14ème législature

Question N° 243
de M. Jean-Louis Borloo (Union des démocrates et indépendants - Nord )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > entreprises

Tête d'analyse > politique et réglementation

Analyse > compétitivité. charges fiscales.

Question publiée au JO le : 07/11/2012
Réponse publiée au JO le : 07/11/2012 page : 4696

Texte de la question

Texte de la réponse

COMPÉTITIVITÉ

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Borloo.
M. Jean-Louis Borloo. Monsieur le Premier ministre, certains débats demandent de la hauteur de vue, de la clarté et de la précision.
M. Jean Glavany. Cela vous va bien, monsieur Borloo !
M. Jean-Louis Borloo. Monsieur le Premier ministre, nous vous pensions prêt à gouverner. C'était une erreur mais, tant qu'à faire, le choix de Louis Gallois était un bon choix. N'est-ce pas lui qui préconisait dès le 7 juillet 2012 à Aix-en-Provence un choc de compétitivité massif, un transfert par allègement des charges sociales de 30 à 50 milliards d'euros, en indiquant qu'il était temps d'arrêter les demi-mesures ?
Monsieur le Premier ministre, vous avez réalisé le choc de compétitivité à l'époque, puisque contrairement aux suggestions de Louis Gallois, vous avez aggravé les charges sur les entreprises d'environ 30 milliards d'euros depuis que vous êtes entré en fonction ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)
Cependant, ce fameux rapport est passionnant et instructif. Que dit-il ? D'abord, il vous adresse une première supplique : " De grâce, arrêtez de clouer au pilori les dirigeants des entreprises françaises, et surtout, arrêtez l'instabilité, préservez les mesures essentielles qui ont été prises par le gouvernement précédent ! " (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. François Rochebloine. Très bien !
M. Philippe Martin. C'était un échec !
M. Jean-Louis Borloo. Mais ce rapport préconise surtout un allègement immédiat des charges de 30 milliards d'euros sur un an, un dispositif simple compensé par une assiette large.
Monsieur le Premier ministre, qu'avons-nous entendu ce matin ? Rien pour 2012 ! Rien pour 2013 ! Peut-être 10 milliards d'euros pour 2014, mais avec deux comités de suivi : l'un interne à l'entreprise,...
M. le président. Merci de conclure, monsieur Borloo.
M. Jean-Louis Borloo. ...l'autre par branche. Monsieur le Premier ministre, arrêtez cette usine à gaz ! Les entreprises ont besoin de clarté. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le président Borloo, j'ai présenté ce matin le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi...
Un député du groupe UMP. Cela ne veut rien dire !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. ...qui s'attaque au coeur du problème, c'est-à-dire la relance du moteur économique de la France. J'avais annoncé ce pacte dans les mêmes termes le 3 juillet lors de ma déclaration de politique générale. Maintenant, nous y sommes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)
J'ai demandé dès le 11 juillet un rapport indépendant à Louis Gallois. Chacun connaît son intégrité, son sens de l'État et son expérience de grand patron d'industrie.
Mesdames et messieurs les députés, ce rapport est le plus sévère et le plus implacable sur le décrochage de notre économie et de notre industrie depuis dix ans. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste. - Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
En effet, notre économie a décroché...
M. Claude Goasguen. Mais pas nous !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. ...et les entreprises françaises sont entrées dans un cercle vicieux qui les conduit à comprimer les coûts sans pouvoir innover ni investir. C'est pourquoi il était urgent, conformément aux engagements pris et annoncés, que le Gouvernement prenne ses responsabilités. Il le fait. Le rapport Gallois sera appliqué : tout le rapport Gallois, et plus que le rapport Gallois !
Un député du groupe UDI. C'est faux !
Mme Bérengère Poletti et M. Patrice Verchère. Et les gaz de schiste ?
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. En effet, il s'agit de retrouver le chemin de l'investissement, de l'innovation et de la création d'emplois en France. Pour cela, il est nécessaire de redonner de la marge de manoeuvre à nos entreprises. C'est ce que le Gouvernement a décidé.
La première mesure est sans précédent : il s'agit de l'allègement de 20 milliards d'euros du coût du travail - soit l'équivalent de 6 % du coût du travail -, mis en oeuvre sur trois ans par le biais d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi,...
M. Patrice Verchère. Et les gaz de schiste ?
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. ...utilisable par les entreprises dès 2013 pour 10 milliards d'euros.
M. Marc-Philippe Daubresse. C'est beau, l'enthousiasme !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Il n'y a pas plus simple que le crédit d'impôt.
M. Xavier Bertrand. La baisse des charges, c'est plus simple !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Il n'y a pas plus rapide que de l'utiliser. Les entreprises l'ont compris, et celles qui ne l'ont pas encore compris s'en rendront compte. Toutes les entreprises seront concernées : celles qui paient des impôts et celles qui n'en paient pas, y compris les travailleurs indépendants.
Mme Bérengère Poletti. Quelle usine à gaz !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Je viens de le redire : il s'agit d'une mesure simple. C'est une mesure que Louis Gallois a considérée comme plus efficace que ce qu'il proposait lui-même dans son rapport pour relancer l'investissement et la création d'emplois dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)
Il faut bien sûr financer cette mesure. Puisqu'elle coûte 20 milliards d'euros en vitesse de croisière, elle sera d'abord financée par moitié par des économies. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Pierre Lellouche et M. Christian Jacob. Lesquelles ?
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Les économies que nous proposons visent à moderniser notre service public, nos administrations publiques, par le dialogue.
M. Yves Censi. Mais quelles économies ?
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Dès 2013, nous nous attaquerons à ce chantier par la concertation, et non par un diktat décidé d'en haut. Nous voulons préserver nos services publics, et non les laisser se détruire à petit feu. 10 milliards d'euros d'économies représentent moins de 1 % de la dépense publique française.
M. Claude Goasguen. C'est lamentable !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Cet objectif est à notre portée si nous le voulons. Voilà le chantier que nous allons engager.
Plusieurs députés du groupe UMP. Bla bla bla !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Pour l'autre moitié du financement, pour les 10 autres milliards d'euros, il y a effectivement un appel à la TVA (" Ah ! " sur les bancs du groupe UMP). Mais celui-ci concerne seulement un tiers du financement, et il sera réalisé par une modulation à partir du 1er janvier 2014 et non à partir du 1er octobre 2012 comme vous l'aviez décidé pour 12 milliards d'euros prélevés sur le pouvoir d'achat des ménages. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
À partir du 1er janvier 2014, la TVA sera modulée. Le taux maximum augmentera de 0,4 point, le taux intermédiaire passera de 7 à 10 %, et le taux minimal baissera de 0,5 point pour l'alimentation et les dépenses d'énergie, qui constituent l'un des postes les plus importants dans le budget des ménages. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)
M. Pascal Terrasse. Très bien ! C'est courageux !
M. Claude Goasguen. Quelle incohérence !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. En outre, après la conférence sur la transition énergétique,...
M. Yves Censi. Bricoleur !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. ...une fiscalité écologique sera mise en oeuvre en 2016. C'est un plan cohérent, complet, qui n'est bien sûr pas limité à la question du coût du travail, mais qui lance un signe fort, que vous n'avez jamais eu le courage de réaliser et que nous entreprenons. (Protestations sur les bancs du groupe UMP. - Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Redonner des marges de manoeuvre à nos entreprises est une nécessité, une ardente obligation. Redresser la France, préparer l'avenir, en particulier celui de la jeunesse, c'est ce que le Gouvernement a décidé ce matin avec courage, détermination et sans ambiguïté. Je ne doute pas de la confiance de la majorité pour réussir ce changement. (Mmes et MM. les députés des groupes SRC, RRDP et écologiste, ainsi que quelques députés du groupe GDR, se lèvent et applaudissent.)