Question de : Mme Marie-Jo Zimmermann
Moselle (3e circonscription) - Les Républicains

Mme Marie-Jo Zimmermann rappelle à M. le ministre de l'économie et des finances le caractère subjectif conduisant à juger une offre dans un marché public comme étant anormalement basse. En effet, une même offre est susceptible, dans certaines collectivités, d'être jugée comme satisfaisante et dans d'autres comme étant anormalement basse. Dans ces conditions, elle lui demande s'il ne serait pas pertinent de fixer des critères objectifs de référence.

Réponse publiée le 23 octobre 2012

Le droit de la concurrence n'interdit pas que, pour pénétrer des marchés nouveaux, des entreprises consentent des efforts, parfois importants, en matière de prix et de services, éventuellement jusqu'à une marge nulle, voire négative, et répartissent les pertes et les profits qu'elles retirent de leur activité entre les différents marchés qu'elles obtiennent. En conséquence, il ne peut être envisagé de fixer un mécanisme d'exclusion automatique de ces offres sur la base de critères objectifs de référence. Un tel dispositif pourrait en effet conduire l'acheteur public à écarter une offre concurrentielle établie dans des conditions particulièrement favorables, selon des procédés nouveaux ou originaux. Il n'existe aucun critère économiquement pertinent et juridiquement acceptable au regard du droit national et communautaire susceptible, en toute hypothèse, de permettre la distinction entre une offre anormalement basse et une offre concurrentielle. Une offre peut ainsi être moins élevée que celles des autres candidats simplement parce qu'elle est réellement concurrentielle ou plus innovante. Plusieurs raisons peuvent l'expliquer tenant à la compétitivité de l'entreprise qui l'a établie, à la structure de ses coûts, à sa productivité, à sa compétence technique ou sa santé financière. Le pouvoir adjudicateur peut apprécier la dimension économique des offres à partir de plusieurs référentiels. Ces indices ne suffisent pas, pour autant, à qualifier l'offre d'anormalement basse. La sous-évaluation financière des prestations constitue le premier indice évident de l'offre anormalement basse. Le caractère bas du prix doit cependant être apprécié au vu de toutes les composantes de l'offre : les prix dépendront du temps passé ou des quantités qui auront été estimés par le candidat au vu des exigences du cahier des charges. Ainsi, par exemple, un prix peut être jugé bas, mais s'avère cohérent compte tenu du temps de travail envisagé ou de la composition des équipes de travail dédiées. Un prix faible ne peut être considéré, à lui seul, comme une preuve de l'insuffisance technique ou financière de l'offre présentée par une entreprise. Constater un écart significatif entre le prix proposé par un candidat et celui de ses concurrents est également un élément permettant de qualifier l'offre d'anormalement basse. Cet écart peut être apprécié en fonction d'un seuil déterminé par la moyenne des offres reçues, avec éventuellement neutralisation des offres les plus hautes. Cette moyenne correspondra ainsi à l'estimation raisonnable du coût des prestations en cause. La différence conséquente entre le prix de l'offre d'un candidat et l'estimation de l'administration peut aussi être un élément d'identification d'une offre anormalement basse. Parce qu'elle correspond aux disponibilités budgétaires du pouvoir adjudicateur, elle doit être prise en compte, sans pour autant constituer un référentiel unique justifiant l'élimination automatique de certaines offres. Il appartient en outre au pouvoir adjudicateur de s'assurer que l'offre présentée permet à son auteur de respecter ses obligations sociales issues du code du travail et des conventions collectives, notamment en matière de rémunération. Le mécanisme d'exclusion automatique des offres anormalement basses sur la base d'un critère mathématique est en revanche illégal. Le pouvoir adjudicateur ne peut rejeter une offre, sur le seul motif qu'elle serait inférieure à un seuil fixé en amont. Cette exclusion automatique prive, en effet, les candidats de la possibilité de présenter des éléments de justification du caractère anormalement bas de leur offre. Il reste toutefois loisible au pouvoir adjudicateur d'utiliser une formule mathématique, afin de déterminer un seuil d'anomalie en-deçà duquel les offres sont qualifiées d'anormalement basses. L'analyse des offres remises au vu de l'ensemble de ces éléments permet donc au pouvoir adjudicateur de relever certains indices qui, s'ils ne suffisent pas pour qualifier l'offre anormalement basse, justifient le déclenchement du dispositif prévu à l'article 55 du code. Une offre ne peut en effet être considérée comme anormalement basse que si son prix ne correspond à aucune réalité économique. Or, seule une analyse détaillée de l'ensemble des offres et des circonstances dans lesquelles celles-ci sont présentées peut permettre de détecter une telle situation, ainsi que le prévoit l'article 55 du code des marchés publics. Aux termes de cet article, après avoir identifié les offres susceptibles d'être anormalement basses, le pouvoir adjudicateur a l'obligation de demander des explications à leurs auteurs et d'en apprécier la pertinence, afin de prendre une décision d'admission ou de rejet. Cette procédure contradictoire ne relève pas d'une simple faculté, mais constitue une obligation qui peut, le cas échéant, être sanctionnée par le juge. Dans le cadre de cette procédure contradictoire, l'acheteur public a ainsi la possibilité de s'assurer que les prix proposés sont économiquement viables et que le candidat a pris en compte l'ensemble des exigences formulées dans le dossier de consultation. Le candidat doit pouvoir faire valoir son point de vue et démontrer le sérieux de son offre. L'article 55 du code liste cinq justifications qui peuvent être prises en considération par le pouvoir adjudicateur : les modes de fabrication des produits, les modalités de la prestation des services, les procédés de construction ; les conditions exceptionnellement favorables dont dispose le candidat pour exécuter les travaux, pour fournir les produits ou pour réaliser les prestations de services ; l'originalité de l'offre ; les dispositions relatives aux conditions de travail en vigueur là où la prestation est réalisée ; l'obtention éventuelle d'une aide d'État par le candidat. Les acheteurs publics peuvent par ailleurs utilement se reporter à la fiche « L'offre anormalement basse », disponible sur le site Internet du ministère de l'économie et des finances à l'adresse : http ://www. economie. gouv. fr/daj/conseil-aux-acheteurs.

Données clés

Auteur : Mme Marie-Jo Zimmermann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Marchés publics

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Dates :
Question publiée le 21 août 2012
Réponse publiée le 23 octobre 2012

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