Question orale n° 327 :
A 31

14e Législature

Question de : M. Michel Liebgott
Moselle (8e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Michel Liebgott interroge M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur le projet de réalisation d'une troisième voie sur l'autoroute A 31 entre l'agglomération thionvilloise et le Grand-duché de Luxembourg. Les projets d'infrastructures inscrits au schéma national des infrastructures de transport (SNIT) représentent un coût cinq fois supérieur à la capacité de l'État de les financer. C'est pourquoi une commission dite « mobilité 21 », animée par M. Philippe Duron, a été constituée afin de les hiérarchiser. En Lorraine, la mise à 2 fois 3 voies de l'autoroute A 31, de Thionville au Grand-duché de Luxembourg, est de l'avis général une impérieuse nécessité. Elle est inscrite au SNIT et doit y rester. En effet, cette autoroute approche de la saturation par la conjugaison de deux phénomènes, en l'espèce la progression constante du trafic international sur cet axe nord-sud déjà très emprunté et l'augmentation des travailleurs frontaliers lorrains, au nombre de 75 000 actuellement, se rendant quotidiennement au Grand-duché de Luxembourg. Les transports collectifs doivent être une alternative au « tout voiture ». Dans le domaine du transport ferroviaire, de gros efforts ont déjà été consentis par le conseil régional pour en favoriser l'usage, notamment par une politique tarifaire très attractive. Mais cela ne suffit pas tant la part du transport routier demeure majoritaire dans la mobilité quotidienne. En vue de satisfaire le double objectif d'une amélioration de la fluidité sur l'A 31, tout en limitant, tant que faire se peut, son empreinte environnementale, se dessine donc l'idée que la 3e voie à construire pourrait être réservée au covoiturage et aux transports en commun, d'autant que les collectivités territoriales et l'autorité organisatrice en charge du périmètre de transport urbain de l'agglomération thionvilloise (SMITU) ont misé sur le développement de lignes de bus transfrontalières et sur la construction de parkings de covoiturage. Dans le cadre de la commission intergouvernementale France-Luxembourg qui s'est tenue à Sennigen au Grand-duché de Luxembourg le 19 mars 2013, il a été indiqué à ses membres qu'un cahier des charges commun pour la réalisation d'une étude sur la problématique générale des transports sur l'A 31 en France et de l'A 3 au Grand-duché de Luxembourg avait été réalisé. Cette étude ne devrait pourtant pas être lancée avant l'été 2013. Il souhaite donc connaître la position du Gouvernement quant à la réalisation de cette troisième voie sur l'A 31 entre Thionville et le Grand-duché de Luxembourg, ainsi que les modalités d'usage envisagées et le calendrier précis de réalisation de l'étude évoquée.

Réponse en séance, et publiée le 26 juin 2013

RÉALISATION D'UNE TROISIÈME VOIE SUR L'A31 EN MOSELLE


Mme la présidente. La parole est à M. Michel Liebgott, pour exposer sa question, n° 327, relative à la réalisation d'une troisième voie sur l'A31 en Moselle.

M. Michel Liebgott. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, ma question s'inscrit également dans le cadre des travaux de la commission « Mobilité 21 », présidée par notre collègue Philippe Duron, qui rendra bientôt ses conclusions, comme vous venez de le rappeler. Ce n'est pas un exercice facile, puisqu'il s'agit d'arbitrer parmi 245 milliards de projets, quand nos moyens financiers nous permettent d'en couvrir au mieux 20 % – c'est en tout cas la situation que nous a léguée la précédente majorité –, compte tenu du nombre de dossiers enregistrés. Je vous avais déjà interpellé sur le projet de triplement des voies de l'A31, de Thionville à Luxembourg en particulier, tant le niveau de saturation y est préoccupant, au niveau de l'A7. A quelques jours des grandes vacances, cela évoque pour nous des images de bouchons. Nous ne sommes pas loin de dépasser la région lyonnaise.

Cette situation s'explique essentiellement par la conjugaison de deux phénomènes. Le premier est la progression constante et rapide du trafic international sur l'axe nord-sud, déjà très fréquenté, qui concentre vers le Grand-Duché de Luxembourg, puis vers la Lorraine, les flux venant de Belgique, des Pays-Bas, d'Allemagne et du Danemark. Le second est l'augmentation régulière du nombre de travailleurs frontaliers lorrains, qui avoisine les 80 000 personnes – certaines projections annoncent le nombre de 120 000 dans les prochaines années. Je vous rappelle que nous nous situons dans le bassin sidérurgique et ferrifère, et que ces emplois permettent de diminuer de moitié à peu près le taux de chômage de la Moselle. Cette troisième voie permettrait de satisfaire un double objectif : une amélioration de la fluidité – car aujourd'hui, ce sont des bouchons tous les jours – et une limitation de l'empreinte carbonée ramenée au trafic, puisque cette troisième voie pourrait être réservée aux transports en commun et au covoiturage.

Récemment, un journal local laissait entendre que l'A31 n'était peut-être plus aussi prioritaire qu'auparavant. Je souhaite donc vous rappeler aujourd'hui qu'il faut non seulement que l'A31 soit inscrite, mais que les collectivités locales ne doivent pas être ponctionnées pour ce projet. La région Lorraine a déjà largement contribué aux dépenses de transport, en finançant la LGV est-européenne, et le Grand-Duché de Luxembourg s'est inscrit pleinement dans la réalisation de ce projet d'une troisième voie, ainsi qu'il l'a rappelé récemment lors de la Conférence intergouvernementale franco-luxembourgeoise. La réalisation d'un péage à la place d'un poste frontière, sauf à créer un barreau parallèle réservé, n'aurait aucune incidence sur la fluidité du trafic et, de plus, serait difficile à vivre pour les utilisateurs.

Je suis d'autant plus surpris par certaines de ces « fuites » que le préfet de région annonçait que « même dans un contexte budgétaire contraint, on ne pourrait pas faire l'économie d'un aménagement ambitieux de l'A31 » et que le Premier ministre a lui-même demandé au préfet de région la réalisation d'un plan particulier État-région, pour que, d'ici à 2016, des projets visant à soutenir le développement de notre région, en proie à une grave crise socio-économique, soient engagés. Aussi ma question est-elle simple : ces rumeurs de report sont-elles fondées ou pouvons-nous espérer que cette troisième voie soit rapidement réalisée, sachant que les travailleurs frontaliers souffrent quotidiennement le martyre, mais n'ont pas d'autre choix que d'aller travailler au Luxembourg ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, concernant les « fuites », comme je l'indiquais à l'instant à votre collègue Olivier Faure, la commission Duron, qui représente toutes les sensibilités parlementaires, est chargée d'une mission d'expertise du SNIT, le schéma national des infrastructures de transport, qui lui-même comportait 246 milliards d'euros de projets. Il ne s'agit pas pour nous de juger l'efficacité d'un gouvernement à la longueur de la liste et au poids budgétaire des projets retenus, mais bien de donner un sens, de la faisabilité et de la perspective aux enjeux de transport et de mobiliser les territoires. Le rapport Duron contribuera à la réflexion du Gouvernement. Dès les premiers jours qui suivront la remise de ce rapport, le Premier ministre aura à annoncer un certain nombre de perspectives et de mises en cohérence des enjeux de transports.

S'agissant plus précisément de l'A31, c'est un exercice difficile de vous répondre alors même que le rapport n'a pas encore été remis, mais la congestion routière est une réalité, avec des taux de trafic dépassant les 70 000 véhicules par jour, atteignant même parfois les 90 000 véhicules. Mais à la différence du projet abandonné d'une nouvelle autoroute, l'A32, le projet aujourd'hui sur la table, celui de l'A31 bis, permettra, comme vous l'avez souligné, de répondre à des objectifs de transition énergétique et écologique, et d'améliorer les infrastructures existantes. Il s'agit d'accompagner ces actions en tenant compte du cadre environnemental.

Le projet de l'A31 bis vise à remédier aux difficultés récurrentes autour des agglomérations de Toul, de Nancy, de Metz et de Thionville, avec la réalisation du contournement ouest de l'agglomération pour ce qui est de Thionville. Le projet prévoit, entre Thionville et le Luxembourg, un élargissement à deux fois trois voies, avec une troisième voie qui pourrait éventuellement être réservée aux transports en commun ou à des politiques de mobilité du type covoiturage. C'est à l'étude. Les conditions de circulation au nord de Thionville sont conditionnées par ces aménagements et par ceux de part et d'autre de la frontière. J'ai rencontré mon homologue luxembourgeois et nous avons évoqué cette question, sensible notamment pour les nombreux transfrontaliers qui travaillent dans le Grand-Duché de Luxembourg.

Différentes options d'aménagement sont donc envisagées. Il convient aujourd'hui d'apprécier les avantages et les inconvénients de chaque solution pour éviter les difficultés de congestion et pour clarifier les conditions de financement de cet aménagement. Vous avez souligné que le Grand-Duché de Luxembourg cofinançait. Il s'y est engagé. D'ores et déjà, une étude, d'un montant de 550 000 euros a été copilotée par tous les acteurs, et le Grand-Duché la finance à hauteur de 30 %. Les résultats de cette étude sont attendus d'ici à l'été 2014. Quoi qu'il en soit, le coût global peut être évalué à 1,3 milliard sur l'ensemble de l'itinéraire. Compte de cette situation, le projet fait partie du SNIT. Nous sommes en concertation avec les élus, y compris vous-même puisque vous n'avez pas manqué, à plusieurs reprises, d'en souligner l'urgence et l'importance. Nous aurons à donner une suite, et et en tout cas à répondre à cette problématique réelle de congestion et de mobilité, notamment pour les transfrontaliers.

Données clés

Auteur : M. Michel Liebgott

Type de question : Question orale

Rubrique : Voirie

Ministère interrogé : Transports, mer et pêche

Ministère répondant : Transports, mer et pêche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 juin 2013

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