Question au Gouvernement n° 3385 :
emploi et activité

14e Législature

Question de : M. Alain Tourret
Calvados (6e circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste

Question posée en séance, et publiée le 26 novembre 2015


SITUATION DE RENAULT-NISSAN

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Alain Tourret. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie.

Monsieur le ministre, depuis la Libération, l'État est l'actionnaire de référence de Renault. Cela est dû à l'histoire, à l'importance stratégique de Renault, à son modèle social, à son rôle dans l'équipement de nos armées.

Du fait de son alliance avec Nissan, principal partenariat entre la France et le Japon, Renault détient 43,4 % de Nissan et Nissan 15 % de Renault. Comme dans toute alliance, les choses se sont compliquées, car la France – l'État – ne veut à aucun prix se comporter, ainsi que vous l'avez dit, en actionnaire naïf et de seconde catégorie. L'État veut être, selon vous, un investisseur de long terme, par définition exigeant.

Or force est de constater que si Renault avait jadis contribué à assurer la puissance de Nissan, un autre équilibre s'est récemment créé, au profit exclusif de Nissan, aidé pour ce faire par M. Carlos Ghosn, pourtant président des deux entités.

Une telle stratégie de rééquilibrage, voulue par le président-directeur général de l'entreprise, se fera sans aucun doute au détriment de l'emploi en France, car M. Ghosn sera tenté de délocaliser des activités installées en France afin d'améliorer ses marges de rentabilité, que certains estiment plombées par la rigidité et l'atonie du marché français.

Bien plus, il se dit dans les milieux économiques que le PDG de Nissan-Renault envisagerait d'installer une holding aux Pays-Bas afin d'utiliser les largesses fiscales de ce pays. Comme on le voit, c'est l'avenir de Renault et de l'industrie automobile qui se joue.

Alors, monsieur le ministre, deux questions. Premièrement, l'État français va-t-il admettre un rééquilibrage voulu par Nissan, alors qu'au mois d'avril dernier le Gouvernement a décidé d'augmenter son actionnariat pour imposer le droit de vote double ? Deuxièmement, l'État français peut-il admettre un transfert d'activités industrielles, autrement dit une délocalisation, et la création d'une holding dans un paradis fiscal, même si celui-ci est européen ? Il y va de l'avenir de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur quelques bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

M. Pierre Lellouche. Allez, un peu de fermeté, monsieur Macron !

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Monsieur le député, je serai très clair et répondrai à vos deux questions.

D'abord, je veux rappeler que l'État français est un actionnaire de long terme dans le capital de Renault. C'est depuis 1945 que nous sommes au capital de cette grande entreprise, que nous avons accompagnée dans toutes les périodes, et que nous continuerons à accompagner.

Forts de cette vision à long terme, nous avons voulu appliquer à Renault ce que le législateur a voulu, à savoir un droit de vote double pour les actionnaires de long terme. À cette fin, nous avons acquis un peu plus de 4 % supplémentaires du capital de Renault, de manière à obtenir en assemblée générale ce droit de vote double. Nous continuerons donc à être actionnaires de long terme.

Il ne s'agit en aucun cas de rééquilibrer ou de transformer l'équilibre de l'alliance conclue en 2002. Cette montée au capital que nous avons voulue, ce droit de vote double que l'État a acquis, ne remettent nullement en cause l'alliance entre Renault et Nissan, et cela pour une raison simple : lorsque l'accord a été signé, en 2002, l'État détenait plus de 40 % du capital de Renault. Penser que cette opération a remis en cause les équilibres antérieurs est une vue de l'esprit.

En aucun cas, nous n'accepterons que ces équilibres soient revisités. L'objectif de l'État, en tant qu'actionnaire de long terme, est de pouvoir peser sur les décisions stratégiques de l'entreprise.

Quant à votre seconde question, je serai très clair. Le Premier ministre l'a rappelé il y a plusieurs semaines : il n'y a aucun projet de fusion, de délocalisation ou de transfert d'actifs. L'État a acquis en assemblée générale extraordinaire la possibilité de défendre ses droits et de disposer d'une minorité de blocage. C'est fort de ces droits que nous veillerons à la suite de la vie de l'entreprise, dont l'objectif est la consolidation de l'alliance. La stratégie aujourd'hui menée par la direction générale de l'entreprise est le renforcement de Renault-Nissan - pas plus, pas moins. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. Pierre Lellouche. Très bien ! Il ne faut pas céder !

Données clés

Auteur : M. Alain Tourret

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Automobiles et cycles

Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique

Ministère répondant : Économie, industrie et numérique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 novembre 2015

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