14ème législature

Question N° 296
de M. Arnaud Leroy (Socialiste, républicain et citoyen - Français établis hors de France )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Redressement productif
Ministère attributaire > Redressement productif

Rubrique > industrie

Tête d'analyse > politique industrielle

Analyse > commissaires au redressement productif. missions. perspectives.

Question publiée au JO le : 07/05/2013 page : 4845
Réponse publiée au JO le : 15/05/2013 page : 5131

Texte de la question

M. Arnaud Leroy interroge M. le ministre du redressement productif sur le bilan des commissaires au redressement productif. En effet, ces commissaires régionaux ont été mis en place depuis maintenant près d'un an et il souhaiterait avoir une vue globale du travail effectué et des conséquences pour le tissu industriel français et pour l'emploi. Il souhaiterait savoir s'il est possible de déterminer des axes de travail spécifiques et une stratégie nouvelle pour les mois à venir suite aux premiers résultats obtenus.

Texte de la réponse

lign='center'>BILAN DE L'ACTION DES COMMISSAIRES AU REDRESSEMENT PRODUCTIF

M. le président. La parole est à M. Arnaud Leroy, pour exposer sa question, n° 296, relative au bilan de l'action des commissaires au redressement productif.
M. Arnaud Leroy. Monsieur le ministre du redressement productif, depuis plus de dix ans, le tissu industriel français est en souffrance. Les chiffres sont connus, en particulier celui de 760 000 emplois industriels détruits entre 2002 et 2012. Telle est la situation initiale à laquelle vous êtes confrontés et à laquelle nous avons dû faire face dès juin dernier. S'y ajoute la crise que nous vivons actuellement en Europe. Il est certain que les entreprises françaises doivent avoir en face d'elles un interlocuteur identifié pour les accompagner en cette période délicate et incertaine. L'accompagnement et l'écoute constituent l'épine dorsale du rôle des commissaires au redressement productif mis en place dès juillet 2012 par votre ministère.
Au cours de la première année, il a fallu éteindre les incendies, assumer l'urgence, traiter ce qui avait été négligé depuis des années, faire front et commencer à combler le manque criant de stratégie industrielle dans notre pays depuis trop longtemps. Plusieurs chiffres ont été communiqués : 500 dossiers traités, près de 65 000 emplois sauvegardés. Malheureusement, ce premier bilan est parfois masqué par des annonces fracassantes de plans sociaux qui endeuillent la classe ouvrière de notre pays.
Au-delà de la première année et dans une perspective de plus long terme, il faut anticiper les difficultés des entreprises et travailler sur l'accompagnement en amont. À cette fin, il est nécessaire de se pencher sur ce que l'on appelle les signaux faibles, c'est-à-dire des éléments susceptibles d'attirer l'attention, en amont des difficultés, sur la santé défaillante d'une entreprise mais également sur les mutations d'un secteur en devenir qui doit lui-même se projeter dans une mondialisation de plus en plus féroce. Travailler en amont donnerait aussi à l'action des commissaires du temps, qui leur fait souvent défaut. Un délai supplémentaire nous permettrait de travailler sereinement à des actions longues et pérennes.
Le terme de la première année d'action des commissaires sonne l'heure d'un premier bilan chiffré montrant ses résultats concrets et les possibles améliorations, dont nous pouvons aussi discuter, afin de prolonger au mieux l'action des commissaires au redressement productif dans les prochains mois et les prochaines années. Quels enseignements pouvons-nous tirer de cette quasi première année, tant en termes de méthodologie que de moyens, par exemple au regard des synergies avec les régions, dont nous avons salué, lors de la création de la BPI, le rôle prépondérant dans les affaires économiques ? À l'heure du débat sur la décentralisation, cette question me paraît d'importance.
La phase d'urgence, monsieur le ministre, se trouve derrière nous. Il faut maintenant nous investir dans une phase de sécurisation. Ce sont les réponses à ces questions que nous sommes venus chercher aujourd'hui.
M. le président. La parole est à M. le ministre du redressement productif.
M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Merci de votre question, monsieur le député Arnaud Leroy. C'est vrai, nous avons inventé une nouvelle méthode consistant, face à l'avalanche de plans sociaux, à désigner un interlocuteur unique chargé de redresser les situations difficiles. La mission des commissaires dans chaque région est d'endiguer les destructions d'emplois, trouver des solutions au cas par cas - car les configurations ne se répètent jamais - et réunir autour de la même table tous les partenaires et les ressources de l'entreprise, banquiers, actionnaires, dirigeants, salariés, élus et bien sûr l'État, de manière à partager les efforts pour sauver l'entreprise. Notre objectif, c'est une stratégie à l'allemande consistant à préserver les outils de travail, les brevets et les savoir-faire technologiques et humains afin de tenir en cette période difficile. Même si des sacrifices doivent être consentis en termes d'emplois et d'abandon de certaines capacités de production, nous conservons les noyaux.
Notre action se déploie tous azimuts et mon équipe reçoit tous les quinze jours les commissaires au redressement productif pour faire le point, ajuster les méthodes et remédier à leurs difficultés, y compris leurs problèmes de moyens car nous sommes en période de disette budgétaire. Le résultat est le suivant : 1 700 dossiers sont aujourd'hui sur le bureau du ministère, dans les commissariats au redressement productif et au comité interministériel de restructuration industrielle - c'est vous dire à quel point les dégâts sont considérables en cette période de récession - et nous avons pris des décisions sur 487 dossiers. Ce sont des décisions durables et définitives nous permettant de considérer que le dossier est traité pour de bon. Il y avait 76 809 emplois menacés, nous avons réussi à en préserver 65 031. Je ne prétends pas que ce soit un très bon bilan, nous perdons 10 000 emplois.
On nous demande d'ailleurs comment il s'articule avec les chiffres du chômage. Mais les licenciements économiques ne sont pas aujourd'hui la seule source d'augmentation du chômage, ils se conjuguent aux fins de mission de CDD, aux intérims et à l'arrivée des jeunes sur le marché du travail. Nous ne pouvons donc pas résumer un travail méthodologique qui est d'abord industriel et économique, axé sur la protection des outils de travail, des emplois et des hommes et des femmes travaillant dans les entreprises, à l'alpha et l'oméga de la lutte contre le chômage ! Il faut le faire, nonobstant.
Pouvons-nous faire évoluer les méthodes ? Nous le faisons chaque jour, monsieur le député, et d'ailleurs toutes les propositions sont bienvenues. Nous travaillons à la prévention que vous évoquez, en amont, et remontons le plus tôt possible aux difficultés que taisent les chefs d'entreprise par peur des conséquences. Nos commissaires sont en quelque sorte des mains bienveillantes pour les entrepreneurs qui luttent contre les difficultés et parfois leur solitude. Nous avons aussi trois médiateurs, un médiateur interentreprises, chargé de la sous-traitance, un médiateur de la commande publique, que j'ai créé, et le médiateur du crédit. Ils traitent aujourd'hui des milliers de dossiers, avec des résultats concrets et tangibles, en remontant en amont des difficultés des entreprises. Nous devons améliorer en commun le processus de l'action commune et vos propositions, monsieur le député, sont les bienvenues au ministère dont j'ai la charge.