14ème législature

Question N° 26326
de M. Alain Calmette (Socialiste, républicain et citoyen - Cantal )
Question écrite
Ministère interrogé > Réforme de l'État, décentralisation et fonction publique
Ministère attributaire > Réforme de l'État, décentralisation et fonction publique

Rubrique > départements

Tête d'analyse > action sociale

Analyse > financement. perspectives.

Question publiée au JO le : 14/05/2013 page : 5083
Réponse publiée au JO le : 29/10/2013 page : 11427

Texte de la question

M. Alain Calmette attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur les dépenses sociales des départements. Le 30 avril 2013, le Gouvernement et les conseils généraux ont fait un grand pas en partageant le diagnostic chiffrant à 4,6 milliards d'euros au moins le manque à gagner des départements résultant du désengagement de l'État dans le financement des allocations de solidarité. En 2012, sur un budget de fonctionnement de 70 milliards d'euros, les départements en ont consacré 15 milliards au paiement des trois principales allocations qu'ils versent aux 2,5 millions de bénéficiaires. Depuis le précédent gouvernement, à la suite de la non-compensation d'une partie croissante de ce montant par l'État, les départements réclament la prise en charge par l'État du RSA et de la prestation de compensation du handicap (PCH) qui relèvent de la « solidarité nationale » et le financement de l'APA à parité par l'État et les départements qui en financent aujourd'hui entre 70 % et 80 %. La mise en place par le Gouvernement d'un groupe de travail conduit par un membre de la Cour des comptes chargé de régler cette question est une excellente initiative. Le résultat de la séance du 30 avril 2013 en présence de nombreux ministres est une première étape nécessaire mais pas suffisante car les projections validées en accord avec le Gouvernement prévoient une augmentation annuelle des prestations sociales distribuées par les départements de 3 milliards d'euros. Cette tendance à la hausse pourrait pousser les départements à réduire leurs investissements de 30 %, selon le groupe de travail. Or on sait l'importance de ces investissements notamment dans les départements les plus ruraux. Dans son discours sur la décentralisation en octobre 2012, le président de la République s'était engagé à trouver des ressources « pérennes et suffisantes » aux départements. Aussi, il souhaite connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pouvant mener à une meilleure maîtrise de la dépense et à une éventuelle péréquation verticale et horizontale, et ce dès le projet de loi de finances pour 2014.

Texte de la réponse

Les dépenses de solidarité telles que l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la prestation de compensation du handicap (PCH) et le revenu de solidarité active (RSA) représentent un poids important au sein des dépenses départementales. Les compensations allouées par l'Etat en contrepartie des transferts de compétences organisés par le législateur couvrent partiellement la charge afférente. D'un point de vue juridique, l'Etat a toujours respecté les dispositions de l'article 72-2 de la Constitution, soit en transférant aux collectivités territoriales des ressources équivalentes aux charges qu'il consacrait à l'exercice des compétences avant leur transfert, soit en leur allouant des ressources évaluées en adéquation avec leurs nouvelles charges lorsqu'elles résultaient de création ou d'extension de compétence. S'agissant plus précisément des dépenses d'aide sociale, par trois décisions QPC du 30 juin 2011 (n° 2011-142/145, 2011-143 et 2011-144 QPC), le Conseil constitutionnel a confirmé que les mécanismes de compensation des transferts du revenu minimum d'insertion (RMI) et du RSA et d'accompagnement financier des extensions de compétences, résultant de l'entrée en vigueur de l'APA et de la PCH, étaient conformes aux articles 72 et 72-2 de la Constitution et ne portaient pas atteinte à la libre administration des départements. Ainsi, l'existence d'un différentiel entre les compensations versées par l'Etat et les charges effectivement supportées par les départements en la matière ne s'apparente pas à un défaut de l'Etat dans le respect de ses obligations constitutionnelles. L'effet de ciseaux constaté depuis 2008 entre les dépenses sociales exposées par les départements et les concours financiers versés par l'État à ce titre a toutefois fragilisé la situation financière d'un certain nombre de départements. En réponse, au-delà des mécanismes légaux de compensation, des mesures exceptionnelles ont été mises en oeuvre, au titre desquelles figurent notamment récemment la création d'un fonds de soutien exceptionnel aux départements en difficulté, doté de 170 M€, par l'article 48 de la loi de finances rectificative pour 2012 et la reconduction en loi de finances pour 2013 du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI) doté de 500 M€ pour accompagner la montée en charge du dispositif RSA. En outre, le Gouvernement a mis en place un groupe de travail Etat-départements chargé de faire des propositions sur les moyens d'assurer le financement pérenne et suffisant du RSA, de l'APA et de la PCH, conformément au premier engagement de la déclaration commune Etat-départements du 22 octobre 2012 - qui prévoit que « l'Etat s'engage à créer les conditions de mise en place, à compter de 2014, de ressources pérennes et suffisantes permettant aux départements de faire face, dans un cadre maîtrisé, au financement des trois allocations individuelles de solidarité dont la loi leur confie la charge ». Le groupe de travail ad hoc a été installé le 28 janvier 2013 par le Premier ministre. Il a organisé ses travaux en deux temps : une phase de diagnostic, incluant des éléments prospectifs sur l'évolution des dépenses en matière d'APA, de RSA et de PCH jusqu'en 2016, suivie d'une phase de propositions relatives tant au volet « dépenses » qu'au volet « ressources » des collectivités locales. Les travaux de ce groupe, animé par un conseiller-maître à la Cour des comptes, ont été organisés autour de trois instances : le groupe de travail politique lui-même présidé par le Premier ministre, instance plénière composée à parité de représentants de l'Etat, les ministres concernés, et de présidents de conseils généraux, était assisté par une mission d'appui technique composée des représentants des directions d'administration de l'Etat concernées et pour les départements, de directeurs généraux de services et de représentants de l'assemblée des départements de France (ADF) et enfin, par un groupe d'experts, instance technique à laquelle participaient les services des ministères concernés et de l'ADF. De février à mai 2013, le groupe s'est réuni chaque semaine sous l'une de ces trois formes. Ces travaux ont abouti à l'annonce de mesures concrètes de nature à assurer la soutenabilité du financement par les départements des trois principales allocations individuelles de solidarité, à savoir, d'une part, la mise en place d'un fonds de compensation péréquée, alimenté par le transfert aux départements du montant correspondant aux frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, évalué à 830 M€, et dont les critères et modalités de répartition seront définis conjointement par l'ADF et par l'Etat, et d'autre part, la possibilité ouverte aux départements, pour deux ans (2014 et 2015), de relever le plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 3,8 % à 4,5 %, permettant ainsi de dégager des ressources complémentaires en cas de baisse des recettes de DMTO en 2013 (de l'ordre de 1,3 Md€ de recettes nouvelles potentielles). Ces mesures ont vocation à figurer dans le projet de loi de finances pour 2014 pour une mise en oeuvre effective à compter de 2014. Elles constituent les deux principales mesures du volet départemental du pacte de confiance et de responsabilité conclu entre l'Etat et les collectivités locales en date du 16 juillet 2013, démarche globale que le Premier ministre avait confiée au comité des finances locales, en lien avec les associations d'élus. En application des dispositions du pacte, ces mesures financières ont également vocation à mettre en oeuvre l'engagement du Gouvernement de compenser les charges nouvelles qui résulteront pour les départements de la revalorisation exceptionnelle du RSA annoncée dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion ; ce dispositif fera l'objet d'un bilan global fin 2015.