Question de : M. Éric Alauzet
Doubs (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Éric Alauzet alerte Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la disparition programmée de très nombreuses souches de teintures-mères (TM), en raison de la transposition dans le droit français de la directive européenne n° 92/73/CEE modifiée par la directive n° 2004/24/CE. Avec cette mesure, la libre prescription du médecin et la pluralité thérapeutique sont menacées, réduisant d'autant la liberté du patient de choisir les méthodes thérapeutiques qu'il entend privilégier. Cette réglementation prévoit la séparation des médicaments délivrés par les laboratoires homéopathiques en deux catégories : d'une part, les médicaments à enregistrement homéopathique qui sont soumis à une procédure d'enregistrement simplifiée, et d'autre part les souches - notamment les teintures mères de plantes - qui devront passer par une procédure d'autorisation de mise sur le marché (AMM). Cette réglementation se heurte à la difficile définition de la teinture-mère, à la charnière entre homéopathie et phytothérapie : définie par son mode de fabrication homéopathique, elle est de facto assimilée à un médicament homéopathique, mais, étant exclue du champ de l'enregistrement homéopathique, elle se voit conférer le statut de "préparation à base de plante" par la directive n° 2004/24/CE du Parlement européen. Par conséquent, l'ANSM demande aux laboratoires une AMM homéopathique pour chaque souche de teinture-mère, sous peine d'abrogation. Cette disposition appelle deux critiques : d'une part, la demande d'AMM requiert une bibliographie homéopathique pour un produit qui est exclu du champ de l'homéopathie ; d'autre part, le principe de cette procédure est disproportionné vis-à-vis de ces souches, qui sont d'un usage beaucoup plus que trentenaire en France et dans la Communauté européenne, et qui constituent des matières premières utilisées entre autres pour les préparations magistrales. Cette mesure amène surtout une crainte : celle d'un effondrement de la pharmacopée disponible du fait de l'effort financier que représentent, pour les laboratoires pharmaceutiques, l'obtention de ces AMM. Ceci conduira inévitablement à l'abrogation de ces souches, alors que ces médicaments, qui certes ne sont pas exempts de tout risque, sont depuis des décennies délivrés en pharmacie et utilisés sous l'autorité des médecins, avec de réels bénéfices pour de nombreux patients. Pourtant, l'intérêt des teintures-mères en phytothérapie n'est plus à démontrer. La plupart de ces souches végétales sont connues de très longue date et sont à l'origine de plus de la moitié des médicaments chimiques. Des enseignements universitaires de phytothérapie fleurissent sur tout le territoire national. Plusieurs milliers de médecins ont été formés. C'est une chance pour notre pays, en matière de diversification thérapeutique, que de bénéficier d'autres choix face aux médications dont les pouvoirs publics souhaitent précisément voir diminuer la prescription médicale (psychotropes, anti-inflammatoires, IPP, antibiotiques, etc.). Par ailleurs, l'intérêt financier de la phytothérapie est réel. Son coût modeste, la part financière assurée par les patients, le moindre risque d'effets secondaires coûteux, tout ceci concourt à en faire une thérapeutique utile pour nos comptes publics dès lors que les prescriptions sont effectuées par des personnes compétentes. Dans ce domaine, l'utilisation de préparations à base de plantes représente une alternative pertinente, fiable et de bonne sécurité, mettant en œuvre le concept de durabilité auquel nous sommes attachés. Il lui demande quelles mesures elle envisage de prendre pour que l'application de cette directive dans le droit français ne se traduise pas par une obligation d'AMM pour chacune des teintures-mères, mais par une simple inscription sur une liste positive de toutes les plantes qui sont déjà recensées dans la pharmacopée, et en outre, de celles utilisées par la tradition, possédant une bibliographie scientifique et une innocuité avérée. D'ores et déjà, les sociétés savantes de phytothérapie sont prêtes à établir, avec l'ANSM, un recensement des teintures-mères qui leur sont indispensables.

Réponse publiée le 29 octobre 2013

Conformément aux dispositions du code de la santé publique, un médicament homéopathique est « un médicament obtenu à partir de substances appelées souches homéopathiques, selon un procédé de fabrication homéopathique décrit par la pharmacopée européenne, la pharmacopée française ou, à défaut, par les pharmacopées utilisées de façon officielle dans un autre Etat membre de l'Union européenne ». Les « souches » sont définies dans la pharmacopée européenne comme des substances, produits ou préparations utilisés comme point de départ pour la fabrication des préparations homéopathiques. A ce jour plus de 400 souches sont inscrites dans la pharmacopée européenne. En application de ce même code et conformément aux dispositions de la directive 2001/83/CE, tout médicament homéopathique fabriqué industriellement doit faire l'objet avant sa commercialisation ou sa distribution à titre gratuit, d'un enregistrement ou d'une autorisation de mise sur le marché (AMM). La procédure d'enregistrement, qui concerne un médicament ou une série de médicaments, fabriqués industriellement et obtenus à partir de la (des) même(s) souche(s) homéopathique(s) n'impose pas le dépôt d'un dossier par médicament. S'agissant plus particulièrement des médicaments homéopathiques disposant d'une AMM, les textes prévoient un dépôt d'AMM pour chaque souche homéopathique. Les teintures mères relèvent de la procédure d'AMM du fait de leur spécificité par rapport aux autres médicaments et notamment l'absence de dilution. Cette réglementation permet de garantir la qualité pharmaceutique, l'innocuité du médicament et la sécurité des patients. Par ailleurs, les médecins qui souhaitent prescrire des médicaments homéopathiques qui ne possèdent pas d'autorisation de mise sur le marché ou d'enregistrement peuvent prescrire des préparations magistrales.

Données clés

Auteur : M. Éric Alauzet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Affaires sociales et santé

Ministère répondant : Affaires sociales et santé

Dates :
Question publiée le 2 avril 2013
Réponse publiée le 29 octobre 2013

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