14ème législature

Question N° 2390
de M. Jérôme Lambert (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Charente )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Finances et comptes publics
Ministère attributaire > Finances et comptes publics

Rubrique > impôts et taxes

Tête d'analyse > fraude fiscale

Analyse > optimisation fiscale. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 04/12/2014
Réponse publiée au JO le : 04/12/2014 page : 9602

Texte de la question

Texte de la réponse

OPTIMISATION FISCALE


M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Jérôme Lambert. Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, l'absence d'harmonisation fiscale en Europe est l'une des principales causes de la stratégie d'optimisation fiscale aujourd'hui mise en œuvre par d'importantes entreprises. L'absence de règles communes au sein du Marché unique européen favorise cette véritable évasion fiscale. Certains États, comme le Luxembourg, ont même fait de ces systèmes d'évitement de l'impôt une véritable carte de visite.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Jérôme Lambert. Des entreprises telles que Google, Amazon ou Yahoo bénéficient pleinement de cette politique visant à attirer les sièges sociaux des grandes entreprises par la promesse d'une diminution de l'impôt. Elle leur permet de ne pas payer l'impôt dû là où elles exercent les activités qui génèrent leurs bénéfices.

Ces dispositions sont pour le moment légales dans l’Union européenne, qui a instauré le principe de la libre concurrence, y compris sur le plan fiscal, entre États. Les entreprises ne font donc qu'utiliser les moyens que les politiques mettent à leur disposition.

Consciente des dommages pour les finances publiques et des atteintes au principe de l'égalité devant l'impôt causés par de telles pratiques, l'Europe tente de résoudre ce problème très compliqué, qui suscite beaucoup de mécontentement parmi nos compatriotes.

À l'heure où la France et l'Allemagne manifestent leur volonté de mettre en œuvre une stratégie économique commune, et alors que vous dévoilez une série de mesures visant à renforcer l'attractivité de la place financière de Paris, quelles initiatives souhaitez-vous défendre, à la veille du Conseil européen du 18 décembre, afin de faire échec aux stratégies d'évasion fiscale de certains grands groupes multinationaux et de retrouver une juste répartition de l'impôt dû par ces entreprises dans les pays où elles exercent réellement les activités qui génèrent leurs bénéfices ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RRDP et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le député Lambert, voilà, un sujet qui devrait nous rassembler tous en cette fin de séance.

Le constat est implacable, et il est désormais fait par toutes les grandes nations du monde : de très grandes entreprises tirent de très gros bénéfices de l'activité qu'elles peuvent avoir sur tel ou tel territoire, en France, en Grande-Bretagne, aux États-Unis, au Japon ou en Chine, et qui ne payent aucun impôt nulle part. Il ne s'agit plus de chercher à s'implanter dans tel ou tel pays pour payer un peu moins d'impôt : elles n'en payent absolument nulle part, pas même aux États-Unis, dont elles sont souvent originaires.

Cette situation est tellement inacceptable qu'elle a fait réagir l'ensemble des grands pays du monde, en particulier lors du dernier G20 : les vingt plus grands pays du monde ont décidé de mettre en œuvre ce que l'on appelle le plan BEPS – base erosion and profit shifting – pour lutter contre l'érosion fiscale et ces stratégies d'optimisation…

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Michel Sapin, ministre. …qui sont néfastes à nos économies et qui rendent incompréhensible pour les citoyens de tous les pays les efforts qui sont exigés d'eux.

Parce que beaucoup de ces stratégies d'optimisation fiscale passent par l'Europe, voire par des États membres de l’Union européenne ou de l'Eurogroupe, nous avons, avec mes homologues allemand et italien, proposé de prendre dès maintenant une initiative commune. J'ai demandé au commissaire européen chargé de la fiscalité de faire des propositions dans ce sens avant la fin de l'année, en particulier à l'occasion du Conseil qui se tiendra lundi et mardi prochains, pour que l'Union européenne puisse mettre en œuvre dès 2015 les principes sur lesquels nous nous sommes mis d'accord au G20, et puisse ainsi lutter avec efficacité contre ces pratiques totalement insupportables d'optimisation fiscale. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.)

M. Jean Lassalle. Très bien !