Question de : M. Christophe Guilloteau
Rhône (10e circonscription) - Les Républicains

M. Christophe Guilloteau appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de réforme des tribunaux de commerce. Le rapport de la mission d'information sur le rôle de la justice en matière commerciale, publié le 24 avril 2013, provoque de vives inquiétudes au sein des tribunaux de commerce. Cette mission d'information s'attaque à une organisation pragmatique au sein de laquelle les juges consulaires sont reconnus pour la rapidité avec laquelle ils rendent leurs décisions et la qualité de traitement des affaires. En 2012, ce sont plus d'un million de décisions rendues, pour un traitement sur 5,4 mois en moyenne et un taux d'infirmation en appel très faible. Grâce à la proximité des tribunaux de commerce et des milieux socioprofessionnels dont ils jugent les litiges, les décisions sont rendues en cohérence avec les bassins d'emploi. Or ce rapport parlementaire préconise notamment de reconnaître aux justiciables la faculté de recourir, à leur demande, à la procédure de dépaysement, ce qui est contraire au principe de notre droit selon lequel le justiciable ne peut prétendre au choix de son juge. Il existe déjà une procédure de délocalisation quand les intérêts en présence le justifient. Le rapport propose également la pratique de l'échevinage. Si la présence plus systématique du parquet pour veiller à la régularité de la procédure s'avère être une initiative qui fait consensus, l'implication de magistrats professionnels dans la prise de décision se révèlerait inopérante tant dans son fonctionnement qu'en termes de coût humain et financier. L'échevinage serait ressenti comme un signe de défiance à l'égard des juges non professionnels, bénévoles motivés et responsables et risquerait de porter un coup fatal à une juridiction qui fonctionne de manière satisfaisante même si quelques améliorations en termes de formation, de statut et de déontologie peuvent être apportées. Il souhaite donc savoir si le ministère de la justice prendra en compte ces observations pour éviter la destruction d'une juridiction consulaire qui a fait ses preuves.

Réponse publiée le 14 janvier 2014

Les juges consulaires ont su utiliser leur connaissance du monde de l'entreprise au service des fonctions juridictionnelles qu'ils exercent et à l'évolution desquelles ils ont largement participé. Au coeur de la vie économique de notre pays, les juridictions consulaires doivent cependant faire face à la complexité croissante du droit et aux difficultés majeures provoquées par la crise économique. Pour relever ces nouveaux défis, les dispositifs de prévention et de traitement des difficultés des entreprises, l'organisation et le fonctionnement de la justice commerciale doivent être modernisés pour être davantage à la hauteur des enjeux pour nos entreprises et pour l'emploi. En décembre 2012, la garde des sceaux, ministre de la justice a mis en place des groupes de travail, cette large consultation a donné lieu à des travaux très riches. Parallèlement, une mission d'information de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République de l'Assemblée nationale a présenté, le 24 avril 2013, un rapport sur le rôle de la justice en matière commerciale. L'ensemble de ces propositions ont naturellement alimenté les travaux législatifs en cours de rédaction. Pour le gouvernement, le volet de la réforme des mesures de traitement des difficultés des entreprises est prioritaire, c'est pourquoi, il a décidé de l'intégrer au projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises. Cette loi d'habilitation est en cours d'examen au Parlement, dès son vote un projet d'ordonnance sera transmis au Conseil d'État pour une présentation en conseil des ministres dès le début 2014. Les mesures qu'il comportera ont notamment pour objectif d'inciter les entrepreneurs qui rencontrent des difficultés à davantage recourir aux mesures de prévention, de mieux articuler entre eux les dispositifs de prévention et les procédures collectives, de réduire les délais, d'accroître les pouvoirs des créanciers. L'esprit des mesures est d'aboutir à une plus grande réactivité, de donner aux créanciers et aux juges consulaires des outils adaptés, efficaces et fiables pour accompagner et aider l'entreprise en difficulté et par là préserver les emplois. Le second volet de la réforme de la justice commerciale concerne l'organisation et le fonctionnement des tribunaux de commerce et les acteurs de la justice commerciale. Il traitera en particulier de la déontologie, du statut et de la formation des acteurs de la justice commerciale, de l'organisation des juridictions et de l'amélioration du rôle des administrateurs et mandataires judiciaires. Ce texte sera présenté au Parlement en mars. L'échevinage, c'est-à-dire la constitution de formation de jugements mixtes comportant à la fois des magistrats professionnels et des juges élus, est une piste, en particulier au niveau des cours d'appel. Pour faciliter le traitement des dossiers les plus techniques et présentant des enjeux sociaux et économiques majeurs, sont également envisagées la spécialisation du parquet commercial et celle de certaines juridictions consulaires. La réflexion sur ces points doit être ouverte. Le projet de réforme du gouvernement comportera un projet de loi et toutes les mesures nécessaires à sa mise en oeuvre. L'efficacité et la confiance dans la justice commerciale sont les enjeux de la réforme, deux qualités sur lesquelles s'appuient les dirigeants d'entreprises en difficulté et qu'attendent leurs salariés qui savent que leurs emplois peuvent en dépendre.

Données clés

Auteur : M. Christophe Guilloteau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 4 juin 2013
Réponse publiée le 14 janvier 2014

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