer les règles fiscales, parce que le monde a changé, parce que de nouvelles façons de faire des affaires sont nées et parce que ces règles permettent parfois à des entreprises, en toute légalité, de tirer avantage des lacunes du droit et de localiser leurs profits en fonction de leurs intérêts.

D'importants travaux sont en cours, vous le savez, au sein de l'OCDE, au travers du chantier dit BEPS. Ce dernier porte sur la territorialité : il s'agit de déterminer qui a le droit d'imposer. Il concerne également l'adoption de règles anti-abus et le secteur du numérique.

Nous devons aller plus vite et plus loin, aussi, au sein de l’Union européenne. La France y joue un rôle majeur. Elle a demandé et obtenu que la Commission réfléchisse à la fiscalité du numérique dans un cadre européen. Nous demandons que ce sujet soit mis à l'agenda de la prochaine Commission.

Comme vous le rappelez, monsieur le député, la semaine dernière, les ministres des finances ont renforcé la législation en amendant la directive « mères-filiales », afin de neutraliser les montages fiscaux dits « hybrides ». Les États membres ont aussi donné leur feu vert, la semaine dernière, pour que la Commission procède à une évaluation d'un autre dispositif qui permet à des entreprises exploitant des brevets d'obtenir d'un certain pays un taux réduit d'impôt sur les sociétés.

Oui, la France a soutenu la Commission lorsqu'elle s'est attaquée, par un autre biais, aux pratiques fiscales des multinationales, en ouvrant des enquêtes approfondies visant des États.

Nos objectifs sont clairs. Le Parlement a largement contribué à les définir et continue de le faire. Comme le disait votre rapporteure générale, la nuit dernière, si l'on peut, avec d'autres Parlements, faire avancer les choses…

M. le président. Merci, monsieur le secrétaire d'État.