14ème législature

Question N° 3221
de Mme Laure de La Raudière (Les Républicains - Eure-et-Loir )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Numérique
Ministère attributaire > Numérique

Rubrique > informatique

Tête d'analyse > fichiers

Analyse > données personnelles. protection.

Question publiée au JO le : 15/10/2015
Réponse publiée au JO le : 15/10/2015 page : 8088

Texte de la question

Texte de la réponse

PROTECTION DES DONNÉES PERSONNELLES


Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour le groupe Les Républicains.

Mme Laure de La Raudière. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le 6 octobre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a invalidé le contrat passé entre la Commission européenne et les États-Unis, communément appelé « Safe Harbor ».

De quoi s'agissait-il ? Cet accord, passé en 2000, permettait aux entreprises américaines telles que Google, Facebook, Microsoft, Cisco et bien d'autres, de recevoir, d'utiliser et d'exploiter, sans garde-fou, les données personnelles de nos concitoyens européens.

À l'époque, la Commission européenne avait jugé, un peu naïvement sans doute, et surtout sans concertation avec les États membres,…

M. Jacques Myard. Scandaleux !

Mme Laure de La Raudière. …que les États-Unis présentaient les garanties suffisantes pour la protection de la vie privée. Les révélations d'Edward Snowden sur l'utilisation de nos données par les États-Unis et la NSA nous ont apporté les preuves éclatantes du contraire. Les États membres auraient dû être beaucoup plus vigilants à l'époque de ces négociations.

J'ai l'impression que nous sommes en train de reproduire les mêmes erreurs dans la négociation du Traité de libre-échange transatlantique, dit « TAFTA ». Le contenu de ce traité concerne tous nos concitoyens, et pourtant nous n'en sommes pas informés. Il concerne des enjeux économiques, mais aussi la protection de la vie privée des Français.

À chaque séance de questions au Gouvernement sur des sujets européens, nous soulevons l'opacité des discussions entre la Commission européenne et les États-Unis dans le cadre de la négociation du TAFTA. À chaque fois vous nous répétez que vous demandez la transparence dans les négociations ; et à chaque fois, nous avons l'impression d'un aveu d'impuissance.

Alors, quand aurons-nous enfin gain de cause, quand pourrons-nous donner notre avis sur le contenu des points négociés ?

La France a indiqué quelles étaient ses lignes rouges dans cette négociation ; mais elle ne peut rien seule, et elle est bien affaiblie dans la négociation au niveau européen. Où en êtes-vous pour convaincre nos partenaires européens de la nécessité d'imposer ces lignes rouges ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du numérique.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État chargée du numérique. La protection des données personnelles de nos concitoyens, madame la députée, est un droit fondamental auquel ce Gouvernement est particulièrement attaché ; un chapitre du projet de loi pour une République numérique y est d'ailleurs consacré.

Ce Gouvernement est l'un de ceux qui, en Europe, sont le plus impliqués dans les négociations sur le règlement européen relatif aux données personnelles, texte très attendu. Et cela fait des années que nous demandions la renégociation de l'accord Safe Harbor qui, passé entre les États-Unis et l'Europe, permettait de déroger à l'interdiction de transférer des données personnelles des citoyens européens à l'extérieur : je parle à l'imparfait car, vous l'avez rappelé, la Cour de justice de l'Union européenne a invalidé cet instrument, considérant que les programmes américains de surveillance de masse sont incompatibles avec la vision européenne de la garantie des libertés dans le monde numérique.

Ce jugement est très important, tant au plan juridique qu'au plan économique, et son impact est potentiellement considérable. Il faut maintenant que l'Europe – l'Europe politique, non l'Europe technocratique – parle d'une voix forte pour affirmer ses valeurs et définir des outils alternatifs avec les États-Unis. Mais il est exclu que ce sujet soit négocié dans le cadre du partenariat transatlantique, le TTIP, qui n'est pas transparent : c'est là une ligne rouge. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

Mme Delphine Batho et M. Gérard Charasse. Très bien !

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Dans les chapitres relatifs au commerce électronique et aux télécommunications, nous demandons la protection des consommateurs, la neutralité de l'internet, une concurrence saine et loyale face aux géants américains et la liberté laissée aux États de fixer des règles de localisation des données de leurs concitoyens sur leur territoire. La France n'accepterait pas que la liberté et la vie privée soient bradées sur l'autel du commerce international. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)