Question de : Mme Véronique Louwagie
Orne (2e circonscription) - Les Républicains

Mme Véronique Louwagie attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur le financement des taxes et subventions destinées au financement de la culture. Les opérateurs télécoms qui payent 27 % des 1,7 milliard d'euros, demandent que les grands acteurs américains de la planète (Apple, Microsoft...) apportent eux aussi leur contribution. Selon le rapport du cabinet Roland Berger, réalisé pour la Fédération des télécoms, la taxation des grands acteurs américains au même niveau que les opérateurs, rapporterait des millions pour la culture. Aussi elle s'interroge sur les actions qu'elle souhaite mettre en œuvre à ce sujet.

Réponse publiée le 25 mars 2014

Le développement d'Internet et des services en ligne est une source d'innovation, de croissance et d'emploi, mais également un facteur de déstabilisation de nombre de modèles d'affaires existants, qui doivent s'adapter ou se réinventer à l'ère numérique. Ces évolutions appellent corrélativement une réflexion sur la nécessité de faire évoluer un certain nombre d'instruments de politiques publiques. C'est notamment le cas s'agissant du financement de la culture et de la création, qui repose, entre autres, sur des mécanismes fiscaux. En la matière, l'une des difficultés est de parvenir à appréhender fiscalement les grands acteurs internationaux de l'Internet, qui ne sont pas établis en France : si ces acteurs captent une part croissante de la valeur liée à des consommations en France, ils ne contribuent en revanche pas à due proportion au financement de la création comme le font d'autres types d'entreprises contribuant à la diffusion et à la distribution des oeuvres de l'esprit (par exemple les éditeurs et les distributeurs de services de télévision). Au-delà de la problématique culturelle, ces acteurs bénéficient de mécanismes d'optimisation fiscale liés à leur statut extraterritorial (taux de TVA inférieurs, soustraction d'une grande partie de leurs bénéfices à l'impôt sur les sociétés, etc.) dont les pouvoirs publics ne sauraient s'accommoder. Cette question de la fiscalité des entreprises évoluant dans l'environnement numérique, et singulièrement des « géants du net » (notamment Google, Amazon, Facebook et Apple - les « GAFA »), a fait l'objet depuis 2010 (rapport « Création et Internet ») de nombreux débats, travaux parlementaires, propositions de loi tendant à l'instauration d'une fiscalité numérique neutre et équitable et préconisations issues de rapports remis au Gouvernement (« Création et Internet », Colin-Collin sur la « fiscalité du secteur numérique », Lescure « Acte II de l'exception culturelle », contribution aux politiques culturelles à l'ère numérique, et, dernièrement, celui du Conseil national du numérique). La taxation des « géants du net » ou, plus exactement, le rétablissement de l'équité dans le paiement de l'impôt, ne peut se faire sans une véritable coordination européenne et mondiale, car il s'agit d'appréhender des acteurs opérant à l'échelle mondiale et ayant intégré l'optimisation fiscale au coeur même de leurs activités, par nature transnationales et immatérielles, donc aisément délocalisables. Il convient donc, avant tout, de réformer les réglementations fiscales européennes et internationales aujourd'hui inadaptées. C'est dans cette perspective que le Gouvernement soutient activement les travaux menés à l'échelle de l'Union européenne sur ce sujet ainsi que ceux de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ces démarches ont notamment conduit la Commission européenne à mettre en place, le 22 octobre 2013, un groupe à haut niveau dans le domaine de la taxation de l'économie numérique, dont fait notamment partie Monsieur Pierre Collin, conseiller d'État, co-auteur du rapport sur la fiscalité du numérique remis au Gouvernement en janvier 2013. De même, le Conseil européen des 24 et 25 octobre derniers, qui a traité de la question du numérique, a notamment conclu que : « Les travaux en cours visant à lutter contre la fraude fiscale, l'évasion fiscale, la planification fiscale agressive, l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices sont également importants pour l'économie numérique. Les États membres devraient continuer de coordonner leurs positions, s'il y a lieu, afin de trouver, dans le cadre du projet de l'OCDE concernant l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), la meilleure solution possible pour les États membres et l'UE ». Par ailleurs, à la demande des ministres des finances du G20, l'OCDE a ainsi lancé, en juillet 2013, le BEPS (Base Erosion and Profit Shifting), un plan d'action pour lutter contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices, en identifiant 15 actions spécifiques nécessaires afin de doter les Gouvernements d'instruments nationaux et internationaux efficaces dans la lutte contre l'optimisation fiscale, notamment pratiquée par les « géants du net ». Au-delà de ces travaux, qui produiront leurs effets à moyen, voire à long terme, et s'agissant plus spécifiquement du financement de la culture et de la création, il reste fondamental, comme cela a été mis en exergue par le rapport Lescure, de mettre en place une fiscalité adaptée à l'ère numérique qui permettra de sécuriser le principe selon lequel les diffuseurs de contenus culturels contribuent à la création de ces contenus. Le Gouvernement est déterminé à ancrer ce principe de manière opérationnelle, selon des modalités adaptées, d'ici 2015.

Données clés

Auteur : Mme Véronique Louwagie

Type de question : Question écrite

Rubrique : Culture

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Dates :
Question publiée le 30 juillet 2013
Réponse publiée le 25 mars 2014

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