Question écrite n° 27567 :
réglementation

14e Législature

Question de : M. Maurice Leroy
Loir-et-Cher (3e circonscription) - Union des démocrates et indépendants

M. Maurice Leroy attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, sur les préoccupations exprimées par les agriculteurs, viticulteurs et leurs organisations représentatives dans plusieurs départements en région Centre concernant la remise en cause par les services fiscaux de la valeur de cession, à l'intérieur du groupe familial, des parts de sociétés agricoles à une holding familiale. Bien que ces valeurs aient été calculées par les experts comptables conformément aux méthodes habituellement pratiquées, les services fiscaux départementaux reprochent aux agriculteurs et à leurs mandataires de ne pas tenir compte d'une "survaleur incorporelle". Dans les cas concernés, l'actif de ces sociétés est uniquement constitué du matériel et des stocks. Les terres exploitées sont quant à elle affermées, les baux ruraux ne sont pas cessibles et la loi interdit en outre de les valoriser sous quelque forme que ce soit. Les rectifications d'imposition pratiquées en la matière atteignent des sommes de l'ordre de 200 000 €. Cette interprétation est d'autant plus surprenante que les plus-values éventuellement dégagées de ces cessions ne sont pas imposables et, par conséquent, les agriculteurs n'ont aucun intérêt à minorer sciemment les valeurs de cession alors même que l'administration fiscale leur impute "un manquement volontaire" qui génère des pénalités à hauteur de 40 %. L'article 38 du CGI définit le bénéfice imposable comme étant la différence entre les valeurs de l'actif net à l'ouverture et à la clôture de l'exercice et la jurisprudence constante du Conseil d'État considère que la majoration ou la minoration des valeurs d'acquisition d'actif est sans incidence sur l'actif net. L'article 38 quinquies de l'annexe III-c du CGI dispose que les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'acquisition. Les services fiscaux fondent actuellement leur position sur l'arrêt "Raffypack" du Conseil d'État rendu le 5 janvier 2005 dont les faits constituaient une fraude manifeste, fraude qui n'est pas invoquée en l'espèce. Il lui demande donc de lui préciser la position du Gouvernement sur ce point et les instructions qu'il entend donner afin de conforter les agriculteurs et leurs experts comptables.

Réponse publiée le 11 février 2014

D'une manière générale, en application des dispositions de l'article 211-3 du plan comptable général (PCG), une immobilisation incorporelle est identifiable si elle est séparable des activités de l'entité, c'est-à-dire susceptible d'être vendue, transférée, louée ou échangée de manière isolée ou avec un contrat, un autre actif ou passif ; ou si elle résulte d'un droit légal ou contractuel même si ce droit n'est pas transférable ou séparable de l'entité ou des autres droits ou obligations. Dès lors, si elle est source de profits futurs, que son utilisation est durable et identifiable, et sous réserve de respecter les conditions du PCG mentionnées supra, une immobilisation incorporelle est susceptible d'être comptabilisée à l'actif. Au plan fiscal, il en est de même en l'absence de règles ou de définitions fiscales spécifiques, conformément à l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts. En outre, il peut être ajouté que le Conseil d'Etat (CE 28/12/2007 n° 284899 et 285506, Clarence Dillon et CE 19/12/2008 n° 296312, Bettinger) a confirmé que certains droits attachés à une exploitation agricole peuvent constituer un élément incorporel de l'actif immobilisé, quand bien même ces droits sont incessibles. Par ailleurs, il résulte également de la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE 5/01/2005, n° 254556, Raffypack ; CE 9/07/2009, n° 296048, Sté Panneaux Sandwichs européens) qu'en application de l'article 38-2 du code général des impôts et de l'article 38 quinquies de l'annexe III à ce code, dans le cas où le prix d'une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l'acquéreur, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine de l'immobilisation comptabilisée par l'entreprise acquéreuse pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit. Le critère principal d'évaluation de titres non admis à la négociation sur un marché réglementé est celui du prix auquel ont été conclues d'autres transactions portant sur les mêmes titres et se présentant dans des conditions équivalentes dans un délai raisonnable. En l'absence de transaction équivalente, l'appréciation de la valeur vénale est faite en utilisant différentes méthodes qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue. Le point de savoir si une cession de titres a été réalisée ou non à la valeur vénale et si la minoration de prix dissimule une libéralité résulte de l'analyse d'un ensemble d'éléments de fait propres à chaque affaire. Ainsi et s'agissant de situations particulières, l'auteur de la question est invité à communiquer à l'administration fiscale les noms des personnes concernées afin de permettre une instruction circonstanciée de ces dossiers, dans le respect des règles attachées au secret professionnel.

Données clés

Auteur : M. Maurice Leroy

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôt sur les sociétés

Ministère interrogé : Budget

Ministère répondant : Budget

Dates :
Question publiée le 28 mai 2013
Réponse publiée le 11 février 2014

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