14ème législature

Question N° 2498
de M. Christophe Borgel (Socialiste, républicain et citoyen - Haute-Garonne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > politiques communautaires

Tête d'analyse > politique économique

Analyse > stratégie d'investissement. perspectives.

Question publiée au JO le : 28/01/2015
Réponse publiée au JO le : 28/01/2015 page : 363

Texte de la question

Texte de la réponse

RÉORIENTATION DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE


M. le président. La parole est à M. Christophe Borgel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Christophe Borgel. Monsieur le président, ma question s'adresse au Premier ministre.

La marche de Paris le 11 janvier dernier, les soixante-dix ans de la libération du camp d'Auschwitz que nous commémorons aujourd'hui viennent nous rappeler que le projet européen est porteur de sens. La paix est au cœur de ce projet bien sûr, mais celui-ci incarne aussi des valeurs communes que notre devise républicaine résume bien : la liberté, la fraternité et, bien sûr, l'égalité, car l'Europe s'est aussi construite pour que les femmes et les hommes de notre continent vivent mieux.

Ce projet s'est estompé ; les peuples européens nous l'ont dit sèchement en mai dernier à l'occasion des élections pour désigner leurs représentants au Parlement. Le peuple grec l'a dit avant-hier en rejetant l'austérité qui lui est imposée et en donnant une majorité à Syriza.

Ce projet s'est estompé car l'action de l'Europe a semblé se limiter à la réduction des déficits. Cet objectif n'est bien sûr pas condamnable, car chaque pays doit fournir sa part des efforts, mais il est absurde quand il résume à lui seul l'action économique européenne.

Ce projet s'est estompé car sa réalité démocratique est souvent incarnée aux yeux d'une grande partie des peuples européens par une technocratie éloignée des réalités quotidiennes.

La France porte une autre volonté, celle d'une Europe de la croissance et de l'emploi, d'une Europe qui fait de l'investissement sa priorité. Le Président de la République a plaidé en ce sens, parfois seul, au sein du concert européen. Depuis plusieurs semaines, les choses bougent, avec en toile de fond une déflation qui s'annonce et un taux de chômage toujours plus élevé.

La Banque centrale européenne vient de prendre une décision utile et historique, et derrière les aspects forcément techniques d'une nouvelle doctrine monétaire se profile également une évolution considérable pour la construction européenne. De même, le plan d'investissement de 315 milliards d'euros porté par le président de la Commission européenne permet d'avancer sur ce sujet majeur pour la croissance.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous indiquer à la représentation nationale comment le Gouvernement envisage la poursuite du débat européen ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député Christophe Borgel, ainsi que vous venez de la rappeler, le peuple grec s'est clairement exprimé lors des élections législatives anticipées de dimanche dernier…

M. Sylvain Berrios. Les socialistes ont fait un bon score !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …et le gouvernement français, à l'instar de tous les gouvernements européens, a félicité Alexis Tsipras de la victoire de sa formation, Syriza. Le Président de la République l'a d'ailleurs fait dès dimanche soir.

Dès aujourd'hui, et je veux le dire ici devant vous, le Président de la République et le Gouvernement sont évidemment prêts à travailler avec nos partenaires européens et avec le gouvernement grec qui sera formé dans les prochaines heures.

Le nouveau Premier ministre grec l'a dit : il y aura du travail dans les prochaines semaines. Nous devons l'accomplir dans le dialogue, dans un esprit de solidarité et de responsabilité. Notre objectif commun, vous l'avez rappelé, monsieur le député, c'est la croissance et la stabilité de la zone euro.

Je le répète ici clairement : la question de la sortie de la Grèce de la zone euro ne se pose pas, et le nouveau Premier ministre ne l'a en aucun cas envisagée. La Grèce, il faut le rappeler, a toute sa place dans la zone euro.

Bien entendu, il y a aura des discussions entre les partenaires européens de la Grèce et le nouveau gouvernement dans le cadre commun aux membres de la zone euro et qu'il faut respecter. Le rôle de l'Europe, qui est aussi le rôle de la France, est d'accompagner la Grèce sur le chemin de la croissance et des réformes utiles aux citoyens. Le rôle de l'Europe, c'est aussi de soutenir la croissance, la compétitivité et l'emploi, et c'est ce que la France, vous le rappeliez, fait depuis 2012 sous l'impulsion du Président de la République.

Cette volonté doit se traduire par des actes très concrets. J'avais dit ici même lors de mon discours de politique générale en avril dernier que l'euro était trop fort, trop cher. Les choix qui ont été faits, notamment par la Banque centrale européenne, ont permis que la devise retrouve un niveau qui correspond à ce qu'il faut pour l’Union européenne. La politique qui vient d'être annoncée par Mario Draghi et les 300 milliards d'euros d'investissements du plan Juncker correspondent aussi aux propositions françaises.

Vous avez également raison de souligner que s'il n'y a pas de changement, de réorientation de l'Europe vers les citoyens, vers la croissance, la compétitivité et l'emploi, c'est le projet européen lui-même qui risque d'être touché en son cœur.

Certes, il y a eu une élection en Grèce, mais il est aussi nécessaire aujourd'hui que l'ensemble des pays, l'ensemble des gouvernements réorientent la politique européenne, comme le souhaite la France, pour que le projet européen réponde à l'attente des citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)