14ème législature

Question N° 2289
de M. Henri Guaino (Union pour un Mouvement Populaire - Yvelines )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > élections et référendums

Tête d'analyse > comptes de campagne

Analyse > justice. fonctionnement.

Question publiée au JO le : 13/11/2014
Réponse publiée au JO le : 13/11/2014 page : 8559

Texte de la question

Texte de la réponse

AGISSEMENTS POLITIQUES


M. le président. La parole est à M. Henri Guaino, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Henri Guaino. Monsieur le Premier ministre, écoutez-moi bien (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) : « J'ai perçu chez deux ou trois ce vilain frémissement des narines qui sentent les boules puantes et qui se régalent à l'idée de renifler les odeurs d'égout », ainsi parlait Georges Pompidou après l'affaire Markovic. À mon tour, j'ai perçu, comme beaucoup d'entre nous, ce vilain frémissement des narines la semaine dernière… et les odeurs d'égout venaient cette fois-ci de l'Élysée (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.), plus précisément du bureau du secrétaire général.

Le secrétaire général de l'Élysée a failli à son devoir. Voilà le fait, simple et vrai.

Il a mis sur la place publique sa version d'une conversation privée. C'est une faute contre l'honneur.

Il a porté contre un ancien Premier ministre, dans le gouvernement duquel il a servi, des accusations d'une extrême gravité, qu'il ne peut étayer par la moindre preuve. C'est une faute contre le droit.

Il a menti, puis il s'est rétracté devant l'évidence du mensonge. C'est une faute contre la morale.

Il a mis le troisième convive, ami de l'un et de l'autre, dans une position intenable. C'est une faute contre l'amitié, et ce n'est pas la moindre.

Sous le couvert de la Présidence de la République, usant de l'autorité que lui confèrent ses hautes fonctions, il s'est livré à une manipulation politique, que dis-je à une machination, visant à discréditer non pas seulement un homme, ce qui est déjà impardonnable, mais l'opposition tout entière. C'est une faute contre la démocratie et la République. (« Oh là là ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Compte tenu de la place qu'il occupe dans l'État, oui, le seul mot qui convienne est celui de forfaiture. Elle fait naître une terrible suspicion sur les agissements au sommet de l'État !

D'autres manipulations, d'autres machinations de ce genre ont-elles eu lieu dans les palais de la République depuis deux ans et demi ? (« Excellente question ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Vives protestations sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. le président. Monsieur Bays, retrouvez votre calme, je vous prie.

M. Henri Guaino. Que penser de ces connivences avec des journalistes qui violent à tout bout de champ le secret de l'instruction, qui passent leur vie à l'Élysée, au ministère de la justice et avec certains magistrats ? En conservant M. Jouyet au poste que celui-ci n'a pas eu la décence de quitter de lui-même, le Président de la République couvre de tels agissements ; il les approuve.

Monsieur le Premier ministre, c'est grave car la dignité de l'État est en jeu ! Allez-vous ne rien… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Henri Guaino, j'ai du respect pour vous, et je sais que vous faites souvent référence à l'histoire, à vos racines gaullistes. Mais quand on connaît l'histoire, l'on constate que c'est votre inconscient qui a parlé. Ainsi, puisque vous avez évoqué l'affaire Markovic, je dois vous rappeler d'où sont venus les coups contre Georges Pompidou (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.) : ils provenaient de son propre camp. C'est pourquoi je suis très étonné que vous fassiez référence à cette affaire. (Mêmes mouvements.)

Monsieur Guaino, j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire ici très directement : respectez et respectons tous la justice et les médias.

M. Henri Guaino. Mais M. Jouyet a menti !

M. Manuel Valls, Premier ministre . Ici, à l'Assemblée nationale, mettre en cause la justice, comme vous l'avez déjà fait il y a quelques mois, mettre en cause la décision du Conseil constitutionnel quand celui-ci a rejeté les comptes de campagne de votre candidat alors que nous devons évidemment accepter toutes ses décisions, et, aujourd'hui, vouloir faire ici la justice à la place de la justice, ce n'est pas votre rôle ! Que ce soit à propos des comptes de campagne ou de ce qu'on appelle « l'affaire Bygmalion », il me suffirait de rappeler toutes les déclarations de votre camp pour bien montrer que ce n'est pas cette majorité, ce gouvernement, qui intervient en cette affaire.

M. Claude Goasguen. Ce n'est pas vrai ! Il faut dire la vérité !

M. Manuel Valls, Premier ministre . Je le répète : laissons la justice travailler, respectons son indépendance ; et puisque vous faites souvent référence au gaullisme, à l'État de droit, aux valeurs de la République, à ce que défend notre pays, j'invite chacun à respecter l'État de droit. Ayons tous le sens de l'État et de la République, et n'oublions pas que la polémique dans laquelle vous voulez nous entraîner pour échapper à la vérité abaisse le débat politique et ne correspond pas à ce que les Français attendent de la représentation nationale ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, ainsi que sur de nombreux bancs du groupe écologiste.)