textile et habillement
Question de :
M. Patrice Verchère
Rhône (8e circonscription) - Les Républicains
M. Patrice Verchère attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur l'effroyable catastrophe de l'effondrement du Rana Plaza au Bengladesh survenue le 24 avril 2013. Ce drame a révélé les épouvantables conditions de travail des bangladais qui s'apparentent à un esclavagisme moderne. Il semble mettre en lumière les limites les limites de la mondialisation et du dumping social auquel se livrent les multinationales occidentales et notamment européennes. Il lui demande de bien vouloir lui communiquer les noms des entreprises françaises et européennes qui employaient directement ou indirectement cette main d’œuvre pour la confection de leurs produits textiles.
Réponse publiée le 10 décembre 2013
Les récents accidents industriels survenus au Bangladesh, dont celui de l'usine de Rana Plaza le 24 avril ont mis en exergue la nécessité de renforcer les normes sociales et environnementales, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et la conduite responsable des entreprises à l'échelle internationale. La plupart des entreprises françaises et européennes de la filière textile s'approvisionnent en Asie du Sud-Est, notamment au Bangladesh, qu'il s'agisse de la grande distribution ou des marques. Pour des précisions, il convient de se référer à la communication des entreprises sur ce point. Concernant la catastrophe du Rana Plaza, le Gouvernement a fait part de sa très vive émotion. Dans les jours qui ont suivi l'accident les entreprises françaises ont été interrogées par l'ambassade. Les enseignes françaises ont diligenté des enquêtes internes sur place. Selon leurs indications, elles n'auraient pas de production sur le site. Après avoir mené une enquête interne, qui aurait mis à jour un cas de sous-traitance illégale au Rana Plaza, Camaïeu se serait engagée à participer à l'indemnisation des victimes du Rana Plaza avec son fournisseur. A ce jour, selon la presse [et le collectif éthique sur l'étiquette] sept autres marques étrangères se seraient également engagées à indemniser les victimes du Rana Plaza (Primark, El Corte Ingles, Loblaw, PVT, Matalan, Benetton et Premier Clothing). Le Gouvernement français a pris plusieurs initiatives pour renforcer la prise en compte de la RSE dans le commerce international et a proposé des solutions tant au niveau français qu'au niveau européen et international. Au niveau français, suite au drame du Rana Plaza, le 17 mai 2013 la ministre du commerce extérieur a saisi le point de contact national (PCN)[1] chargé de veiller à la mise en oeuvre des principes directeurs de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l'intention des entreprises multinationales. Piloté par la direction générale du Trésor, le PCN est une instance tripartite indépendante réunissant plusieurs administrations (économie/finances, environnement-développement durable, travail, affaires étrangères), 6 organisations syndicales et le mouvement des entreprises de France. La ministre a demandé au PCN de clarifier la portée de la responsabilité des multinationales françaises dans la chaîne d'approvisionnement de la filière textile et d'émettre des recommandations sur les mesures de diligence nécessaires pour identifier, prévenir et remédier aux incidences propres à ce secteur. Le PCN a mené des consultations de représentants de la société civile, d'organisation non-gouvernementale (ONG), d'entreprises françaises, de sociétés d'audit, de syndicats et d'organisations internationales (organisation internationale du travail, OCDE). Il a remis son rapport le 2 décembre (publié sur son site internet). Il formule plusieurs recommandations et propositions qui s'articulent autour de trois priorités : - renforcer la traçabilité par une cartographie de la chaîne d'approvisionnement. Il s'agit, pour une entreprise, d'identifier précisément les différents acteurs qui interviennent au cours de la production. Le drame du Rana Plaza a en effet mis en évidence le manque de visibilité des multinationales sur leurs sous traitants. Le PCN préconise également de limiter le nombre de fournisseurs afin de faciliter ce travail d'identification et de favoriser les relations d'affaires durables qui permettent de mieux connaître ses partenaires ainsi que ses capacités de production ; - améliorer la transparence à travers des audits plus complets et indépendants, portant sur la sécurité - solidité des bâtiments - l'environnement - toxicité des processus industriels et des produits - mais aussi la rémunération et la démocratie sociale à laquelle ont accès les travailleurs de la chaîne de production. Le PCN recommande également de renforcer la fréquence de ces audits et de les mutualiser entre entreprises afin de faciliter la circulation des bonnes pratiques ; - mettre en place un juste partage des responsabilités. Ainsi, le PCN préconise que les engagements éthiques et le respect des normes internationales de l'OCDE et de l'organisation internationale du travail (OIT) fassent l'objet d'une contractualisation entre les entreprises et leurs fournisseurs. Dans un tel cadre, le fournisseur a l'obligation de respecter ses engagements, mais le donneur d'ordres doit quant à lui s'assurer que le fournisseur a effectivement cette capacité, et qu'il la met en oeuvre, éventuellement avec son aide. Tout manquement avéré doit conduire à l'indemnisation et à la réparation des dommages de la part de l'ensemble des parties prenantes : entreprise, fournisseur, propriétaire du site de production, voire la société qui aurait réalisé des audits. Par ailleurs, le 23 mai 2013, la ministre du commerce extérieur a réuni les syndicats, les importateurs français s'approvisionnant au Bangladesh et des ONG pour faire progresser le respect des plus hautes exigences sociales et environnementales dans le commerce international. Elle a incité les entreprises françaises à rejoindre l'accord international tripartite sur la sécurisation des bâtiments et la prévention des incendies. Cet accord qui prévoit notamment de renforcer les inspections des usines de confection et de mettre en conformité la législation du travail au Bangladesh avec les standards internationaux, en lien étroit avec l'OIT, a été signé, depuis, par plusieurs entreprises françaises (Carrefour, Auchan, Camaïeu et Leclerc). Au niveau européen, la ministre du commerce extérieur a proposé de renforcer les normes sociales et environnementales dans les accords de libre-échange que l'Union européenne (UE) négocie avec ses principaux partenaires. Elle a ainsi adressé une lettre avec des propositions concrètes au commissaire européen au commerce, M. Karel de Gucht. Ces propositions visaient à renforcer la mise en oeuvre de ces normes, à mieux coopérer avec les principales organisations internationales (OIT, programme des nations-unies pour le développement (PNUD), etc.) et à faire participer plus activement la société civile à la surveillance des standards sociaux et environnementaux. Elle a également demandé la mise en oeuvre d'une feuille de route en matière sociale, en contrepartie du maintien des préférences commerciales accordées par l'UE à ce pays dans le cadre du dispositif « tout sauf les armes ». Réunis à Genève le 8 juillet 2013, l'UE, représentée par le commissaire De Gucht, l'OIT et le Bangladesh ont signé une déclaration commune prévoyant une feuille de route pour le secteur textile-prêt à porter[2]. Enfin, parallèlement à ces initiatives européennes, la France contribue activement au projet de directive sur la responsabilité extra-financière des entreprises. Au niveau international, la ministre du commerce international a saisi l'OCDE, afin de renforcer la mise en oeuvre des principes directeurs pour les entreprises multinationales et la responsabilité des différentes parties prenantes. La France a contribué activement à faire du 1er forum mondial sur la conduite responsable des entreprises organisé par l'OCDE les 25 et 26 juin un événement majeur dans « l'après Rana Plaza ». La ministre du commerce extérieur y a plaidé pour l'application la plus large possible des principes directeurs de l'OCDE, socle de normes qui couvrent aussi bien les droits de l'homme, que les conditions de travail et les relations professionnelles, l'environnement et la lutte contre la corruption. Elle a également rappelé que l'organisation internationale de normalisation vient de décider de développer une nouvelle norme « ISO » sur les « achats responsables ». Par ailleurs, prenant acte des démarches françaises, les PCN de l'OCDE, qui représentent 45 pays, ont approuvé une déclaration commune sur la conduite responsable des entreprises lors de leur réunion annuelle des 24 et 25 juin 2013. [1] http ://www. tresor. economie. gouv. fr/File/386314 [2] « Staying engaged : A Sustainability Compact for continuous improvements in labour rights and factory safety in the Ready-Made Garment and Knitwear Industry in Bangladesh ».
Auteur : M. Patrice Verchère
Type de question : Question écrite
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Commerce extérieur
Dates :
Question publiée le 28 mai 2013
Réponse publiée le 10 décembre 2013