14ème législature

Question N° 32938
de M. Jacques Cresta (Socialiste, républicain et citoyen - Pyrénées-Orientales )
Question écrite
Ministère interrogé > Artisanat, commerce et tourisme
Ministère attributaire > Économie, industrie et numérique

Rubrique > travail

Tête d'analyse > droit du travail

Analyse > main-d'oeuvre européenne. concurrence.

Question publiée au JO le : 16/07/2013 page : 7339
Réponse publiée au JO le : 19/04/2016 page : 3403
Date de changement d'attribution: 01/03/2016
Date de renouvellement: 17/03/2015
Date de renouvellement: 05/04/2016

Texte de la question

M. Jacques Cresta attire l'attention de Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme sur la concurrence déloyale dans le secteur du BTP. Avec l'ouverture des frontières et la création du marché unique européen, les entreprises nationales éprouvent de grandes difficultés pour pérenniser leur activité face à l'arrivée de sociétés et de travailleurs étrangers pour lesquels les salaires et les contributions sociales acquittées sont généralement moins élevés. Une directive européenne de 1996 prévoit que le versement des cotisations au titre de l'activité professionnelle d'un salarié détaché dans un État de l'Union européenne s'effectue dans son pays d'origine générant des pertes pour la sécurité sociale et des distorsions de concurrence dues à une législation fiscale et sociale plus avantageuse dans ces pays. Un rapport des députés Gilles Savary, Chantal Guittel et Michel Piron a montré récemment l'insuffisance du cadre normatif européen pour lutter contre les dérives de ce système et les menaces qui pèsent sur des secteurs professionnels comme le BTP. Le phénomène est renforcé par le recours de certaines entreprises au travail illégal, accentuant encore davantage ces écarts compétitifs. Pourtant, la mise en place de mesures simples pourrait limiter cette concurrence déloyale. La transmission des déclarations de détachement aux caisses de congés payés et l'extension de la carte BTP à l'ensemble des salariés permettraient de contrôler le respect des dispositions nationales en matière de droit du travail par les entreprises intervenant sur un chantier et ses employés, voire le recouvrement des cotisations sociales par les organismes français. Il lui demande ainsi son appréciation quant à la généralisation de ces dispositifs à l'ensemble des entreprises exerçant sur le territoire.

Texte de la réponse

Le Gouvernement est pleinement mobilisé contre la lutte à la fraude des travailleurs détachés. A cet égard, la France a soutenu, au niveau européen, le renforcement des obligations en la matière, qui a fait l'objet de la directive 2014/67/UE du 15 mai 2014 relative à l'exécution de la directive 96/71/CE, d'ores et déjà transposée par la loi no 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale. Par ailleurs, la loi no 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a prévu de nouvelles mesures visant à renforcer les moyens de lutte contre les fraudes au détachement. Ainsi, elle a notamment prévu, pour l'employeur établi hors de France, une déclaration, préalablement au détachement, auprès de l'inspection du travail et de désigner un représentant en France (article L. 1262-2-1 du code du travail) ; ces dispositions ont pour objectif de faciliter les contrôles. Lorsqu'un donneur d'ordre ou maître d'ouvrage a recours à un prestataire de services établi à l'étranger détachant des salariés en France, il doit vérifier auprès de ce dernier, avant le début du détachement, qu'il s'est bien acquitté de ses obligations de déclaration ; en cas de non-respect des formalités, le donneur d'ordre ou l'employeur établi à l'étranger encourt une amende dont le total peut aller jusqu'à 500 000 € (articles L. 1264-2 et L. 1264-3 du code du travail). La loi instaure également un mécanisme de solidarité financière du maître d'ouvrage ou du donneur d'ordre pour le paiement du salaire minimum ou conventionnel, à tous les contractants, ainsi qu'aux contractants du sous-traitant (article L. 1262-4-3 du code du travail). De plus, elle autorise l'administration à ordonner la suspension de la prestation, à titre temporaire, jusqu'à un mois, en cas de manquement grave de l'employeur aux dispositions légales relatives au paiement du salaire minimum légal, aux durées quotidienne ou hebdomadaire maximales de travail ou de conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine ; le non-respect par l'employeur de la décision de suspension d'activité sera passible d'une amende administrative pouvant aller jusqu'à 10 000 € par salarié concerné par le manquement (article L. 1263-4 du code du travail). Enfin, elle généralise et rend obligatoire la délivrance de la carte d'identification professionnelle du BTP pour tous les salariés pouvant intervenir sur un chantier de travaux publics, pour le compte d'une entreprise établie en France ou pour le compte d'une entreprise établie hors de France en cas de détachement. En cas de manquement aux obligations de déclarations des salariés, l'employeur est passible d'une amende administrative pouvant aller jusqu'à 500 000 € (article L. 8291-1 et suivants du code du travail). En outre, le Gouvernement a réuni, le 5 février 2015, la commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI). Au cours de cette réunion, le Premier ministre a réaffirmé que la lutte contre les fraudes aux détachements, dans le cadre des prestations de services internationales, constitue l'une des priorités du plan d'action pluriannuel contre le travail illégal. Pour l'année 2015 les actions de contrôles conjoints ont été renforcées : 30 000 contrôles avec l'URSAFF ont été opérés, notamment dans les secteurs prioritaires. Un plan national de contrôle spécifique aux 500 plus grands chantiers du bâtiment et des travaux publics a été mis en œuvre, en 2015, par les services de l'inspection du travail. Ces mesures témoignent de la volonté constante et affirmée du Gouvernement à lutter contre les fraudes au détachement des travailleurs.