occupation illicite
Question de :
M. Jacques Krabal
Aisne (5e circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste
Question posée en séance, et publiée le 9 avril 2015
OCCUPATION ILLICITE DU DOMICILE D'AUTRUI
M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
M. Jacques Krabal. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux.
Depuis de nombreuses années, la fin de la trêve hivernale fait ressurgir le drame des expulsions locatives. Le problème du manque de places en centres d'accueil et d'hébergement n'est pas réglé. À cela s'ajoute l'augmentation des squats, aussi bien dans les villes – même de petite taille – qu'en milieu rural. À Château-Thierry, nous le constatons au cours des maraudes régulières.
Ces problèmes aigus doivent être traités avec humanité, mais aussi avec responsabilité. Outre ces questions difficiles pour les maires, se développent les occupations illicites du domicile d'autrui, que ce soit en résidence principale ou en résidence secondaire. C'est ce que j'ai découvert dans ma commune.
Les exemples se multiplient de personnes qui, au retour de vacances, d'une absence prolongée ou à la suite d'une mise en vente, trouvent leur maison occupée. De ce fait, le nécessaire droit au logement est confronté au droit de propriété.
Comme vous le savez, au-delà de quarante-huit heures d'occupation, la police est juridiquement incompétente, ce qui n'est pas sans poser problème. La loi du 5 mars 2007 impose plusieurs procédures administratives, ce qui entraîne des délais importants avant que son bien soit restitué au propriétaire. Celui-ci se trouve ainsi victime d'une violation de domicile, souvent accompagnée de dégradations et du vol de biens personnels – sans parler du préjudice psychologique.
Cette situation inacceptable risque de s'amplifier. Aujourd'hui, le droit pénal paraît inadapté à la répression de cette infraction.
S'il est nécessaire de travailler aux solutions de relogement, ce qui n'est pas facile, que faire légalement pour préserver la propriété privée ? Pouvez-vous nous dire, madame la garde des sceaux, quelles sont les armes juridiques disponibles et comment vous comptez lutter contre ce phénomène, qui interpelle nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, vous soulevez le problème très particulier des cas de violation de domicile et de maintien dans le domicile. Il s'agit de faits dont la réalité est incontestable ; ils ont d'ailleurs donné lieu l'an dernier à 543 condamnations et, conformément aux dispositions du code pénal, la justice a pu faire droit aux propriétaires des logements.
Notre arsenal pénal prévoit en effet que, dans les quarante-huit heures suivant l'introduction indue dans le lieu de résidence, les services de police peuvent intervenir, ouvrir une enquête de flagrance et procéder à des interpellations. Mais il est vrai qu'au-delà de quarante-huit heures, l'enquête de flagrance n'est plus possible ; la seule procédure possible est l'enquête préliminaire.
Toutefois, je vous rappelle que l'article 38 de la loi dite « DALO » instaurant le droit au logement opposable permet au propriétaire ou au locataire de saisir le préfet. Celui-ci peut alors mettre en demeure les occupants de quitter les lieux dans les vingt-quatre heures ; passé ce délai, il peut faire intervenir la force publique.
M. François Rochebloine. Ça ne marche pas !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Il s'agit de la préservation du droit de propriété, tel qu'il est prévu et consacré dans la Constitution.
Il reste que le respect de ce droit de propriété ne peut, comme vous l'avez souligné, nous faire ignorer la difficulté de l'environnement et la précarité du droit au logement. On l'a vu : inscrire ce droit dans la loi ne suffit pas. Le dernier rapport sur l'état du mal-logement en France fait ainsi état de 3,5 millions de personnes mal logées et de 150 000 personnes sans aucun domicile.
M. François Rochebloine. Ce n'est pas la question !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous êtes plusieurs maires à veiller à procéder à un relogement. Néanmoins, nous devons faire en sorte que des réponses en termes de politique publique rendent cette loi efficace. C'est précisément ce à quoi la ministre du logement s'attelle de façon très résolue. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Auteur : M. Jacques Krabal
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Logement
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 avril 2015